Pour HSBC, travailler avec les startups est une décision clé. Le groupe doit prouver sa valeur ajoutée et répondre aux nouvelles attentes de ses clients, au risque de ne devenir qu’une simple plateforme d'agrégation. Rencontre avec Sébastien Guillo, Directeur de la Stratégie de HSBC France et Christophe Martins, Directeur Marketing & Communication chez Linxo, plateforme online de gestion des comptes bancaires.

Pour une grande organisation comme HSBC, la transformation numérique influe à tous les niveaux. Elle implique une réactivité accrue, que ce soit en interne sur la question des process et en externe dans le déploiement de services à destination de ses clients. Et bientôt, la réforme européenne des services de paiement (DSP2) fera définitivement entrer les banques dans l'ère de l'open-banking, les contraignant à ouvrir leurs données à tous les nouveaux acteurs de la Fintech.

Se remettre continuellement en cause pour répondre aux besoins de ses clients

Chez HSBC, il existe trois formes de collaboration avec les startups. La première ? Celle d’une relation client-fournisseur. Alors que les startups de la fintech se concentraient au départ sur une offre grand public, nombreuses d’entre elles développent maintenant des services à destination des banques. Ces partenariats apportent au groupe HSBC des solutions logicielles ou technologiques qui vont lui permettre d’aller beaucoup plus vite que s’il les développait lui- même.

 Sur certaines briques technologiques que nous n'avons pas en interne et qui prendraient trop de temps à se concrétiser, la Fintech nous donne de l'agilité et un délai de mise sur le marché beaucoup plus court sur de nouveaux services  

Sébastien Guillo, Directeur de la Stratégie de HSBC France

La banque britannique a par exemple collaboré avec Linxo qui lui a proposé une version sur mesure de son service de gestion de finances personnelles : HSBC Personal Economy. L’application propose notamment un agrégateur de comptes bancaires permettant aux clients multi-bancaires de mieux gérer leur budget. “Pour HSBC, les plateformes d'agrégation représentaient un potentiel risque de désintermédiation. Pour répondre à cette menace tout en délivrant un service supplémentaire à nos clients, nous avons donc décidé de travailler avec Linxo pour offrir ce service”, explique Sébastien Guillo. Dans cette relation, Linxo apporte son expertise sur l’expérience utilisateur, l’innovation, l’agilité et la flexibilité tandis que HSBC permet de proposer la technologie de la startup à une base de clients importante et qui est demandeuse de ce type de service.

Pour Christophe Martins, Directeur Marketing & Communication chez Linxo, on pourra dire qu’une banque aura réussi sa transition numérique quand elle aura compris qu’il ne s’agit pas d’un cap à passer mais d’un voyage permanent : “c’est le principe même du numérique que de se remettre continuellement en cause pour répondre au mieux aux besoins des clients : c’est ce défi auquel tout acteur, banque ou Fintech, doit répondre”.

En repartant des besoins et des frustrations des utilisateurs, les startups remettent au centre du débat l’importance de l'expérience client

Christophe Martins, Directeur Marketing & Communication chez Linxo

Deuxième forme de collaboration pour HSBC : la prise de participation dans des startups avec lesquelles la banque pense avoir des synergies de travail et un avenir dans le moyen terme. Pour cela, elle s’est dotée d’une branche de capital-risque, HSBC Strategic Investment, avec une enveloppe de 200 millions dont 50 millions de dollars ont déjà été investis dans plusieurs startups parmi lesquelles figurent Kyriba, spécialisée dans les solutions de gestion de trésorerie dans le cloud, CustomerMatrix, spécialiste de l'intelligence cognitive ou encore Tradeshift, une plateforme de cloud évolutive qui met en relation les acheteurs professionnels et les fournisseurs.

Enfin, HSBC collabore également avec des startups via des accélérateurs. Dans ce cadre, le groupe ne dispose pas de ses propres programmes mais soutient trois structures basées à Londres, Sydney et Hong Kong. Cela permet au groupe d'avoir accès à un solide écosystème de startups pour dénicher de nouveaux talents, de nouvelles idées et ce, dans des secteurs qui ne sont pas toujours liés à la finance.

Une culture interne favorable à l'innovation

“Pour la culture de l'entreprise, ces investissements sont aussi un vecteur d'acculturation, souligne Sébastien Guillo. Cette forme de collaboration représente un cercle vertueux pour les collaborateurs : les équipes en interne gagnent en agilité au contact de ces startups et identifient de nouvelles pistes de collaboration en continu”. D’après Sébastien Guillo, il y a un véritable sentiment de fierté en interne dans le fait d’appartenir à une entreprise ouverte sur l’innovation, démontrant ainsi sa capacité à travailler et à évoluer vite.

Les startups apportent aussi aux collaborateurs de l’entreprise une prise de conscience sur de nouvelles façons de travailler. Ils font face à de nouveaux challenges et deviennent de plus en plus agiles dans leur manière d’appréhender leur travail.

Le risque de plateformisation des banques

Dans la banque, l’idée d’un risque de plateformisation n’est pas nouvelle, elle a émergé dès le début du mouvement Fintech. On a alors commencé à dire que la banque était menacée, que son rôle allait se limiter à celui d’un opérateur de systèmes et que les nouveaux acteurs allaient prendre l’intégralité de la distribution de ses clients. Pour Sébastien Guillo, la banque ne sera pas et ne doit pas devenir qu’une plateforme : “il y a un véritable danger à ce qu’elle le devienne car elle a une vraie utilité dans l’économie. Pourquoi ? Parce qu’elle a un rôle clé dans la transformation des besoins à court terme en prêts à long terme”.

Pour lui, on ne changera pas le modèle de la banque en profondeur car sa mission première n’est pas remise en cause par l’innovation, qu’elle investit aujourd’hui massivement, notamment grâce à ses collaborations.