Il y a encore une décennie de cela, les enfants avaient l’habitude de se réveiller devant les dessins animés de TF1, France 3 et d’autres chaînes avec une promotion matinale à destination des plus jeunes. Mais ce réflexe s’est peu à peu estompé au profit de YouTube, qui propose d’innombrables contenus pour enfants à tous les âges.

Face à cette tendance de fond, Animaj a vu le jour avec l’ambition de créer un groupe média de nouvelle génération pour proposer des contenus audiovisuels pour enfants qui répondent aux codes de l’époque actuelle. Après avoir levé 100 millions d’euros en 2022 dans une opération combinant dette et equity, la jeune pousse annonce un nouveau tour de table de 75 millions d’euros mené par Bpifrance et HarbourView Equity Partners pour accélérer son développement. J.P. Morgan, Bootstrap, Left Lane, XAnge, Daphni et Marquee Ventures ont également participé à l’opération. A ses débuts, la société avait également séduit Kima Ventures, le fonds de Xavier Niel, et Motier Ventures, le family office de la famille Houzé, propriétaire des Galeries Lafayette.

«Notre ambition n’est pas de créer un nouveau Disney»

Fondée en 2022 par Sixte de Vauplane, qui a fait ses armes dans l’entrepreneuriat avec Nestor (livraison de repas) et Grégory Day, ancien responsable du développement international de YouTube Kids au sein de la filiale de Google, la startup repose sur un modèle consistant à racheter des marques existantes pour les remettre au goût du jour en les transformajt en franchises multi-formats (séries premium, formats YouTube, musique, jeux vidéo, expériences interactives ou encore produits dérivés). Le tout en s’appuyant sur l’intelligence artificielle pour réduire les coûts et les délais de production, et détecter les tendances qui ont le vent en poupe en temps réel pour adapter les contenus à venir.

Avec cette approche, l’idée est ainsi de donner naissance à un groupe d’envergure mondiale qui répond aux nouvelles habitudes de consommation des contenus des jeunes publics. Autrement dit, cela signifie les atteindre là où ils se trouvent, c’est-à-dire sur YouTube, TikTok, Netflix, Disney+, Roblox ou encore Spotify. «Notre ambition n’est pas de ressembler aux modèles d’avant ou de créer un nouveau Disney», assure cependant Sixte de Vauplane, co-fondateur et CEO d’Animaj. «Ce qui nous intéresse, ce n’est pas de créer un autre studio. C’est de repenser le modèle, du script jusqu’à la diffusion, en intégrant l’IA partout où elle crée de la valeur réelle pour nos artistes», explique-t-il.

Cap sur le marché américain

Dans cette perspective, Animaj a mis au point un pipeline propriétaire d’animation basé sur l’IA pour réduire jusqu’à 85 % les délais de production, et racheter des marques jeunesse à fort potentiel. En 2023, la société a ainsi mis la main sur la franchise espagnole Pocoyo. La méthode fait ses preuves, puisque l’entreprise est devenue le premier acteur européen sur YouTube Kids, avec plus de 22 milliards de vues par an et 242 millions d’utilisateurs uniques chaque mois. Outre YouTube, Animaj propose aujourd’hui ses contenus sur une centaine de plateformes dans le monde, comme Netflix, Disney+ et Spotify.

Disposant de bureaux à Paris, Londres et Madrid, la startup ne veut pas s’arrêter en si bon chemin. Elle entend s’appuyer sur sa nouvelle levée de fonds pour investir encore davantage dans l’IA et poursuivre ses acquisitions de marques à fort potentiel. Elle souhaite également gagner du terrain sur le marché américain. Dans ce cadre, une équipe dédiée à ce dernier devrait voir le jour dans les prochains mois. Drôle de coïncidence, ce tour de table de 75 millions d’euros est annoncé le jour où TF1 et Netfflix dévoilent un partenariat inédit pour diffuser les chaînes et contenus de la première chaîne de télévision d’Europe sur la plateforme américaine. Le signe que la transition de la télévision traditionnelle vers les plateformes numériques atteint un point de bascule critique pour l’industrie audiovisuelle.