Un peu plus d'un an après son entrée dans le réseau French Tech, l'île de la Réunion commence à voir les premières retombées de sa labellisation en e-santé (« health tech »). Une vingtaine de startups sont accompagnées sur l'île et commencent à faire parler d'elles dans l'Hexagone.

Alors que doit se tenir dans deux semaines le forum NxSE, deuxième édition, quel bilan la Réunion tire-t-elle de sa labellisation French Tech intervenue en juillet 2016 ? 19 startups accompagnées, un partenariat noué avec Ocean Tech, l'écosystème French Tech du Pays Basque, et un autre avec la French Tech de Cape Town en Afrique du Sud. De quoi enfin positionner l'île de la Réunion sur la carte mondiale de l'innovation et rompre son isolement insulaire.

« Cette entrée dans le réseau French Tech a permis à La Réunion de se faire identifier au niveau national et international comme un territoire d'innovation. French Tech a apporté une lisibilité à notre territoire, sur ses compétences et ses capacités à innover. Depuis plus d'un an, nous collaborons avec le réseau des 24 territoires identifiés “health tech”. En juin, nous avons co-organisé avec le pôle de compétitivité Cap Digital à Paris l'événement Futur en Seine. Une startup réunionnaise, Logipren (qui développe un service d'assistance à la prescription médicale pour les nourrissons), a pu « pitcher » devant un parterre d'investisseurs », explique Elodie Royer, référente French Tech Réunion.

la reunion french tech

Selon les termes de Philippe Arnaud, président de l'association Digital Réunion (affiliée au Syntec Numérique, elle regroupe une centaine d’entreprises opérant dans le secteur du digital), le label French Tech a été « une réelle accélération et un passeport de reconnaissance ». Preuve que même à 10 000 kilomètres de la métropole, au milieu de l'océan Indien et sur un territoire de 2500km2, toutes les ambitions sont possibles.  

La mise en réseau de l'écosystème réunionnais s'accélère en métropole, mais aussi dans la zone océan Indien. La semaine dernière, quatre startups réunionnaises ont participé à l'événement Ticket Santé à Paris. Trois autres sont invitées au premier « boot camp » organisé par la Ocean Tech, début octobre, entre Saint-Jean-de-Luz et Hossegor. « Lors de la première édition de NxSE, en novembre 2016, l'écosystème réunionnais a pu rencontrer ceux de Cape Town et d'Abidjan (labellisés en 2016 également). Cela a débouché sur un partenariat avec Cape Town. Des startups réunionnaises sont invitées à la conférence Africarena qui aura lieu en novembre en Afrique du Sud. Elles pourront « pitcher » devant des fonds d'investissements africains d'envergure. Cela sera pour elles à la fois une opportunité d'ouverture de marché et de financement », souligne Philippe Arnaud.

Maintenant clairement identifiée dans le réseau French Tech, la Réunion compte entamer la deuxième étape de son plan d'action : structurer une filière complète du digital sur l'île, depuis la mise en place de formations jusqu'à la création de startups. « Les acteurs existent, mais il faut les fédérer », reconnaît Elodie Royer.  Mieux, l'île ambitionne désormais d'être reconnue dans de nouvelles thématiques comme le tourisme ou l'agriculture. « Nous sommes entrés par la porte étroite de la thématique e-santé. Notre territoire peut réaliser des connexions avec d'autres thèmes, fédérer d'autres filières et générer des startups ailleurs », annonce Philippe Arnaud. Voilà qui est dit.

Les Pépites de La Réunion French Tech

Logipren

Logipren développe depuis 2011 une plateforme médicale communautaire avec pour élément central un logiciel d’accompagnement à la prescription de médicaments et la nutrition en néonatologie.

L’entreprise est née de la volonté de réduire le risque d’erreur inhérent aux prescriptions manuelles. « Toutes les six prescriptions manuelles en néonatologie, il y a une erreur médicamenteuse », explique Béatrice Gouyon directrice scientifique de Logipren.  L’activité commerciale a démarrée en 2016, avec un premier chiffre d’affaires de 200 000 euros qui passera à 350 000 euros en 2017. Sur 68 services de réanimation néonatale en France, 30 sont déjà équipés de Logipren. Prochaine objectif : le développement à l’international avec des premières présentations de la solution prévues prochainement  dans des hôpitaux en Allemagne, en Espagne et en Afrique du sud.

