Redynamiser les commerces de proximité et apporter aux consommateurs un service plus adapté à leurs besoins, tel est le pari que se sont lancé quelques startups dans l'Hexagone. Leur credo : la livraison locale.

Selon une récente étude de l'IFOP, le mode de livraison serait devenu le premier critère de choix lors d'un achat sur internet. Ainsi spontanément cité par 62% des personnes interrogées, il devancerait le prix, la sécurité, et même le produit en lui-même. Un phénomène récent, datant seulement de "deux ou trois années" selon Jérôme Benoît, coauteur de l'étude.

Il explique que "beaucoup de consommateurs ont déjà été déçus par une livraison". A tel point qu'un tiers d'entre eux serait prêt à changer de site lors d'une prochaine commande, tandis que d'autres accepteraient de payer plus cher pour un mode de livraison différent. Devant l'importance croissante de ce service, de nombreuses startups à l'image de Deliver.ee, Colisweb, Toktoktok, Stuart ou encore You2You ont vu le jour en France pour répondre à la demande de plus en plus exigeante des consommateurs.

La livraison locale : plus rapide, plus flexible

Si certaines ne font office que d'intermédiaire pour la livraison dite "du dernier kilomètre", d'autres ont tout misé sur la livraison locale : le livreur va chercher le produit dans une boutique proche du consommateur, et lui apporte, en seulement quelques heures, à l'endroit de son choix. Pour Edouard Roy, cofondateur de You2you, cette idée a germé suite à des rencontres avec des directeurs de magasins, "qui avaient beaucoup de mal à lutter, au niveau des tarifs de livraison surtout, avec les gros pureplayers comme Amazon". "Ils avaient pourtant un atout qu'eux n'avaient pas, poursuit-il, à savoir les magasins physiques".

Cette proximité, associée à l'esprit collaboratif de la plateforme, qui a déjà constitué une flotte de 11 500 particuliers livreurs, permettrait au consommateur d'être livré "où il veut quand il veut, 7 jours sur 7, et 24 heures sur 24". Mieux encore, il peut choisir un créneau horaire très précis. Une manière d'après Edouard Roy, de ne plus être livré "au seul moment où on a décidé de sortir pour amener les enfants à la crèche".

Selon le cofondateur de You2you, ce choix de faire appel à des non-professionnels s'expliquerait aussi par l'envie de redorer un peu l'image du livreur, dont il dresse un portrait peu flatteur. Selon lui, le contraste entre l'image du produit et le livreur qui arrive "en jogging, avec le casque téléphone dans l'oreille", qui "se permet de nous tutoyer et arrive en retard", serait problématique.

Le pari de la livraison écologique

Ces nouveaux services de livraison semblent en tout cas séduire. Stuart, après seulement quelques mois d'existence, a déjà fait l'objet d'une levée de fonds de 22 millions d'euros.

Benjamin Chemla, l'un de ses fondateurs, insiste non seulement sur la rapidité et la flexibilité de la livraison qu'il propose, mais aussi sur l'aspect écologique de cette dernière. Il estime que les livreurs ont trop longtemps privilégié le transport en véhicule motorisé, alors que celui-ci était parfois "tout à fait absurde". "De grandes enseignes proposent de vous livrer vos courses en quatre heures en camion, déplore-t-il. En vélo, on fait la même chose en une heure".

D'après Jérôme Benoît, ces startups auraient également bien pris conscience  du poids de cet argument auprès des consommateurs. "Ce que cherchent les clients c'est avant tout un service économique. Puis ils vont chercher la qualité du produit. Enfin, interviennent d'autres arguments comme l'écologie. Le fait que cela arrive en troisième position ne signifie pas que ce n'est pas important", nuance Jérôme Benoît. Lui constate même une véritable "prise de conscience envrionnementale", boostée, entre autres, par la COP21.

Une approche sectorialisée

Si ces nouvelles préoccupations sont devenues déterminantes, Jérôme Benoît admet pour autant se demander si certaines émanent directement des clients, ou si ce ne sont pas plutôt "tous ces nouveaux services qui créent des besoins".

Benjamin Chemla ne cache d'ailleurs pas qu'il en va de même pour les entreprises. "Pour des secteurs comme la livraison de repas, la demande est venue d'elles directement, concède le cofondateur de Stuart. Mais pour d'autres, comme les fleurs, c'est nous qui les avons sollicités en premier lieu".

Local, mais encore loin des campagnes

Cela n'empêche pas sa startup de travailler avec déjà une centaine d'entreprises. Benjamin Chemla espère bien en séduire d'autres dans les années à venir, mais ce, uniquement dans les grandes villes. Il faut, selon lui, des zones d'une densité suffisante pour rester compétitif. Un avis qu'est loin de partager le cofondateur de You2you, qui lance déjà ses premiers tests pilotes en zones rurales. La livraison locale à la campagne ne devrait à priori ne poser "aucun problème".