« L’homme de 150 ans est déjà là », prophétise Uwe Diegel, spécialiste de la santé connectée, cofondateur de la société Healthworks France et ex CEO chez iHealth. Pour l’expert, les avancées dans le domaine de la génomique et de la robotique vont révolutionner la santé, qui sera avant tout prédictive : « Si aujourd’hui, on déchiffre l’ADN, demain on l’exploitera au nom de la vie. L’introduction de la robotique dans le corps humain préviendra les maladies avant qu’elles n’apparaissent. Les nanotechnologies permettront par exemple de nettoyer les artères comme on débouche aujourd’hui des canalisations. Ce protocole est actuellement expérimenté sur des animaux. »

La fin du cancer

Un point de vue que partage Laurent Audoly, directeur innovation chez Pierre Fabre pour lequel « d’ici 2050, le cancer sera traité ». De maladie mortelle, le cancer deviendrait une maladie chronique. Une avancée considérable quand on sait qu’actuellement dans le monde, une personne sur deux est confrontée au cancer soit personnellement, soit par un de ses proches et que seule la moitié en guérissent. La clé de ce progrès sera à la fois technologique et culturelle pour le directeur de la R&D du groupe pharmaceutique :

« L’open-source et le cloud sont de formidables outils pour partager nos connaissances entre chercheurs du monde entier, mais il faut lever les barrières et casser les silos car encore aujourd’hui, les chercheurs bio-médicaux restent dans leur tour d’ivoire »

Laurent Audoly plaide à l’inverse pour un maillage étroit et une mise en commun des compétences entre les innovateurs en pharmacologie et en biotechnologies, les médecins, les patients, et les chercheurs.

Thérapie génique et bioprinting

La médecine personnalisée et de précision, qui commence à émerger dans les pratiques médicales, est pleine de promesses. À l’instar, par exemple, des thérapies géniques qui permettraient, via une analyse du génome d’un patient, de développer un médicament sur-mesure et totalement adaptée à sa pathologie.

Les technologies d’impression 3D ouvrent, par ailleurs, de nouvelles pistes en matière de prothèse et de greffe/transplantation d’organes : « Un foie a été reconstruit à partir de cellules souches en Israël et un cœur en Russie », donne en exemple Uwe Diegel. D’ici 2030, la transplantation d’organe bio-imprimés sur les hommes sera possible. La recherche avance à grands pas : en novembre dernier, la société russe 3D Bioprinting Solutions est parvenue à reproduire une thyroïde et à l’implanter dans une souris. Selon le laboratoire américain Organovo, qui travaille sur la fabrication de tissus de foie humain par impression 3D, la bio-impression de tissus hépatiques permettra d’offrir une alternative aux transplantations et de pallier le problème mondial du manque de donneurs.

Tous centenaires

Avec ces technologies, l’Homme augmenté tente un pari jusque-là impossible : tuer la mort.

« D’ici 30 à 40 ans, il sera quasi impossible de mourir de mort naturelle »

Uwe Diegel

Dans l’intervalle toutefois, d’autres pathologies et défis médicaux surgiront, au premier rang desquels les maladies environnementales, celles liées aux modes de vie alimentaires (« Plus de personnes sont mortes en 2016 d’obésité que de pauvreté »), mais aussi et surtout neuro-dégénératives du type Alzheimer ou Parkinson.

« On ne peut pas aujourd’hui imprimer le cerveau. Si aujourd’hui, la planète compte 450 000 centenaires, d’ici 2030 elle en dénombrera plus de 30 millions. Et ce, dans un monde fini qui ne pourra pas accueillir plus de 30 milliards d’être humains »

Loin d’évacuer la question du vivre-ensemble, ce futur transhumaniste va la reformuler de manière radicale : « Quelles nouvelles discriminations verront le jour, intergénérationnelles ou entre les peuples ?  Accompagnera-t-on nos aînés ou déciderons-nous d’éteindre la grand-mère ? », conclut de manière provocatrice Uwe Diegel.

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