Si la titularité des droits de propriété intellectuelle et industrielle est importante pour les startups innovantes, les cas d’espèce sont parfois plus complexes. En effet, très souvent, vous serez amenés à devoir composer avec votre situation antérieure, plus spécialement si vous avez développé une invention ou créé une œuvre dans le cadre de vos fonctions salariées et que vous souhaitez à ce jour pouvoir l’exploiter librement et personnellement.[hr]

En France, près de 85 % des créations sont réalisées par des salariés. Le régime juridique des inventions des salariés est donc déterminant puisque les intérêts du salarié et de l’employeur sont en jeu.

1- Les inventions de salariés

Les inventions du salarié sont régies par le Code du travail et le Code de la propriété intellectuelle, à défaut de stipulations contractuelles plus favorables aux salariés (convention collective, accord d’entreprise, contrat de travail).

Pour mémoire, l’invention doit, pour être brevetée, répondre à 3 critères (articles L. 611-10 et L. 611-17 du Code de la propriété intellectuelle) :

  • être nouvelle ;
  • relever d’une activité inventive ;
  • permettre une application industrielle.

L’invention ne doit pas non plus être contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs.

Ne sont en revanche pas brevetables :

  • les découvertes, ainsi que les théories scientifiques et les méthodes mathématiques ;
  • les créations esthétiques ;
  • les présentations d’informations.

Chaque invention de salarié fait l’objet d’une classification propre, en raison de la conciliation entre le devoir de loyauté du salarié à l’égard de son employeur et le droit de propriété de l’inventeur. Ainsi, l’invention du salarié est classée en trois catégories selon que l’on est en présence :

  • a. d’une invention de mission ;
  • b. d’une invention hors mission attribuable à l’employeur ;
  • c. d’une invention hors mission non attribuable.
  • d. Ordre public

Les inventions de mission

Pour être qualifiée d’invention de mission, votre invention doit être créée dans l’exécution :

  • soit de votre contrat de travail comportant une mission inventive qui correspond à des fonctions effectives,
  • soit d’études et de recherches qui vous ont été explicitement confiées.

Notamment, constitue une invention de mission la mise au point de procédés et de dispositifs dès lors que vous êtes chargés de l’étude de l’amélioration des techniques utilisées dans l’industrie concernée.

Votre mission d’invention peut être occasionnelle ou permanente, totale ou partielle, continue ou discontinue.

Les inventions qui découlent de l’exécution des études et recherches qui vous ont été confiées appartiennent à l’employeur.

Les inventions hors mission attribuables à l’employeur

Répond à la qualification d’invention hors mission attribuable à l’employeur toute invention que vous avez créée :

  • soit dans le cours de l’exécution de vos fonctions,
  • soit dans le domaine des activités de l’entreprise,
  • soit par la connaissance ou l’utilisation des techniques ou de moyens spécifiques de l’entreprise ou procurés par elle.

Les inventions hors mission attribuables appartiennent au salarié.

MAIS l’employeur a le droit de se faire attribuer la propriété ou la jouissance de tout ou partie des droits attachés au brevet protégeant votre invention de salarié.

Les inventions hors mission non attribuables

Enfin, vos inventions qui ne sont ni de mission, ni hors mission attribuables sont qualifiées d’inventions hors mission non attribuables.

L’invention hors mission non attribuable vous appartient et vous êtes juridiquement considéré comme inventeur indépendant.

Attention néanmoins : vous devez toutefois en informer votre employeur, au titre de votre devoir de loyauté.

Ordre public

Les règles concernant la classification des inventions des salariés sont d’ordre public. Ni le contrat de travail, ni la convention collective, ne saurait donc retenir une définition divergente des inventions de mission et hors mission.

En cas de désaccord entre l’employeur et le salarié sur le classement de l’invention, la Commission Nationale des Inventions de Salariés (CNIS) peut être saisie pour régler le différend.

2- Créations et droit d’auteur

Le droit d’auteur protège toutes les œuvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination.

La création de l’œuvre de l’esprit doit être originale pour être est protégée par le droit d’auteur. A défaut d’originalité, l’employeur peut librement utiliser une création de salarié. La création est alors dite purement utilitaire.

L’auteur dispose automatiquement du droit moral et des droits patrimoniaux sur ses œuvres de l’esprit, sous réserve toutefois de pouvoir apporter la preuve de son antériorité (cf. rubrique précédente).

Le contrat de travail n’autorise donc pas l’employeur à prétendre à des droits sur l’œuvre de l’esprit, nonobstant le salaire versé, les éventuelles indications données l’auteur ou la mise à disposition de divers moyens, notamment matériels.

L’employeur devra donc se faire céder, par acte exprès, les droits d’exploitation sur la création dont le salarié est l’auteur, celle-ci étant sa propriété.

La cession globale des œuvres futures est toutefois nulle : l’employeur devra donc, pour chaque œuvre de l’esprit créée par l’un de ses salariés, se faire céder les droits d’exploitation.

3- Créations et dessins et modèles

En droit français, les dessins et modèles sont protégés par le Code de la propriété intellectuelle. La protection des dessins et modèles est accordée au créateur du dessin et modèle. Cette protection s’acquiert par l’enregistrement du dessin et modèle (dépôt INPI).

Les règles de propriété intellectuelle peuvent, dans certains cas, rentrer en conflit avec le droit d’auteur (cf. supra 2) Créations et droit d’auteur).

Notamment, l’employeur peut se retrouver dans une situation de contrefaçon s’il a enregistré une création dont il n’est pas auteur. L’employeur encourt alors le risque d’une action en nullité de l’enregistrement de cette création si le salarié créateur se prévaut du droit d’auteur.

Le recours à la cession, par acte exprès, des droits du salarié sur la création permet à l’employeur d’éviter ce risque.

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