6 juin 2019
6 juin 2019
Temps de lecture : 4 minutes
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Pour grandir, les e-commerçants doivent-ils devenir des retailers « comme les autres » ?

S’ils s’accordent à dire que ce n’est pas là qu’ils font la plus importante partie de leur chiffre d’affaires, les entrepreneurs de la mode qui ont sauté le pas du physique constatent le fort levier d’attraction marketing de leur offre « brick and mortar ».
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La mode sur internet a le vent en poupe. De nombreuses marques de vêtements, de chaussures ou encore d’accessoires y voient le jour chaque mois. Proposant bien souvent une " expérience client " particulièrement léchée, des prix attractifs (rendus possibles par la suppression des intermédiaires classiques du retail) et, pour les pure-players qui veulent imposer une marque forte, un positionnement premium, les e-commerçants de la mode peuvent toutefois avoir du mal à se distinguer de leurs concurrents. Les offres sont multiples et les moyens d’acquisition de clientèle se limitent bien souvent aux réseaux sociaux. Dès lors, pour donner confiance aux consommateurs, se démarquer et augmenter leur visibilité, certains font le choix de se lancer sur une offre brick and mortar complémentaire.

C’est le cas de la marque LePantalon. Olivier Gaudéchoux, le fondateur, et Thibaud Godillot, son associé, ont ressenti à un moment de leur développement " un besoin des clients de voir, toucher et essayer le produit ". Les deux entrepreneurs se sont donc lancés et, quelques temps après, ouvraient leur première boutique physique, à Paris, dans le très chic quartier du Marais : " pour des marques d’accessoires c’est plus facile de vendre sur internet, il n’y a pas d’essayage nécessaire. Pour nous qui proposons des jeans, des chinos, des bermudas, etc. c’est plus compliqué. C’est pourquoi nous avons rapidement ouvert un showroom dans nos locaux, constatant l’engouement nous avons décliné notre offre internet en une offre physique ".

Les mêmes exigences en boutique qu’en ligne

" Décliner ", le verbe n’est pas employé par hasard. Les dirigeants de la marque, qui ont lancé leur ligne femme en partenariat avec Caroline Receveur, ont eu à coeur de reproduire leur positionnement web dans leur boutique physique : " contrairement aux retailers purs et durs, on s’est d’abord posé la question de l’expérience client - nous sommes par exemple ouverts sept jours sur sept, comme sur internet - avant même de savoir comment nous allions gérer nos stocks ", explique Olivier Gaudéchoux. Cette approche peut paraître surprenante mais ce n’est pas en mauvais gestionnaires que les deux entrepreneurs l’ont faite leur. Pour eux, la boutique est plus un vecteur de traction que de chiffre d’affaires. En effet, qui n’est jamais allé chercher une marque sur internet après être passé devant l’une de ses enseignes ?

Cette vision du commerce physique est d’ailleurs partagée par Bastien Valensi, le fondateur de Cabaïa. La marque qui propose des bonnets personnalisables, des chaussettes, des serviettes de plage et, plus récemment, des sacs à dos, est présente dans plus de 700 magasins multimarques. Elle est surtout une fervente adepte des pop-up stores, ces boutiques éphémères souvent situés dans des centres commerciaux. Cabaïa a d’ailleurs commencé comme ça, il y a quelques années, avant de recentrer sa stratégie sur une prépondérance du web. La faute en est aux loyers parisiens qui ont explosé. Pour autant, et malgré le fait non négligeable que selon son fondateur " 95% des problèmes de Cabaïa viennent du physique avec les vols, la gestion du personnel ou encore les casses sur le mobilier ", la startup soutient mordicus l'intérêt de cette présence physique. " On attire beaucoup de nouveaux clients grâce à ça, c’est un très bon levier marketing, le tout est d’offrir une expérience client ultra satisfaisante et de proposer le bon produit, au bon endroit, au bon moment ", explique Bastien Valensi. Afin toutefois de limiter les possibles pertes, Cabaïa a fait le choix cet été de s’associer à la marque de sandales Les Tropéziennes pour ouvrir un pop-up store commun, afin de mutualiser les coûts et profiter chacun de la notoriété de l’autre.

Finalement, le volet physique de leur business semble plutôt satisfaire les entrepreneurs de la mode. Olivier Gaudéchoux et Thibaud Godillot constatent " un retour sur investissement très intéressant " dès l'ouverture de la première boutique LePantalon et envisagent à moyen terme celle de flagships dans de grandes villes mondiales. De son côté, Bastien Valensi s’est lancé le challenge de concevoir, dès cette année, la première boutique Cabaïa sédentaire. " Nous comptons attirer la clientèle par des événements, une décoration très instagrammable et une ambiance qui changera au gré des saisons. Vous serez dans une station de ski l’hiver et sur une plage l’été ", promet l’entrepreneur. Vous l’aurez compris, si les e-commerçants peuvent avoir intérêt à décliner une offre physique pour attirer plus de clients, il faut toutefois qu’ils gardent leur identité. C’est finalement elle qui fait leur succès, sur le web comme en boutique.