Certains bâtissent des châteaux en Espagne, d'autres préfèrent de petites maisons sans prétention aux fondations bien solides. Si l'équipe derrière Ring Capital devait choisir un lieu de vie, il y a fort à parier qu'elle miserait sur la deuxième option. « Plus de 500 startups sont financées chaque année et ce ne sont pas forcément des licornes, rappelle Geoffroy Bragadir, cofondateur du fonds. Nous ne sommes pas des chasseurs de licornes mais des chasseurs d'entreprises de taille intermédiaire. » Car c'est précisément au moment du « passage à l'échelle » que les startups rencontrent un trou d'air. « Il y a un vide important aujourd'hui sur le segment des PME et des ETI, souligne Nicolas Celier, cofondateur de Ring Capital. Combien de startups ne sont pas financées parce qu'elles n'ont pas de réseau, ne sont pas éligibles au capital-risque et sont rentables parce qu'elles n'ont tout simplement pas le choix ? »

Le tout nouveau fonds - il a été créé en décembre 2017 - s'est donc positionné sur ce segment peu prisé des investisseurs classiques, sans délaisser pour autant l'early stage auquel il réserve 10% des 165 millions d'euros qu'il a sous gestion depuis son deuxième closing, bouclé en début de semaine. Avec des tickets compris entre 5 et 15 millions d'euros, Ring Capital espère redonner leurs lettres de noblesse à ces entreprises matures, qui ne veulent pas se vendre trop tôt. Sa cible privilégiée ? « Les entreprises qui réalisent un chiffre d'affaires de plus de cinq millions d'euros, dont la rentabilité a été prouvée et qui ont la capacité de se projeter à l'international, notamment aux États-Unis. »

Travailler avec des entrepreneurs aguerris

Cette thèse d'investissement permet également à Ring Capital d'éviter un écueil trop souvent passé sous silence par les investisseurs : « les gens qui pensent être entrepreneurs alors qu'ils n'en ont pas les capacités ». Si cela peut s'avérer néfaste pour une entreprise qui se lance, il y a « moins de risques » avec une entreprise plus mature. Mieux, les investisseurs y trouvent « des entrepreneurs avec le cuir plus épais, résilients, résistants parce qu'ils ont davantage d'expérience ».

Pas question pour autant de les laisser croire qu'ils savent tout faire. Pour les aider dans la gestion de leur croissance, Ring Capital a développer un système de mentorat par des business angels, à la fois sur les fonctions support et sur des problématiques métier. « Soulager les entrepreneurs de certaines fonctions support leur laisse du temps pour leur business, milite Geoffroy Bragadir. D'autant que les entreprises matures ont souvent laissé de côté certaines thématiques business pour se concentrer sur ce qu'impliquait leur croissance en interne. » Sur le mode du retour d'expérience, d'entrepreneur à entrepreneur, mentor et mentoré échangent leurs bonnes pratiques. Le second trouve dans le premier une épaule solide sur laquelle s'appuyer et une oreille attentive pour glaner soutien et conseils.

Besoin de personne, envie de tout

S'appuyer sur ce réseau de mentors pour apporter une plus-value aux entrepreneurs qu'il accompagne permet également à Ring Capital de se concentrer sur l'essentiel de son métier. « Nous devons apporter une bonne structure capitalistique à l'entreprise, précise Nicolas Celier. Racheter les parts de fonds historiques, racheter avec LBO, pourquoi pas aider à vendre... Il n'y a pas de schéma linéaire, toutes les situations sont différentes. » Seul prérequis pour le fonds : « être capable de faire tout seul notre vie avec l'entrepreneur ». Comprendre : n'avoir besoin de personne, même si le fonds se laisse la possibilité de coinvestir avec d'autres investisseurs, « capables de remettre au pot si besoin », comme il vient de le faire dans Tiller. Une manière pour Ring Capital de se rendre « imperméable aux séries A, B ou C » parce qu'il a la possibilité « de remettre la main au portefeuille comme de revendre les parts ».

Nous voulons être le fonds qu'on appelle en cas de besoin

Nicolas Celier, cofondateur de Ring Capital

Ce qui demande un peu de temps mais surtout beaucoup d'énergie, Geoffroy Bragadir rappelle ainsi que « c'est un vrai métier d'être investisseur, ça demande du temps et de l'expérience ». « Il faut susciter le désir mais aussi y répondre, continue-t-il. Trouver la bonne distance pour apporter de la valeur sans lourdeur. » Mais, sans rêver de licornes, l'entrepreneur-investisseur garde en tête qu'il oeuvre pour faire émerger de solides succès. Et croit fermement aux belles histoires de ses protégés, qu'il aide à pousser les murs. « La France possède les meilleurs ingénieurs du monde, ce qui fait la différence en matière de technologie. Alors, si on peut développer la meilleure technologie sur un marché plus grand, on rafle tout. »