21 avril 2021
21 avril 2021
Temps de lecture : 4 minutes
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Comment Minos Biosciences parfait l'analyse cellulaire pour le suivi des maladies

La startup Minos Biosciences est le parfait exemple de ce que peut donner la recherche académique. Spin-off de l’ESPCI - PSL, la Deeptech entend associer deux types d’analyse cellulaire dans le but d’affiner le suivi et le diagnostic de diverses pathologies. Elle vient de boucler un tour de table de 1,5 million d’euros auprès d’Elaia pour construire son prototype alpha d’ici à la fin de l’année 2021.
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Minos Biosciences

C’est le résultat de la convergence de deux travaux de recherche distincts. La solution de Minos Biosciences combine microfluidique et biologie moléculaire dans le but d’améliorer l’analyse des cellules uniques. Une technologie inédite selon elle, qui permet en quelque sorte d’attribuer "un code-barre" permettant de les caractériser précisément. "Cela permet d’observer très finement les cellules uniques et d’établir leurs effets sur l’évolution d’une maladie" , explique ainsi à Maddyness Pierre Le Ber, directeur des opérations de Minos Biosciences. Afin de mettre sur pied son premier prototype, la Deeptech vient de lever 1,5 million d’euros auprès d’Elaia – à travers le fonds d’innovation PSL. De quoi passer de la preuve de concept à une multitude d’applications potentielles, notamment en laboratoire.

Des applications médicales très diverses

Derrière Minos Biosciences se trouvent notamment des chercheurs issus de l’université Paris Sciences & Lettres (PSL) et l’École supérieure de physique et de chimie industrielles (ESPCI), deux établissements d’enseignement supérieur qui lui ont accordé une licence d’exploitation pour quatre brevets. PSL a aussi investi 74 000 euros, qui ont depuis été convertis en actions. "Ce lien nous permet de coupler omique [les données moléculaires, N.D.L.R.] et phénotype [les caractères observables des cellules, N.D.L.R.]. In fine, cela revient à pouvoir déterminer la mécanique moléculaire des cellules uniques" , détaille Pierre Le Ber. Dans les faits, cette technologie rend possible d’affiner l’analyse de certaines pathologies. Ainsi, dans le cadre de l’oncologie, les scientifiques peuvent jauger l’hétérogénéité d’une tumeur à partir d’une biopsie. "Les cellules saines sont souvent mélangées aux cellules cancéreuses. La solution permet de connaître précisément le stade de cancérisation d’un patient" , avance Pierre Le Ber, qui précise que "les cellules rares sont parfois celles qui rendent un cancer agressif ou qui font qu’un individu résiste aux traitements administrés".

Mais l’intérêt de la technologie de Minos Biosciences est transverse. À terme, la startup imagine la décliner à différentes spécialités médicales, telles que l’immunologie ou même le diagnostic au sens large. "On pourrait ainsi améliorer le suivi pré-natal non-invasif en repérant chez la mère les cellules ‘flottantes’ issues du fœtus" , se projette le directeur des opérations. Une avancée obtenue par observation microscopique des caractéristiques des cellules. La Deeprech, qui entend générer davantage de résultats tout au long de l’année 2021, mettra au point son prototype alpha grâce à la levée de fonds qu’elle vient tout juste de boucler. "Nous mettrons en place des partenariats, notamment avec des laboratoires, dans les prochains mois afin d’encadrer scientifiquement l’utilisation du produit" , assure Pierre Le Ber. Celui-ci se compose de l’instrument permettant de caractériser les cellules, ainsi que le logiciel pour le piloter et les réactifs visant à l’adapter à chaque cas d’usage.

C’est justement sur ces réactifs que repose le modèle économique de Minos Biosciences. "Nous fonctionnerons comme Nespresso : l’achat de l’instrument est un acte unique, mais le fait que le client doive se réapprovisionner en réactifs représente une entrée d’argent continue" , note Pierre Le Ber, d’après qui le prototype bêta sera "installé chez de premiers industriels américains et européens en 2022"… avant un lancement commercial l’année suivante.

Et le marché serait pour le moins conséquent. "Les outils d’analyse en biologie pèsent actuellement 60 milliards d’euros à l’échelle mondiale. Ce chiffre devrait grimper à 100 milliards d’ici à 5 ans" , affirme le directeur des opérations. Mieux encore : le segment investi par la startup, celui de l’analyse des cellules uniques, connaît "une croissance de 20 % chaque année" – il pèserait aujourd’hui 1,8 milliard de dollars, d’après l'entreprise.

Et à l’en croire, la concurrence frontale est quasi-inexistante : "L’approche qui est la nôtre apporte une nouvelle dimension à l’analyse, puisqu’elle permet de réunir celles exploitées par de multiples entreprises" . L’Américain 10x Genomics, fondé en 2012, est valorisé à 20 millions de dollars, est l’un des plus gros acteurs du secteur. Mais Minos Biosciences dit avoir une carte à jouer "en explorant de nouveaux champs d’application" grâce aux associations inédites rendues possibles par sa technologie. "Tout en allant prendre des parts de marché" aux entreprises bien installées.

Pour faire mûrir sa solution, la Deeptech commence à recruter. Six personnes, dont les co-fondateurs, y travailleront à temps plein début mai 2021. "Trois ou quatre personnes supplémentaires nous rejoindront bientôt" , indique Pierre Le Ber, soulignant qu’il s’agira de renforcer les compétences scientifiques de la jeune pousse en matière de bioinformatique, de biomoléculaire et de microfluidique.