Un nouvel anglicisme se fait une place dans l'Hexagone : " l'advisory board " (comité consultatif, en français). " C'est déjà très commun aux Etats-Unis, mais la tendance est récente en France, explique Réza Malekzadeh, investisseur chez Partech. Cela s'explique par une certaine maturité de l'écosystème, composé désormais de scale-ups. Ces dernières cherchent à mieux se structurer, sans compter que leur ambition est de plus en plus internationale. C'est pourquoi l'intérêt commence à naître chez les entrepreneurs ".

L'objectif : se doter de compétences spécifiques, qui ne sont pas présentes en interne, pour se faire épauler. C'est pourquoi Dataiku a sauté le pas. L'éditeur de logiciels a annoncé lundi 3 octobre la création et la composition de son comité : " Nous sommes à une phase de notre développement où les projets que nous menons avec nos clients ont désormais un impact sur leur transformation et leur mode de fonctionnement. Notre comité va nous aider à mieux comprendre les enjeux des directions générales avec lesquelles nous travaillons, et ce, par industrie ", détaille Amaury Delplancq, vice-président Sud-EMEA chez Dataiku.

Parmi les sept membres du comité, Delphine Ernotte, présidente de France Télévisions, ou encore Bernard Attali, ancien président d'Air France. " Au-delà de la compréhension des enjeux des directions générales, l'idée est de pouvoir y accéder plus facilement. L'advisory board va nous ouvrir des portes et donc, nous faire gagner du temps ", souligne-t-il. Et de poursuivre : " Il y a aussi une dimension de communication : cela va nous permettre de faire connaître et d'adosser le nom Dataiku à des dirigeants réputés sur le marché français ".

Miser sur la complémentarité des profils

L'advisory board est-il l'apanage des scale-ups ? Pas forcément. " Il y a un intérêt à créer un comité consultatif à toutes les étapes de croissance – le rôle du comité, ainsi que sa composition, vont simplement évoluer, affirme Pascale Ribon, directrice Deeptech chez Bpifrance. Pour répondre aux besoins, Bpifrance a lancé en mai la plateforme " Tango " pour aider les startups deeptech à constituer leur comité. Environ 600 conseillers ont déjà postulé via la plateforme et 20 startups y ont publié des offres.

" Dans un premier temps, les startups peuvent s'entourer de conseillers – sans former officiellement un comité. Cela permet de travailler collectivement à la vision moyen terme et de mieux cibler son marché. Au fur et à mesure, cela permet de travailler sur les levées de fonds, la gouvernance de l'entreprise, ou encore, à mieux se préparer à l'arrivée d'un conseil d'administration, poursuit-elle. Parfois, l'arrivée d'un conseil d'administration peut créer des tensions pour les dirigeants, qui ont l'impression que leur capacité d'action se retrouve limitée – là où le comité consultatif peut être mieux perçu ".

Pour le composer, la clé est de miser sur la complémentarité des profils

" Pour les startups deeptech, il s'agit souvent de primo-entrepreneurs. Ils ont un profil très technique, mais ils seront moins à l'aise sur des aspects réglementaires, par exemple ", illustre Pascale Ribon. Trouver un spécialiste du sujet sera alors pertinent. Inutile en revanche de privilégier des relations parmi son cercle proche. " Généralement, cela passe par des recommandations et des mises en relation ", précise Réza Malekzadeh. C'est le cas de Dataiku, qui a mis au total environ six mois pour composer son comité.

Rémunérer ou non le comité consultatif, telle est la question

Côte fonctionnement, à chacun de trouver son rythme de croisière. S'il est moins formel que le conseil d'administration, il est conseillé d'avoir " une régularité des rendez-vous et d'effectuer un travail sérieux de préparation des séances pour diriger les conversations afin d'en retirer un maximum de bénéfices ", souligne l'investisseur.

Se pose alors l'épineuse question : faut-il rémunérer les membres de son advisory board ? " Il y a débat, reconnaît la directrice Deeptech. Lorsque les startups sont dans une phase de lancement, nous leur conseillons de miser sur des interventions bénévoles, avec des possibilités de rémunérer la participation aux réunions. Il s'agit généralement de montants pouvant aller jusqu'à 300 euros par réunion ". Lorsque l'entreprise est en phase d'accélération, il est aussi possible " de les rémunérer sous forme d'equity – qui est le modèle privilégié aux Etats-Unis. Cela permet d'associer davantage les conseillers à long terme ", estime Réza Malekzadeh.