Portfolio par Maddyness, avec SNCF
23 avril 2018
23 avril 2018
Temps de lecture : 6 minutes
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SNCF : « Nous sommes un terrain de jeu inépuisable pour les startups »

Plus de 30 000 km de voies, 30 000 bâtiments industriels et tertiaires, 17 000 trains par jour et une présence dans 120 pays… Depuis plusieurs années, la SNCF offre aux startups un champ d’expérimentation impressionnant. De quoi préparer au mieux ce qui devrait représenter la mobilité de demain. Maddyness a fait le point sur la stratégie et la vision du Groupe avec David Leborgne, son CDO.
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Comment la mobilité a-t-elle évolué ces dernières années ? Pourquoi ? Quelles sont les principales avancées, et quels sont encore les principaux freins ?

Nous assistons, depuis plusieurs années, à une importante évolution de la mobilité. Aujourd’hui, 60% des Français ne travaillent pas dans la commune dans laquelle ils résident. Les territoires se dilatent. Cela crée une désynchronisation des rythmes de vie : les méthodes de travail (télétravail, etc.) changent, sont plus variées, et les salariés ont globalement plus de temps libre.

Également, la recomposition familiale, plus commune aujourd’hui, a un véritable impact sur la mobilité. Les couples éclatés se recomposent et ne vivent pas toujours dans les mêmes villes ou villages. En découle une hypermobilité : chacun doit se déplacer pour aller travailler, mais aussi pour se rendre à ses loisirs, ou rejoindre sa famille.

Ce qui change la donne, aussi, c’est l’hyperconnexion. C’est une exigence de vitesse et une course à la performance qui valorise l’immédiateté, le temps réel, et qui crée une intolérance aux accrocs, temps d’attente, retards, qui vont désorganiser les emplois du temps qui sont de plus en plus contraints.

Enfin, la crise du pouvoir d’achat, le besoin impérieux de se faciliter la vie et de prendre du temps pour soi ont de véritables impacts sur la mobilité. Chacun veut voyager au juste coût, d’un point A à un point B, et cela le plus facilement possible.

En résonance à ces évolutions, de quelle manière le Groupe SNCF a-t-il fait évoluer son offre afin de correspondre au mieux aux attentes des voyageurs ?

SNCF a fait évoluer son portfolio pour répondre aux exigences de mobilité et de multimodalité de ses voyageurs. Le Groupe compte désormais parmi ses services OuiGo, une offre de TGV à bas coût lancée en 2013, mais aussi Ouibus (anciennement iDBUS), un réseau de lignes d'autocars longue distance en France et en Europe, IDvroom, une plateforme de covoiturage dédiée aux petits trajets, TGVmax, un abonnement permettant aux 16-27 ans de voyager de manière illimitée sur les TGV et Intercités, ou encore Ouicar, un service de location de voiture entre particuliers dans lequel le Groupe a pris une part majoritaire en 2015.

Précurseur en 2001 avec Voyages-sncf.com (oui.sncf), aujourd’hui toutes les activités du Groupe SNCF comptent ont des équipes digitales intégrées. Notre idée, c’est d’apporter aux voyageurs une expérience optimale sur mobile, via l’application SNCF notamment, qui permet d’apporter des solutions avec la promesse d’un porte à porte. Pour le moment, l’offre est convaincante sur l’aspect urbain, et nous l’enrichissons actuellement de nouveaux services de mobilité pour offrir la même promesse en mode péri-urbain et rural. Cette application compte déjà plus de 9 millions de téléchargements et 28 millions de sessions par mois.

Enfin, depuis 2015, nous avons créé un socle digital avec des expertises sur le big data, l’IoT, l’open innovation, l’open data… Autant d’équipes qui accompagnent l’ensemble des métiers d’entreprise là ou le digital permet de faire évoluer et de moderniser nos services. Dans 95% des cas, le digital répond parfaitement. L’IoT, par exemple, est un véritable vecteur de performance pour nous. Dans les opérations industrielles qui concernent  30 000 kilomètres de voies, l’IoT nous permettra de faire de la maintenance prédictive.

