Republication du 13 décembre 2018

Comment mieux débuter un festival sur l'intelligence artificielle qui réunit dirigeants de médias et d'agences de publicité qu'en se moquant ouvertement du monde et de ce qu'il est en train de devenir ? Mais surtout du rôle que l'on joue dans cette "crétinisation" de la société et cette dépendance à la technologie et à la rapidité qui pourrait bien nous amener à perdre en empathie et en distance critique. Devant plus de 300 personnes, Haroun a interrogé notre rapport aux réseaux sociaux, aux robots et GAFA et a conclu en beauté sur la startup nation et ses dérives. Jusqu'où irons-nous ? Morceaux choisis.

Au Japon, des mecs sont tombés amoureux d'un simulateur amoureux et il y en a un qui s'est marié avec le simulateur amoureux. Il s'est marié ! Mais comment ça va évoluer ? Tu penses que dans 20 ans, il va y avoir une intelligence artificielle aigrie par son couple ? Qui lui dira un jour : "tu crois que j'ai pas vu comment tu regardes le grille-pain ?" C'est quand même hallucinant, on est en train d'entrer dans un monde de dingues.

Ce monde de dingues, qui se laisse embarquer par les fake news et subit (volontairement) l'influence de Kim Kardashian "une nana qui a fait une sex tape et s'est mariée à un schizophrène". Un monde dans lequel l'humain a encore un coup d'avance sur la machine : "c'est notre bêtise, on est trop intelligemment bêtes", explique-t-il face à une assistance hilare quand il propose que l'avenir de l'humanité se joue sur une dernière partie de go entre le plus crétin des hommes et l'intelligence artificielle suprême. Spoiler alert, ce crétin prend rapidement les traits de Trump dans la suite du spectacle.

Mais l'humain ne fait pas que subir. Il est l'acteur de ce monde qui se dessine et dans lequel ses données sont devenues la monnaie d'échange pour des services gratuits, comme Facebook. "Non mais qui lit les conditions générales quand il télécharge une appli ? On est là, tu sais, oui oui oui oui. Facebook se réserve le droit de brûler ta famille. Oui oui oui oui", mime-t-il en scrollant très rapidement sur son smartphone imaginaire. "On ne sait pas ce qu'ils vont faire de nos données mais les grandes entreprises nous rassurent. Amazon, Google, Facebook ils disent "non non mais t'inquiète", et nous on est là "ah bon bah c'est bon ils ont dit t'inquiète"".

Dénonçant l'attitude de Mark Zuckerberg ou d'Eric Schmidt (l'ancien patron de Google), l'humoriste met ensuite en garde contre notre vacuité lorsqu'on traine sur internet et que l'on se laisse prendre au piège de ces "vidéos putaclics qui veulent que tu cliques. Comme ces vidéos "vous ne devinerez jamais ce que ce SDF a fait quand on lui a offert une couverture". Tu te dis "mais il faut que je voie ça, il faut absolument que je voie". Ben il a dit merci."

Aujourd'hui on a l'attention d'un enfant de 6 mois et ça continue à descendre, on est en train de devenir des abrutis finis. Et quand on se plaint des fake news... c'est de notre faute hein. Quand tu lis un article qui est sérieux, tu sais à quoi tu le reconnais ? C'est l'article que tu lis comme les conditions générales. Oui, oui, oui.

La startup nation en 4 répliques

Et pour les startuppers qui étaient dans la salle (Dear Muesli, Jam, Kymono etc.), Haroun a spécialement terminé sur un petit aparté sur la belle startup nation appelée de ses voeux par le président. "Macron adore les startups et il a dit "moi je veux faire de la France une startup nation". Euh, faut savoir que les startups ont à peu près 5% de chances de passer les 3 ans, statistiquement. Macron, c'est un mec qui joue au poker : il a un 2, un 5, il te dit "tapis""

Regard aiguisé et vannes qui tombent à pic, Haroun enchaîne avec sa fascination pour ce monde et pour les startuppers qui ont "voulu donner un sens à leur vie" avec leur entreprise. "Moi je pensais que donner un sens à sa vie, ça voulait dire se rendre utile. Non, ça veut dire lever des fonds et des millions d'euros pour une idée qui est un peu moyenne" et d'enquiller sur le type de projet aujourd'hui financé. "Tu vois parfois les articles qui passent : "Corentin a levé 6 millions d'euros pour un chausse-pieds connecté", c'est comme un chausse-pieds sauf qu'il y a le wifi". Énumérant les "idées moyennes" qui ont vu le jour ces dernières années, il s'interroge sur la suite :

Il y a même une appli qui te permet de te passer de ton téléphone. On arrive doucement vers la fin, non  ?

Et puisque c'est quand même plus agréable de l'entendre que de nous lire, et que votre cerveau, arrivé à cette étape de l'article, n'est plus tout à fait concentré, on vous laisse découvrir le specacle dans son intégralité qu'Haroun a décidé de laisser en libre-accès (participation au chapeau) ICI. Indispensable !