Dans l’IA, deux écoles s’affrontent : les partisans des modèles fermés et les défenseurs de l’open source. C’est dans le deuxième camp que figure Yann Lechelle, figure majeure du secteur en France et en Europe. Ancien patron de Scaleway, la filiale cloud d’Iliad, est aujourd’hui à la tête de Probabl, une startup issue des laboratoires de l’Inria.

La société annonce aujourd’hui une levée de fonds de 13 millions d’euros menée par Serena et Capital Fund Management. Mozilla Ventures et French Tech Souveraineté, fonds opéré par Bpifrance dans le cadre du plan France 2030, ont également remis au pot lors de cette opération. Celle-ci porte à 18,5 millions d’euros le montant total levé par la startup depuis sa création en 2023. Cela représente ainsi l’une des plus importantes levées de fonds européennes en amorçage dans le domaine du logiciel open source commercial (COSS).

Scikit-learn, bibliothèque de machine learning open source la plus utilisée au monde

Lancée sous l’impulsion de 14 fondateurs, la société s’attèle à aider les entreprises à reprendre le contrôle sur la manière dont elles exploitent leurs données. Dans ce sens, Probabl souhaite transformer le machine learning artisanal et fragmenté en un levier de compétitivité pour doper la croissance des entreprises. «Notre mission est de transformer le machine learning d’une boîte noire en un moteur transparent, fiable et créateur de valeur pour chaque organisation», explique Yann Lechelle, co-fondateur et CEO de Probabl. «Notre but est de donner aux entreprises les moyens d’exploiter leurs données grâce à un apprentissage statistique simple, responsable, reproductible et durable», ajoute Gaël Varoquaux, co-fondateur et conseiller scientifique de la société.

Dans ce cadre, Probabl édite Scikit-learn, la bibliothèque de machine learning open source la plus utilisée au monde, avec plus de 2,5 milliards de téléchargements. Cette dernière est aussi bien utilisée par des groupes du CAC 40, comme BNP Paribas, que des géants américains, à l’image de Nvidia et Netflix. La startup française, en sa qualité d’opérateur officiel et exclusif de cette bibliothèque en Python initiée en 2007, estime ainsi être bien positionnée pour lever les freins à l’adoption industrielle de l’IA dans les entreprises.

«L’open gagne toujours»

Probabl, qui compte des antennes à Paris, Saclay, Sophia Antipolis et Berlin, va mettre à profit sa levée de fonds pour développer des solutions permettant aux entreprises de se mettre au diapason dans l’IA avec l’approche open source de la spin-off de l’Inria. «Cette levée de seed nous donne la puissance nécessaire pour projeter Probabl à l’échelle internationale. Nous construisons une force unique dans l’open source pour aider les entreprises à véritablement s’approprier leur data science», indique Yann Lechelle.

Sur Maddyness, le patron de Probabl estimait il y a un mois que «l’open source est la colonne vertébrale de l’IA» et que l’Europe serait donc bien inspirée de la financer. «L’open gagne toujours. Dans la concurrence de marché où l’adoption des développeurs et l’effet réseau priment, l’ouverture finit par triompher des enclos propriétaires — comme le World Wide Web l’a fait face aux portails fermés, comme Linux l’a fait avec les systèmes d’exploitation fermés, comme les modèles 'open weights' sont en train de le faire dans l’IA», déclarait-il dans nos colonnes.

Probabl entend donc s’inscrire dans cette vague européenne de l’open source dans l’IA. Aux États-Unis, Meta mise également sur l’open source avec ses modèles Llama, mais avec une stratégie commerciale bien rodée en arrière-plan. La licorne franco-américaine Hugging Face, qui a racheté Pollen Robotics en début d'année, est également en première ligne. Charge aux acteurs européens de trouver le bon modèle pour faire la différence.