Il y a 25 ans, internet n’existait pas. Pour beaucoup d’entre nous, apprendre se résumait à aller à l’école. S’asseoir, écouter, noter, réciter. Et recommencer, 5 jours par semaine, pendant au moins dix ans. Répétition d’un modèle rodé depuis des siècles, inébranlable. Aujourd’hui, alors que les élèves ont radicalement changé, le cadre de l’éducation est toujours le même. Les nouvelles technologies sont devenues une seconde nature, une extension des élèves. Pourtant, l’écart entre leurs habitudes et les programmes pédagogiques proposés n’a jamais été aussi grand. L’école doit reprendre son rôle en main et les préparer à un avenir encore inconnu, car pour 65% d’entre eux, le métier qu’ils exerceront demain n’existe pas encore.

L’école n’a jamais été aussi critiquée. Parents, enfants, enseignants, politiques, tous s’interrogent : continuera-t-elle à creuser le fossé en fermant les yeux sur cet univers numérique, ou décidera-t-elle, enfin, de construire des ponts entre les méthodes traditionnelles et les nouveaux usages ? D’après Ostiane Mathon, enseignante et fondatrice du LabLearn, laboratoire de conseil et de formation spécialisé dans la pédagogie et le design learning, “nous avons à rejoindre les jeunes là où ils sont, de manière à leur faire découvrir d'où ils viennent. Ainsi, modernité, innovation et tradition forment un magnifique trio. Il ne s'agit pas de faire du numérique le nouveau totem pédagogique, il s'agit de dynamiser l'apprentissage et de relier l'école à la vie réelle”. Pour tous, l’école est naturellement l’acteur rêvé pour mener à bien ce changement. L’un des principaux enjeux sera de modifier les modes de pensée et de s’adapter à la complexité et à la rapidité du monde dans lequel nous vivons.

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Finlande, Danemark, Royaume-Uni…  Beaucoup de pays de l’OCDE ont, eux, déjà compris combien il était primordial d’équiper en outils numériques les écoles et de former autrement les enseignants pour avancer tous ensemble dans la bonne direction. Une dynamique difficile à mettre en place en France, où les contraintes s’accumulent, où les débats priment sur l’action et où les retards sont pointés du doigt. Pourtant, quel parent ne souhaite pas la meilleure des écoles pour son enfant ? Une école dans laquelle l’enfant s’élève intellectuellement, humainement et technologiquement. Une école où le professeur aspire avant tout à transmettre l’envie d’apprendre. Une école qui stimule la curiosité et la créativité. Mais quel rôle doit véritablement jouer le numérique dans cette transformation ? Le système éducatif français fera-t-il le choix de la modernité ? Quels outils mettre à disposition des enseignants ?

Les nouvelles technologies sur les bancs de l’école

Lentement mais sûrement, les nouvelles technologies font leur entrée dans les salles de classe. Le tableau numérique interactif (TNI) remplace le tableau noir d’antan ; la tablette tactile fait de l’ombre aux cahiers à spirales et les vidéos interactives aux bons vieux manuels de français et de mathématiques. Et le cours d’anglais itself se fait … en Angleterre grâce à la visioconférence. L’école est sur le point de rattraper le temps perdu et de devenir, enfin, numérique. Pour beaucoup, c’est la promesse d’une école meilleure. C’est dans cette optique qu’en avril 2014, la ministre de l’Éducation a créé la Direction du Numérique Éducatif. À sa tête, Madame Becchetti-Bizot, appelée à mettre en place des synergies entre les différents acteurs de l’éducation numérique et contribuer ainsi à ce que l’école entre, enfin, dans le 21ème siècle. Et qu’en mai 2015, le “Plan Numérique pour l'Éducation” a été lancé par François Hollande. En 2018, l’entrée au collège devrait se faire tablette en main. Pour Najat Vallaud-Belkacem, il est important de préciser que ce sera aussi “un plan de formation des enseignements, de création de ressources numériques nouvelles, d’équipement des élèves et enfin d’intégration de la donne numérique dans toutes les disciplines et à tous les âges”.

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Mais plusieurs villes n’ont pas attendu le gouvernement pour passer à l’action. Dans les Yvelines, cela fait maintenant plus de dix ans que la commune d’Elancourt fait office de ville pilote et a lancé le tout premier programme d’école numérique en France : tablettes numériques, pédagogie individualisée, apprentissage du code sur robots, sciences collaboratives ou encore cours d’anglais en visio-conférences. Un projet initié par le maire de la ville, Jean-Michel Fourgous, qui a dû investir 2 millions d’euros dans cette transformation. Le bilan de cette révolution locale ? “Des enfants plus concentrés, plus impliqués et motivés”, se félicite le maire. Même bilan en Corrèze, premier département de France à avoir équipé tous ses élèves de tablettes numériques en 2011.

Autre tendance technologique intéressante : la gamification, ou ludification de l’école. Jeux éducatifs, outils de programmation ludiques, applications à développer sous forme de challenges … autant de dispositifs inspirés des jeux vidéo qui se font une place de choix auprès des élèves. Le système de scores, de récompenses et de niveaux de progression valorise l’élève dans son apprentissage au quotidien et remet le plaisir d’apprendre au coeur de l’éducation. La science aurait même approuvé l’efficacité de cette nouvelle pratique à l’école. Selon une étude américaine rapportée par Christopher Pappas, fondateur du réseau eLearning Industry, l’e-learning gamifié jouerait un rôle positif sur le corps et l’esprit, à n’importe quel âge,  et ce grâce à la production d’endorphines que cela provoque ! Au programme : détente, excitation, implication, attention, engagement, enthousiasme et meilleure mémorisation des informations. On peut donc jouer en apprenant et apprendre en jouant... pourquoi s’en priver ?

