L'actualité a été riche cette semaine dans le secteur du transport de personne. Dans la foulée de l'annonce de cessation de paiement de la société Voitures Jaunes et de la signature d'un partenariat entre la SNCF et Allocab (lire notre revue de presse de la semaine), l'Autorité de la concurrence vient d'apporter son soutien à la profession des VTC (Voitures de Tourisme avec Chauffeur) dans leur conflit avec les taxis.[hr]

Dans un communiqué de presse rendu publique ce matin, L'Autorité de la concurrence a exprimé un avis défavorable à la mise en application du projet de décret relatif aux voitures de tourisme avec chauffeur (prévue pour janvier prochain). Le projet de décret en question prévoyait d'imposer aux VTC de respecter un délai obligatoire de 15 minutes entre la réservation d'une voiture et la prise en charge du client. "We need to slow the innovation" lorsqu'elle est destructrice d'emploi, expliquait Arnaud Montebourg à la conférence Le Web la semaine dernière. Admettre cela, c'est admettre que le consommateur final est pris en otage par une profession qui ne s'adapte pas assez vite.

La position prise par l'Autorité de la concurrence aujourd'hui est quasi-idéologique puisqu'elle rappelle que l'Etat n'a pas à sanctionner inéquitablement une profession sous prétexte qu'elle bouscule un marché vieillissant et entraîne des licenciements. La destruction, lorsqu'elle est issue de l'innovation est créatrice. Quasi-idéologique parce que l'Autorité de la concurrence rappelle que si la profession des taxis souffre autant des comportements illicites de VTC (point d'origine de la grogne des taxis) "c'est d'abord un problème de police". C'est à l'Etat, dans son rôle régalien, de mettre en place un environnement légal, stable et de sanctionner les acteurs qui enfreignent les règles imposées, dans un souci d'une saine et juste concurrence.

Ce décret risque d'engendrer des "distorsions de concurrence" sur le marché de la réservation préalable dont les préjudices se porteraient directement sur le dynamisme des sociétés de VTC et sur les clients finals dont le temps d'attente et le prix se verraient significativement augmenter sans justification réelle. De même, la proposition d'annuler ce délai à l'entrée des hôtels haut de gamme et des salons professionnels est discriminatoire et "sans rapport avec la finalité de la réglementation envisagée".

En définitive, l'Autorité de la concurrence recommande de renoncer à la mise en application du décret ou de revenir à une solution déjà envisagée de limiter le délai d'attente aux réservations de clients non abonnés. Elle recommande également d'assouplir la règlementation des taxis en terme de tarification pour leur donner la possibilité de faire des courses aux forfaits et de s'aligner sur les prix des VTC. Enfin, elle propose la mise en place d'un véritable "outil statistique de suivi et d'enquête de l'activité des taxis" pour mieux appréhender les besoins et faire correspondre l'offre et la demande (recommandation déjà émise en 2005 et 2009 mais jamais suivie par les pouvoirs publics).

Qu'est-ce que ça change ?

Pas grand chose et pourtant... L'Autorité de la concurrence n'a aucun pouvoir exécutif et ne peut pas forcer le gouvernement à renoncer à son projet. Son pouvoir est consultatif, c'est-à-dire qu'il lui est conféré le pouvoir de donner son avis sur des questions de concurrence et d'être écoutée, que ce soit à la demande d’un tiers ou sur sa propre initiative. La décision reviendra finalement à la ministre de l'Artisanat, du Commerce et du Tourisme Sylvia Pinel.

Ce qui est intéressant cependant dans cette nouvelle, c'est que la saisie de l'Autorité de la concurrence a été faite par le gouvernement, et que c'est la première fois qu'un organisme extérieur et indépendant donne son avis, qui plus est en faveur des VTC. Ce n'est pas encore Noël mais c'est à prendre comme un cadeau pour une profession sous tension depuis presque un an.

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Crédit Photo : voitures-avec-chauffeurs.fr