Oscadi

Oscadi autre pépite réunionnaise et elle spécialisée dans les systèmes d’imagerie à ultrasons. Elle commercialise Oscult, son échographe portable léger, intuitif et connecté, né de l’ambition de révolutionner le diagnostic médical. Olivier Sautron a créé Oscadi « pour rendre l’échographie accessible à bas coût à tous les praticiens médicaux et notamment les non spécialistes de l’imagerie médicale. La désertification médicale, l’engorgement des urgences, le manque de spécialistes ou le retard technologique de certains pays invitent au développement de la télémédecine et de technologies comme Oscult pour assurer la continuité des services de santé, l’amélioration de la condition du patient et la sécurisation du diagnostic. Oscadi est également la seule société agrée constructeur de matériel médical pour Ipad et ce sont déjà quelques 250 intentions de commandes qui ont été enregistrées via le site internet de l’entreprise, principalement en provenance d’urgentistes, de spécialistes en imagerie et de vétérinaires. Une levée de fond est en cours pour financer son développement. 

Torskal

Torskal est une Jeune Entreprise Innovante de nanomédecine, fondée en 2015 par Anne-Laure Morel. La société conçoit des molécules nanothéranostiques (nanoparticules à visée diagnostique et thérapeutique) pour l’oncologie par l’exploitation de bioressources notamment issues de l’île de La Réunion. Ces outils visent à offrir une alternative ou un complément aux traitements conventionnels contre le cancer. L’entreprise a été lauréate du concours Ilab 2015 de BPI France en catégorie émergence, et a reçu le prix « coup de cœur du jury » du concours innovation Outremer de l’association Outremer Network. Côté financement c’est sous forme de crédit impôt recherche, de soutien de la Région Réunion et du FEDER (Fonds européen de développement régional) qu’Anne Laure Morel a démarré le projet en 2015. En juillet 2017, une première rencontre a eu lieu avec des investisseurs privés. Torskal espère lever jusqu’à 5 millions d’euros.

Runware

DiabéTIC est un ambitieux projet réunionnais sélectionné dans le cadre des Investissements d'Avenir, suivi par le Ministère de la Santé, réunissant industriels, hôpitaux, scientifiques et universitaires autour d'une solution unique d'accompagnement des patients diabétiques de type II – 3 millions de patients en France, 143 millions dans le monde –, projet labellisé par le pôle de compétitivité Qualitropic. C’est en 2013 que né DiabeTIC avec l'idée de connecter un glucomètre à un smartphone. Poussant le concept plus loin, Runware décide de créer un kit pour patients diabétiques regroupant quatre accessoires connectés : un tensiomètre, un glucomètre, un capteur d'activité physique et un pèse-aliments. Le projet trouve son nom, ce sera DiabéKIT. La startup remporte 500 000 euros de subventions dans le cadre des PAI (programme d'investissements d'avenir). Le Diabékit est relié à un portail web qui stocke les données, les rendant accessibles à tous les professionnels de santé qui suivent le patient.

StoryEnjoy

La e-santé c’est aussi les applications bien être. En voici une pleine de poésie qui a rejoint les rangs de la e-santé réunionnaise : StoryEnjoy permet aux grands-parents du monde entier de choisir une histoire numérique dans une bibliothèque dédiée, et de se filmer en la racontant. Les petits-enfants reçoivent la vidéo couplée à l'histoire illustrée. Ils la verront sur une tablette aussi souvent qu'ils le voudront ! StoryEnjoy a vu le jour en 2015 après avoir remporté le premier prix de la startups week-end Réunion. La startup a été intégrée au programme de pré-accélération d’Orange Fab France, en Mai 2017, puis sélectionnée pour  participer prochainement à l’événement « international Start Up » de la Ocean Tech, à Saint-Jean de Luz.