À l'heure où des personnes meurent encore aux urgences, le suivi des patients revêt une importance toute particulière. Comment assurer la transmission des informations de manière fiable, le plus rapidement et facilement possible et avec une charge minimale pour le personnel soignant, déjà débordé par les tâches administratives ? C'est à cette problématique a priori insoluble que la startup Lifen cherche à répondre. "La France fait face à un paradoxe : nous bénéficions de soignants de grande qualité et, pourtant, notre système de soins fonctionne assez mal, remarque Franck Le Ouay", cofondateur de l'entreprise.

L'entrepreneur pointe du doigt la difficile communication entre médecins généralistes, spécialistes et structures hospitalières. En cause ? "Des logiciels installés en local, très nombreux en raison d'un marché hyper fragmenté et qui ne sont pas interopérables." Chaque praticien a donc son propre système d'information, qui n'a pas toujours la possibilité de communiquer avec celui de ses confrères, le tout branché à une architecture à l'ancienne. De quoi expliquer que des outils pourtant mis en place depuis des années, comme le dossier médical partagé (DMP), connaissent un succès très relatif. Entre 2004, année de la mise en place de ce dossier unique servant à regrouper toutes les informations médicales d'un patient, et 2012, seuls 50 000 DMP avaient été ouverts... Il a fallu attendre 2018 et un lifting complet du système pour qu'il décolle enfin.

Interconnecter les systèmes médicaux d'information

Lifen a donc imaginé une "prise universelle" servant à faire dialoguer les différents systèmes d'information médicaux et embarquant les messageries sécurisées de santé, réservées aux professionnels du secteur. Via Lifen, généralistes et spécialistes peuvent s'échanger les rapports d'examens, partager les bilans de santé et gérer envoi et réception du fameux DMP. Grâce à des fonctionnalités d'analyse de texte, Lifen "traduit" des documents extraits des systèmes d'information des médecins ou d'un dossier papier numérisé pour les formater et les rendre lisibles par les systèmes de leurs confrères.

Après avoir levé 7,5 millions d'euros l'an dernier, Lifen boucle un deuxième tour de table de 20 millions d'euros auprès de Partech, Idinvest Partners, Majycc eSanté Invest ainsi que ses investisseurs historiques Serena et Daphni. La startup, qui a déjà convaincu une soixantaine d'établissements hospitaliers dont six centres hospitaliers universitaires (CHU), souhaite désormais monter en puissance et élargir sa base utilisateurs. Cette accélération commerciale se doublera d'un agrandissement de l'équipe, qui devrait atteindre près de 150 personnes d'ici la fin de l'année.

La startup compte sur le lancement de nouvelles fonctionnalités pour convaincre toujours plus de praticiens. Ainsi, Lifen planche sur un système d'assistants médicaux virtuels capables de gérer une partie des tâches administratives qui plombent aujourd'hui le quotidien des médecins. Et mise également sur le développement de la télémédecine pour s'imposer comme un acteur essentiel de la chaîne des soins.