Sparknews revient avec une nouvelle édition de l'Impact Journalism Day, une journée consacrée à l'union des rédactions du monde entier, favorisant des sujets à l'impact positif. Maddyness, partenaire de l'opération, a souhaité en savoir plus à propos de cette initiative inédite à l'heure de la crise des médias. Son fondateur Christian de Boisredon répond à nos questions.


Quel est l'ADN et l'ambition de cette opération ?

Que ressentez-vous quand vous lisez la presse, quand vous écoutez la radio ou quand vous regardez un journal télévisé ? Vous vous sentez sûrement comme moi, un peu déprimé, et surtout submergé par ces informations catastrophiques. Je me suis toujours demandé pourquoi les médias avaient tendance à parler plus des problèmes que des solutions, un journaliste m’a dit un jour : « les trains qui arrivent à l’heure n’intéressent personne. »

J’ai fondé Sparknews pour justement encourager les médias à parler plus souvent des solutions : c’est ce qu’on appelle l’impact journalism. L’impact journalism valorise le double impact que peut avoir un journaliste: il a un premier impact lorsqu’il dénonce un problème, ce qui est un travail essentiel, mais il peut avoir un deuxième impact lorsqu’il présente, en plus, une solution concrète qui répond à ce problème, en nous donnant des pistes pour agir. Toutes les études témoignent de l’attente des lecteurs pour ce type de contenu (Sources : La Croix et Niemanlab).

En 2013, nous avons créé l’Impact Journalism Day (IJD), une opération éditoriale qui fédère les grands médias dont Le Figaro, Asahi Shimbun, The Straits Times, Le Soir, Politiken, The Sunday Times, etc. autour de sujets orientés solutions. Concrètement, chaque quotidien partenaire écrit 2 ou 3 articles sur des projets concrets et innovants à fort impact social, qu’il partage ensuite avec les autres. Nous coordonnons ce travail collaboratif, et le jour J, chacun compose son supplément en choisissant parmi les articles de ses confrères.

La prochaine édition aura lieu le 20 juin prochain et rassemblera 40 journaux de 40 pays. Tous ensemble, nous allons toucher 150 millions de lecteurs, pour les inspirer et leur donner envie d’agir.

Dans l’IJD de l’année dernière, on pouvait lire par exemple l’histoire d’un ingénieur français qui a mis au point un radiateur utilisant le traitement informatique comme source de chaleur. Les “Q.rads” proposent une puissance de calcul extrêmement performante à des prix abordables, réduisent les émissions de gaz à effet de serre et chauffent gratuitement des logements.

De nombreux journaux ont aussi raconté l’histoire d’un sac de couchage, baptisé Embrace Warmer, qui s’attaque à l’une des principales causes de mortalité infantile, l’hypothermie. Coûtant moins de 1 % du prix d’une couveuse classique, il a déjà été utilisé pour plus de 60 000 bébés dans le monde.

Après l’Impact Journalism Day, nous invitons tous les rédacteurs en chef pour un séminaire à Paris afin de débriefer ensemble, et de co-construire l’opération suivante. Cela permet de partager les best practices et de fédérer un véritable réseau de rédacteurs en chef engagés. Les retours des rédacteurs en chef sont souvent très positifs !

Par exemple, Dominique Eigenmann, le rédacteur en chef du Tages Anzeiger (1er journal suisse-allemand qui tire à 300 000 exemplaires) nous a raconté que l’opération avait connu un succès auquel il ne s’attendait pas : pic de connexions sur leur site web, nombreux retours positifs des lecteurs, augmentation des ventes... Il a donc organisé un workshop au sein de la rédaction pour voir comment ils pouvaient faire de l’impact journalism au quotidien. C’est exactement l’impact que l’on recherche, car les rédactions s’emparent de la démarche et l’enrichissent !

En 2013 pour la 1ère édition de l’IJD, Mourad Hachid, rédacteur en chef du journal algérien El Watan, a eu du mal à convaincre ses journalistes pour écrire des sujets supplémentaires. En 2014 pour la 2nde édition, tous les journalistes voulaient écrire. En fait, une fois que les rédactions constatent le succès de l’opération, c’est beaucoup plus simple de les impliquer !

Quelle est votre position sur l'impact des médias aujourd'hui et leur avenir ?

Les solutions existent, elles méritent d’être connues afin d’être développées et dupliquées. En cela les médias ont un rôle clé à jouer car ils ont un impact indéniable et sont une formidable caisse de résonnance. Selon notre étude d’impact de la dernière édition, 81% des porteurs de projets interrogés publiés dans l’IJD 2014 estiment que cette publication permet de sensibiliser le grand public aux problèmes auxquels ils répondent. 65% d’entre eux affirment qu’il y a eu un impact concret après la publication (ils ont été contactés par des lecteurs d’autres pays, cela les a aidés à lever des fonds, etc)

Lors de la première édition de l’Impact Journalism Day en 2013, une lectrice du Straits Times de Singapour a fait lire à son mari l’article sur les lunettes ajustables – des lunettes à 4$ s’adaptant à toutes les vues grâce à un système de double verre.

Or, son mari était l’un des responsables d’une entreprise mondiale de fabrication de verres optiques, et il ne connaissait pas ce projet. Il nous a contacté et on a organisé une rencontre entre lui et l’entrepreneur aux Pays-Bas, et ils travaillent désormais sur un projet pilote en Inde qui pourrait impacter des dizaines de millions de personnes.

Nous sommes convaincus que nous pouvons donc aller au-delà de l’impact médiatique qui compte déjà beaucoup, notamment en connectant certains porteurs de projets avec des entreprises pertinentes pour continuer d’amplifier ces projets.

C’est pourquoi nous lançons cette année en partenariat avec Les Echos et une dizaine de journaux économiques leaders dans leur pays une nouvelle opération dédiée aux solutions business & climat : Solutions&Co. Sur le même modèle que l’Impact Journalism Day, mais avec la presse économique cette fois-ci et sur des sujets exclusivement orientés climat accès à l’énergie à l’occasion de la conférence sur le Climat Paris 2015 (COP21).

Nous lançons d’ailleurs un appel à projet pour crowdsourcer les meilleurs projets qui pourront être publiés dans les grands journaux économiques et pourront ensuite être connectés avec certaines grandes entreprises pour les aider à grandir.

Certes les trains qui arrivent à l’heure n’intéressent personne, mais les trains qui arrivent en avance, eux, méritent d’être connus et intéressent les médias ! Le 20 juin prochain, vous pourrez découvrir toutes ces histoires dans 40 journaux du monde entier (dans le Figaro en France). Si certains sujets vous ont particulièrement intéressés, vous pourrez assister à des sessions de brainstorming organisées par Make Sense afin d’aider les projets.

Montrez votre engagement et votre engagement en postant votre selfie avec votre journal sur les réseaux sociaux avec le #ImpactJournalism. Rendez-vous le 20 juin !