C’est la fierté de nombre de scaleups : recevoir investisseurs, journalistes ou partenaires dans de grands bureaux lumineux, situés dans un quartier branché et décorés aux couleurs de l’entreprise. Mais, avant d’en arriver là, elles ont pour la plupart connu diverses solutions d’hébergement, passant d’un bureau à un autre au fur et à mesure de leur développement et, surtout, de leurs recrutements. Alors, êtes-vous plutôt appart perso transformé en bureaux ou espace fermé dans un coworking stylé ? Ceci n’est pas le dernier test de l’été version startupper mais bien la question à vous poser pour chercher (et trouver !) vos futurs locaux de rentrée.

Au tout début : petit budget mais grandes idées

Lorsque vous vous lancez dans cette grande aventure qu’est l’entrepreneuriat, le budget est la première de vos priorités. Et l’immobilier est l’un des postes de dépenses les plus importants, sur lequel il est donc à la fois crucial et aisé de faire des économies. Si, comme la plupart des startuppers, vous débutez seul·e ou à deux ou trois cofondateurs, mesurez votre chance : plusieurs solutions s’offrent à vous !

D’abord, la plus évidente : transformer votre appartement - ou celui de l’un de vos compagnons de galère - en bureau. Steve Jobs a lancé Apple depuis un garage, qui sait si la première décacorne française ne naîtra pas dans une chambre de bonne au sixième étage sans ascenseur ? “C’est une bonne option, analyse Cédric Chirouze, consultant Bureaux Flexibles et Innovants chez Savills, fournisseur de services immobiliers à travers le monde. Elle est très économique, ce qui est crucial lorsqu’on débute.” Pensez à établir quelques règles pour préserver un semblant d’intimité : une heure limite passée laquelle tout le monde rentre chez soi ou, si vous êtes solopreneur, vous vous imposez d’arrêter de travailler. Si vous pouvez aménager un bureau dédié, c’est le Graal ! “Le fait qu’il n’y ait aucune frontière entre la sphère privée et professionnelle mais aussi le manque d’émulation avec l’écosystème constituent les limites de cette solution”, souligne ainsi Cédric Chirouze.

L’expert conseille ainsi aux plus jeunes des entrepreneurs de penser aux incubateurs d’écoles. “C’est à la fois une solution économique et qui permet d’accéder à certaines technologies mais aussi à des aides financières dédiées”, rappelle-t-il. Les écoles - de commerce, évidemment, mais aussi de plus en plus d’écoles d’ingénieurs, de sciences politiques et d’universités, en plus de pratiquer des tarifs préférentiels très abordables pour leurs anciens étudiants, présentent l’avantage de leur donner accès à leur réseau.

Enfin, last but not least, le coworking est une autre possibilité à ne pas négliger. Peu onéreux et flexible, il permet de couvrir les besoins d’une startup durant plusieurs mois et à différents stades de son évolution : d’un poste de travail unique pour un solopreneur à quelques postes en open space après les premiers recrutements, les solutions s’adaptent à vos besoins. “De plus en plus d’espaces de coworking se spécialisent dans l’early stage et développent des services dédiés aux boîtes qui se lancent”, précise Cédric Chirouze. Pensez donc à faire votre benchmark pour choisir l’espace qui vous correspond avant de vous décider !

Avec les premiers recrutements arrivent en général les premiers questionnements. Et les premières galères immobilières : votre appartement devient trop petit pour loger cette équipe pléthorique de cinq personnes que vous avez constituée et louer un appartement plus grand s’apparente au parcours du combattant. “Dans les grandes villes, le bail 3-6-9 est très contraignant, notamment pour les néo-entrepreneurs, soupire le consultant de Savills. Il nécessite un dépôt de garantie équivalent à trois mois de loyers et les propriétaires exigent parfois même une garantie allant jusqu’à 1 an de loyer sous forme de GAPD (Garantie Bancaire à Première Demande) si la structure a moins de trois ans, afin d’être rassuré sur la capacité du locataire à régler la facture.” Tout cela sans avoir de visibilité à plus de six mois. Courageux mais pas téméraires, beaucoup d’entrepreneurs renoncent.