Le Groupe SNCF s’adosse-t-il à d’autres acteurs de la mobilité, par exemple des startups, afin d’enrichir son offre ? En quoi est-ce aujourd’hui nécessaire ? Et avez-vous quelques exemples à donner ?

Depuis 2010, SNCF entretient une collaboration étroite avec les startups pour accélérer sa transformation numérique. Cela nous paraissait évident car, aussi gros soit-on, nous ne pouvons pas tout faire tout seul, et surtout de manière agile. Les startups nous apportent des compétences nouvelles, des expertises et des briques technologiques indispensables à notre évolution. De notre côté, nous sommes un terrain de jeu inépuisable pour les jeunes pousses, en leur permettant de tester leurs solutions sur notre matériel, auprès de notre clientèle, de nos salariés….

De nombreuses  startups nous accompagnent autour de quatre thématiques : le client, les collaborateurs, les opérations industrielles et la sécurité. Ouicar, avec son service de location de véhicules entre particuliers, nous accompagne par exemple sur l’expérience client. Ermeo, de son côté, a doté SNCF d’une solution logicielle d’optimisation des opérations de maintenance d’équipements industriels. Cela évite à nos collaborateurs, notamment, d’avoir à rechercher et imprimer en amont l’ensemble de la documentation technique (guide de dépannage, plans manuels, procédures, modes opératoires, formulaires, etc.) et ressaisir manuellement l’ensemble des relevés.

Nous avons également un fonds, doté de 30 millions d’euros, pour investir dans les jeunes pousses prometteuses. Lancé en 2015 et baptisé SNCF Digital Ventures, celui-ci investit entre 500 000 et 4 millions d’euros dans des startups axées sur les mobilités partagées, l’internet des objets, le big data et la data analytics.

Notre objectif est de devenir une " data company ", avec des outils et des services parfaitement adaptés aux besoins de chacun. Les startups nous permettent de venir capter l’innovation rapidement, la tester, l’intégrer, et pour les plus prometteuses d’entre elles, investir.

Quels sont les grandes lignes directrices de la stratégie du Groupe SNCF pour les prochaines années ?

À court terme, nous souhaitons développer notre assistant de personnel de mobilité pour tenir le défi du MaaS (Mobility as a service). Nous intégrons notamment du machine learning à l’application SNCF afin que les voyageurs qui acceptent d’être géolocalisés puissent profiter de propositions de déplacements contextualisés en fonction des lieux usuels qu’ils fréquentent, l’heure qu’il est, et du trafic. Déjà près de 500 000  voyageurs nous confient leurs données en confiance car nous les utilisons uniquement pour améliorer leur mobilité. Nous construisons, avec ces données et progressivement, cet assistant personnel.

Les gares deviennent également des " City Booster ". Ce sont les hub de toutes les mobilités, nous les transformons pour en faire des lieux de vie, de plus en plus importants, et en particulier en province afin de proposer du service de proximité hors de Paris et emmener de la richesse sur la totalité du territoire. On veut en faire des lieux ou les voyageurs peuvent par exemple naturellement travailler, avec des espaces de coworking, mais aussi y ajouter des crèches, des pressings, des postes, etc. Nous avons un écosystème de partenaires qui viennent naturellement frapper à notre porte.

Nous travaillons enfin autour de plusieurs sujets : l’intégration du NFC afin de permettre à nos voyageurs d’avoir du paiement intégré pour fluidifier les parcours, mais aussi l’arrivée des véhicules autonomes, ou à plus long terme le train super sonic. Nous avons par exemple investi dans Hyperloop One.

Toutes ces innovations technologiques, on les regarde de près car on sait que l’intelligence artificielle va impacter tous les métiers de toutes les industries.