Selon une note stratégique de Terra Nova, un think tank progressiste indépendant en innovation, la France ne produit plus de grandes entreprises innovantes depuis 40 ans. Restée à l'écart de l'émergence des nouvelles générations de hautes technologies, elle est aujourd'hui en retrait d'une part importante de l'innovation contemporaine, processus qui reste essentiel dans le développement et la croissance.

Le constat

La France a pris un retard considérable depuis une quarantaine d’années sur les sujets liés à l’innovation. Le pays a en particulier manqué l’émergence puis « l’explosion » des nouvelles générations de hautes technologies. Les indicateurs macro-économiques traditionnels confirmant cette tendance sont nombreux mais insuffisants pour permettre d’identifier les causes structurelles de ce retard.

Une étude comparée des grandes entreprises innovantes sur trois pays (France, Allemagne, Etats-Unis) montre que la France ne produit plus de grandes entreprises innovantes depuis 40 ans, au contraire notamment des Etats-Unis qui sont désormais à l’origine de la quasi-totalité des grandes sociétés innovantes du monde occidental dans le secteur High Tech. Leurs caractéristiques essentielles (jeunesse des sociétés, intensité en R&D, concentration aux Etats-Unis, capitalisation boursière de ces entreprises 100 fois supérieure aux Etats-Unis par rapport à la France…) démontrent certains des points faibles de la France.

Parallèlement, l’analyse de l’enseignement supérieur et de la recherche montre que le système d’enseignement supérieur français est lui aussi dans une situation très difficile. Il parait inadapté, pauvre, fragmenté et surtout isolé, ce qui le rend très difficilement apte à jouer son rôle dans une économie dominée par la concurrence internationale des systèmes innovants :

  • Ses établissements, les universités en particulier, en deçà du seuil critique par leur taille et leurs ressources, ne sont pas reconnus sur le plan international.
  • Les moyens financiers déployés par le pays (fonds d’origine privée et publique) pour ses étudiants du supérieur sont 2,5 fois plus faibles qu’aux Etats-Unis. Par ailleurs, la capacité d’investissement des universités américaines est considérable en comparaison, notamment au travers de leurs « endowments » et fondations.

Comment s'en sortir ?

L’écosystème innovant est, semble-t-il, au cœur du déficit français. Il est, par essence, impossible à « fabriquer », il ne peut que résulter d’un réseau de relations et de dépendances que ses acteurs constituent au cours du temps. Tout surcroît d’intervention directe et brutale de l’Etat en la matière serait peine perdue, voire destructeur. Il est possible de poser quelques principes généraux d’une nouvelle politique de l’innovation, adaptée à la situation française :

  • Une ambition de fond, transformatrice – et non une simple volonté « d’ajustement » ;
  • Une politique de long terme ; à ce titre, la stabilité fiscale, légale et règlementaire est essentielle aux processus innovants dans la mesure où ces derniers s’appuient principalement sur le capital humain, les réseaux informels et les institutions ;
  • Une approche collaborative: la France n’est pas d’une dimension économique suffisante pour pouvoir concilier saupoudrage, aménagement du territoire égalitaire, et taille critique internationale sur les grands sujets innovants.

Partant de ces principes, on se doute bien qu'il faudrait décliner tout cela à l’enseignement supérieur, le financement de l’innovation, le cadre fiscal et juridique, et les politiques de clusters et de pôles de compétitivité...

Pensez vous que ces quelques principes puissent faire la différence ?