À ce stade, le coworking reste une bonne option. Il présente l’avantage de rester financièrement compétitif tout en offrant la flexibilité dont vous aurez besoin pour recruter davantage… ou vous séparer des collaborateurs qui n’auront pas su faire leurs preuves. Autre avantage non négligeable : les espaces de coworking ne sont pas sous le coup de la norme IFRS 16, qui impose aux entreprises de déclarer leurs locations de longue durée au passif de leur bilan comptable. C’est d’autant plus appréciable que de plus en plus d’espaces offrent la possibilité de locations de moyen terme, qui permettent aux entrepreneurs de poser leurs cartons pour quelques mois - et plus si affinités - sans dynamiter leur business plan.

La stabilisation des effectifs, le moment de poser ses valises

Vos effectifs sont (enfin) stabilisés. Votre startup a désormais quelques années au compteur, quelques mois si vous êtes particulièrement précoce. Le coworking ne vous convient plus et vous ne convenez plus au coworking : quand vous avez demandé au responsable de l’espace de vous louer l’intégralité de l’étage, il n’a pas semblé très chaud. C’est le moment de voler de vos propres ailes.

Certaines scaleups sous-louent des espaces dans leurs bureaux : quelques centaines de mètres carrés, parfois des étages entiers. Cela peut être un bon plan pour investir des locaux particulièrement stylés et bien placés à moindre coût. Mais cela reste une solution provisoire : lorsque la scaleup en question grandira encore un peu plus, ce sera à vos dépens.

Reste la location de bureaux avec option d’achat, le meilleur moyen pour optimiser un poste de dépenses, rappelons-le, particulièrement coûteux. N’hésitez pas à sortir des sentiers battus et à chercher dans des quartiers “qui montent”, c’est-à-dire pas les plus centraux ni les plus en vogue mais qui sont bien desservis par les transports - un critère déterminant pour préserver l’attractivité de votre entreprise aux yeux des talents que vous souhaiteriez embaucher.

Autre écueil : ne sous-estimez pas l’espace dont vous avez besoin ! “Il faut compter en moyenne 10 mètres carrés par salarié et prévoir 25-30% de la surface pour les espaces de circulation et de détente”, rappelle Cédric Chirouze. Et pas question de rogner sur ces espaces parfois perçus comme secondaires : “ils sont essentiels pour préserver une forme de convivialité, nourrir les liens horizontaux dans l’entreprise. Il n’est pas toujours optimal de décloisonner l’ensemble de la surface comme cela se faisait il y a quelques années mais plutôt de penser l’espace comme une forme de management project. Et, dans ce cas, les espaces de convivialité sont les seuls où tous les collaborateurs peuvent se retrouver”.

Vous voici donc armés pour votre recherche, en espérant que ce ne soit pas du temps perdu ! Attention d’ailleurs à ne pas vous y prendre au dernier moment : il faut compter un mois pour trouver un espace de coworking, entre trois et six mois pour des locaux de quelques centaines de mètres carrés et plus de six mois pour des locaux au-delà des 1000 mètres carrés. Mais pas de précipitation non plus, ce serait le meilleur moyen pour prendre des locaux qui ne vous conviendraient pas. En immobilier comme dans bien d’autres domaines, la patience est mère de toutes les vertus !

Avec ou sans agent immobilier ?

C’est la question que se posent de nombreux entrepreneurs : faut-il (vraiment) faire appel à un intermédiaire pour chercher des bureaux ? Là encore, cela dépend de ce que vous cherchez. “Au début, la recherche peut tout à fait se faire sans intermédiaire, concède Cédric Chirouze. Mais à partir du moment où la startup compte plusieurs salariés et a une problématique de rétention des talents, il est utile de confier la recherche à un tiers.” Celui-ci vous fera gagner du temps… mais aussi de l’argent. Il sera en effet plus attentif aux clauses abusives contenues dans certains contrats et sera le plus à même de négocier certains points dans un marché favorable aux propriétaires. “Il y a en effet une surenchère sur les prix du fait de la pénurie d’offres, détaille l’expert. Les propriétaires ne font pas de cadeaux dans un marché où les propriétaires ont la main face à la pénurie de solutions dans Paris avec un taux de vacances historiquement bas.

Maddyness, partenaire média de Savills