Les grandes entreprises entrent toutes dans une logique d'Open Innovation. Pour cela elles se rapprochent de startups nées à l'extérieur et parfois loin de leur culture. A l'inverse, le groupe Bolloré a décidé de soutenir la création d'une startup en interne, nommée Whaller, avec l'un de ses anciens collaborateurs Thomas Fauré. Rencontre.


Parmi les fleurons français que l’on cite peu, malgré son sens prononcé de l’innovation, il y a Bolloré. Dirigé par l’entrepreneur breton du même nom, la société a su instaurer de belles réussites parmi lesquelles Blue Solutions, à l’origine notamment du service d’autopartage parisien Autolib.

Ce grand groupe va parfois à contre courant d'autres industriels, ce qui séduit de jeunes ingénieurs. C'est le cas de Thomas Fauré, passé de Safran à Bolloré. Son entreprise de l'époque dépose beaucoup de brevets chaque année. Des brevets tous issus de son département de recherche. Tous, jusqu’au jour où Thomas Fauré, propose une invention à son chef de service, avec l'aide de qui il réussit à déposer un brevet. Problème, le jour de la remise des primes brevets de Safran (estimés à plusieurs milliers d'euros), l’ingénieur ne reçoit qu’un chèque de 200 euros.

« J’ai donné ma démission le lendemain. J'avais envie d'entreprendre, de créer quelque chose qui n'existait pas » Thomas Fauré, CEO de Whaller

La logique aurait voulu que Thomas Fauré quitte Safran pour voler de ses propres ailes. Pourtant, il a rejoint un autre géant, Bolloré, d'abord en temps que salarié, puis avec la casquette d'Entrepreneur. Cela peut paraître étrange, mais Thomas Fauré est resté dans son entreprise précédente pour créer sa propre entreprise.

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Au-delà de la confiance de Vincent Bolloré qu’il a su gagner, l’entrepreneur a vu dans son ancienne entreprise, un incubateur financier bien entendu, évitant les tours de table successifs auxquels sont habituées les startups, tout en bénéficiant d’une formidable stabilité. Toutefois le côté financier n’est pas le seul facteur qui a décidé le centralien à rester au sein du groupe.

En effet, là où les startups visent généralement un point de rentabilité à 2 ou 3 ans, le groupe Bolloré n’est lui pas pressé et laisse le temps. Cela a permis à Thomas Fauré de ne pas se projeter à 2 ou 3 ans mais à 20 ou 30 ans.

C'est également un incubateur structurel puisque Whaller, sa startup, bénéficie de tous les services "transverses" du Groupe. De la comptabilité, aux RH, en passant par juridique, la jeune pousse est épaulée et accompagnée par la Holding Bolloré sur ces sujets.

Et c'est enfin un incubateur de réseau, puisque Whaller s'inscrit dans la stratégie de convergences et de synergies entre les filiales du Groupe.

Bolloré et Whaller, une relation donnant-donnant

Evidemment, ce n’est pas pour le plaisir que le groupe Bolloré à décidé de porter le projet de Thomas Fauré. Whaller est une filiale de la Holding Bolloré. Malgré tout, le groupe attend de l’équipe dirigeante de la startup que celle-ci se développe et vole de ses propres ailes. C'est un pari sur l’avenir, qui ne coûtera pas grand chose à ce mastodonte, mais qui pourrait l’aider énormément si l’idée séduit son public.

« Je suis certain que Whaller est un projet qui a de l'avance, et explosera un jour où les internautes en auront assez de voir leurs propres données exploitées sur le web. Nous sommes une brèche dans un futur probable » Thomas Fauré, CEO de Whaller

Etonnant toutefois de voir émerger un réseau social dans un groupe comme Bolloré et maintenant Vivendi, dirigés par Vincent Bolloré, ainsi qu’Havas dirigé par son fils Yannick Bolloré. En y regardant de plus près les synergies deviennent évidentes. Tout est interconnecté. Par exemple, Whaller a créé le club autolib en partenariat avec Havas Motivation. Autre exemple, Whaller fournit la brique web social des bluezones en Guinée, au Togo et au Bénin.

Vincent Bolloré a l'esprit Startup : génie, vision et folie

Pour Vincent Bolloré, un groupe qui n'innove pas et qui ne se réinvente pas est un groupe qui meurt. Il faut dire que l'entrepreneur n'a cessé de se diversifier pour faire croître ses activités autour de métiers différents, allant des batteries et capacités électriques, aux voitures, en passant par les systèmes d'auto-partage, les bornes, les puces électroniques, les médias et aussi les télécoms. Whaller s'inscrit dans cette diversité, il s'agit d'une jeune pousse du groupe qui a vocation à grandir.

Cela peut paraître compliqué culturellement de voir grandir une startup dans un groupe industriel, mais aux yeux de Thomas Fauré, c'est surtout une opportunité incroyable.

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« Le groupe Bolloré est un groupe où les choses sont possibles et rapidement. Ce n'est pas un groupe qui possède une pyramide de responsabilités infinies. Gouverné par un homme au quotidien, les décisions peuvent être prises très vite. Vincent Bolloré a l'esprit startup : il a le génie, la vision et la folie » Thomas Fauré, CEO de Whaller

Il faut dire que toutes les grandes entreprises ne sont pas encore ouvertes sur le monde disruptif des startups. Comme Bolloré, il est nécessaire qu’elles commencent par identifier les moteurs internes, et surtout parmi leurs jeunes ressources.

« Ils sont encore plein d'enthousiasme, il ne faut pas casser cette dynamique. Et puis il faut y mettre des moyens concrets, avant de songer à la communication qu'on va en faire. L'open innovation doit servir l'entreprise et dessiner son avenir » Thomas Fauré, CEO de Whaller

Côté Startup, il faut oser ! C'est une situation incroyable d'avoir un géant industriel derrière soi. Il faut savoir renoncer à certaines choses, mais c'est à coup sûr mettre toutes les chances du côté de son projet.

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