La classe numérique est bien à l’ordre du jour. L’éducation pour tous, partout et tout le temps. L’école n’est plus le seul maître de ses contenus et il va falloir s’y faire. La disponibilité de l’information et la connaissance font de nous tous des apprenants mais aussi des enseignants potentiels. Enfants compris. Nous nous dirigeons tout droit vers une classe plus numérique, mais aussi plus collaborative, dans laquelle le rôle de l’enseignant devra radicalement changer.

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De nouvelles pédagogies au coeur de l’école de demain

Si l’école doit impérativement intégrer le numérique dans ses pratiques, elle ne peut omettre le rôle central des enseignants. Comme le précise Ostiane Mathon, “il incombe à l'enseignant de rester vigilant à un double niveau. D'une part, ne jamais cesser de questionner la dimension pédagogique de son travail et d'autre part de s'adosser aux objets technologiques qui serviront au mieux l'apprentissage visé. Le tableau noir peut souvent très bien suffire. Le "device" offrira souvent une pluralité de nouvelles fonctionnalités. Enseigner c'est avant tout choisir... choisir le plus efficace, le plus adapté, le plus aidant pour l'élève comme pour le professeur ! Cela requiert une veille et une adaptation permanente”.  Le métier de professeur n’est donc pas menacé, il fait simplement face à la plus grande mutation qu’il n’ait jamais connu. La classe de demain sera une communauté d’apprentissage : connectée, créative et collaborative.

Enseigner c'est avant tout choisir... choisir le plus efficace, le plus adapté, le plus aidant pour l'élève comme pour le professeur ! Cela requiert une veille et une adaptation permanente

Ostiane Mathon

L’école doit donc s’adapter et réfléchir aux nouvelles pédagogies à mettre en place. Dans certains pays, la classe inversée est LA méthode d’enseignement innovante adaptée aux nouvelles générations. Le principe : découvrir les leçons théoriques chez soi et profiter des moments en classe pour la mise en pratique des connaissances en petits groupes. Cette pédagogie inversée a notamment été au coeur du succès mondial qu’a connu la Khan Academy (6 millions d’utilisateurs) développée par Salman Khan, et qui propose d’utiliser des vidéos éducatives en ligne pour “inverser les classes” : le cours magistral à la maison et les devoirs en classe. Cela invite l’élève à se responsabiliser, à apprendre en faisant et à tenir un rôle actif dans sa propre éducation et celle de ses camarades.

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Certains vont même plus loin et abolissent totalement l’idée d’enseigner plusieurs matières de façon verticale. C’est le cas de la Finlande, qui propose l’un des meilleurs systèmes éducatifs à travers le monde et qui a décidé de révolutionner le système scolaire en ne délivrant plus les cours par matières, mais par thèmes. Par exemple, un cours d’Histoire-géographie sur l’empire romain se verra enrichi de notions d’économie, de littérature ou encore de politique. Place à la transversalité ! Et cette ouverture vers une école moderne ne semble pas avoir de limite pour le pays, qui vient d’ouvrir les portes de “l’école du futur”, l’école Saunalahti, dans la ville d’Espoo. Une école faite de technologie, d’écologie, d’espaces ouverts et accessibles à tous en dehors des heures de classe, de propositions sportives et culturelles, d’un corps enseignant hyper formé et connecté et d’élèves heureux, libres et responsables. Un vrai espace de coworking pour startupers en culotte courte !

Autre grand nom des nouvelles pensées pédagogiques : Céline Alvarez.  L’ex-institutrice le martèle depuis des années : “la révolution de l’éducation est en marche”. Elle sensibilise, séduit, énerve et divise. Sa mission ? Changer l’école de l’intérieur, avec de nouveaux mécanismes d’apprentissage basés sur les sciences cognitives. Elle souhaite faire de nos écoles des lieux plus adaptés à nos sociétés actuelles, où l’apprentissage est personnalisé et répond à quatre principes fondamentaux pour accompagner les élèves à l’école : l’attention, l’engagement actif, le retour d’information immédiat et la consolidation.

À terme, toutes ces nouvelles méthodes d’apprentissage visent un même objectif : remplacer l’éducation traditionnelle par une éducation plus personnalisée. Industrialiser la personnalisation de l’éducation pour améliorer les performances des étudiants dans un environnement épanouissant, c’est le pari de Knewton, startup américaine qui a développé une technologie d’adaptative learning en s’appuyant sur l’analyse des datas générées par les élèves. Ainsi, le contenu de chaque cours est adapté en fonction des résultats et spécificités de chaque élève ou groupe d’élèves. Au fil des jours, des milliers de données sont analysées - temps passé sur un questionnaire, déplacements de la souris sur l’écran, réponses correctes et incorrectes etc. - et permettent de proposer à l’élève un parcours totalement personnalisé. La plateforme apprend à connaître l’enfant et le fait progresser en fonction de ses besoins.

Avec tous ces bouleversements, l’école que connaîtront nos enfants et petits-enfants n’aura probablement rien à voir avec la nôtre. Les nouvelles technologies sont en train de redéfinir une classe qui semblait jusqu’à présent figée dans le temps. S’il est utilisé à bon escient, le numérique sera un formidable outil pour permettre l’éclosion des talents et des personnalités, que ce soient ceux et celles des élèves ou des professeurs.

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Envie d'en savoir plus sur l'éducation du futur ? Rendez-vous au prochain MaddyTalk dédié à ce thème, le 4 octobre 2017 chez Google.