"Je ne me suis pas levé un matin en me disant que j'allais remplir des camions". Lorsque Paul Guillemin décide de lancer Fretlink en 2015, il est à la tête de sa première startup, IBCorp, une agence digitale qui conçoit et développe des applications SaaS. C'est en répondant à un appel d'offre que celui-ci rencontre un transporteur routier de marchandises qui lui demande de développer un TMS (Transport Management System), un logiciel de gestion de sa flotte de véhicules.
"Au travers de ce projet, je me suis aperçu des problématiques de transparence et du manque d’efficience que rencontrait le secteur. Il y avait bien des solutions mais elles étaient développées sans approche globale et communiquaient mal entre elles, donc ne permettaient pas de résoudre le problème", raconte Paul

Premier point : une équipe solide

Immédiatement, l'entrepreneur décide de s'attaquer à cette nouvelle problématique. Mais comment se lancer dans un tel projet lorsque l'on n'y connait pas grand chose au transport ? En s'entourant des meilleurs, forcément. Paul décidé alors de créer une équipe aux profils complémentaires : un expert du transport afin d'aborder au mieux ce marché et lancer les premières opérations, un directeur technique capable de diriger une équipe de développeurs, et un data-scientist capable de concevoir des modèles d’algorithmes complexes.

Un choix délicat, sans lequel Fretlink n'aurait peut être jamais vu le jour : "C'était loin d'être évident au départ. D'ailleurs, je m'en rends bien compte aujourd’hui. Avoir su réunir - au sein même de son équipe fondatrice - des mondes qui ne s’étaient jamais réellement parlés : elle est là, la véritable force de Fretlink", indique Paul, avant d'ajouter "Au début, on est seul dans sa chambre avec son idée : il faut se demander de quels ingrédients on a besoin pour passer de l'idée à l'entreprise, trouver des profils complémentaires qui sauront porter le projet et le fair grandir".
Fretlink voit le jour, avec comme principal objectif d'aider les transporteurs routiers à sécuriser, piloter et optimiser leur plan de transport. Le marché, estimé à 300 milliards d’euros en Europe, laisse à la jeune pousse un champ d'action immense, malgré une concurrence accrue (Geodis, DB Schenker, XPO ou encore Kuehne + Nagel, mais aussi des marketplaces comme Everoad ou Chronotruck en France). 

Retenir les bons moments, s'inspirer des mauvais

Paul Guillemin et ses cofondateurs commencent alors à développer la solution en boot-strappant,  et à rassembler les premiers transporteurs de leur réseau…avant de démarrer avec leur premier client, fin 2016 : Chanel. "La photo du 1er camion que nous avons mis sur la route restera à jamais gravée dans ma mémoire", se souvient Paul.

Un beau moment, qui sera rapidement suivi d'un autre : une première levée de fonds, réalisée en avril 2017 : "On ne devient pas entrepreneur pour l’argent, loin de là. Mais quand des investisseurs choisissent de croire en son projet, permettent de lui donner vie … c’est une victoire incroyable, d’autant qu’elle est collective. On n'était pas encore très nombreux à l’époque - à peine une quinzaine - mais on était déjà déterminés à réussir", raconte Paul.
Des galères ? Il y en a également eu, bien évidemment. Mais l'entrepreneur préfère s'en servir comme des opportunités de rebond plutôt qu'avoir des regrets : "Il nous en arrive tous les jours ! Et tant mieux ... C’est à travers ses erreurs que l’on comprend les choses, que l’on découvre les spécificités de son marché. Si on en est arrivés là, c’est parce que l’on a appris de nos erreurs. On a beaucoup progressé et c’est ce qui nous permet de faire les bons choix aujourd’hui", explique Paul.

La stratégie avant la croissance... toujours

Du côté des chiffres, Fretlink passe, en un an et demi, de 1 à 300 clients réguliers, et surtout de 7000 à 2 millions d'euros de GMV (volume d'affaires) mensuel. Ses équipes, elles, sont multipliées par six en passant de 10 à 62 collaborateurs.
Une croissance très rapide, que la startup a du accompagner d'une solide stratégie pour garder le contrôle en interne, et en externe : "Lorsque l’on passe en mode exécution, on n'a plus le temps de se poser la moindre question, tout va très vite. Il faut donc avoir déterminé l’ensemble des choix stratégiques au préalable et avoir su les transmettre à sa team", indique Paul, qui rappelle également l'importance de réussir à faire cohabiter, en amont, des profils ultra compétents et très différents "Développeurs, data-scientists, experts du transport, commerciaux… ça n’est pas évident de recruter les A-players de chaque catégorie et de les faire travailler ensemble". 
Pour réussir à faire travailler main dans la main toutes ces personnalités, un seul secret chez Fretlink : l’onboarding et les process : "S’assurer que les nouveaux collaborateurs s’associent aux valeurs de l’entreprise, trouvent rapidement leur place et comprennent leur mission est essentiel pour maîtriser sa croissance", précise Paul, qui recommande de s'appuyer sur des frameworks d’organisation bien connus (OKR, ScoreCards…) pour trouver l'organisation qui convient au mieux à sa startup. "Investissez beaucoup de temps sur ce point : une toute petite différence au départ donnera un écart phénoménal à l’arrivée", conclut-il.