Cela s’est traduit par la structuration de filières complètes et par la création d’emplois hautement qualifiés... Ces dernières années, tous les jours ou presque, la presse fait écho de ce bouillonnement, signe que cette industrie s’est installée durablement dans le paysage économique.

Il y a 20 ans, les fondamentaux étaient déjà présents : une éducation supérieure de qualité, des filières d’excellences, un soutien massif des pouvoirs et financeurs publics (CDC/BPI, BEI/FEI, FCPI, CIR, JEI...).

Il y a 20 ans, l’ensemble de ce qui n’était pas encore " La French Tech " levait péniblement quelques centaines de millions d’euros sur une année, ce que peut lever une startup en une seule fois aujourd’hui. En 2021, le montant total des levées a atteint 11,5 milliards en France ! Malgré des signes de ralentissements perceptibles, le premier semestre 2022 semble néanmoins s’être maintenu à des niveaux historiquement élevés.

Il y a 20 ans, nous ne comptions que quelques dizaines de startups disséminées sur le territoire. En 2021, La French Tech est devenue l’un des premiers employeurs de France, devançant même le sacro-saint CAC 40 en nombre de salariés !

À l’époque, certains freins majeurs ralentissaient le développement de cette industrie. La situation a depuis considérablement évolué : des changements culturels profonds (acceptation de l’échec, ambition mondiale...), des filières de soutien et d’accompagnement incroyablement riches (incubateurs, accélérateurs...), une chaine de financement -quasi- complète, des acquéreurs français et internationaux, des industriels qui “jouent le jeu” de la prise de commandes auprès de jeunes entreprises, des succès qui créent l’émulation... Il y a bien sûr encore de nombreuses améliorations à apporter, mais le chemin parcouru est remarquable.

Cela ne s’est pas fait en en jour, ni sans heurt : éclatement de la bulle internet, crise financière de 2008, crise fiscale des pigeons, crise sanitaire du COVID... Chacun de ces évènements majeurs a initialement secoué l’industrie, mais l’a finalement renforcée sur le long terme.

À ce bilan éminemment positif, certains éléments conjoncturels viennent à nouveau porter quelques nuages : inflation, guerre en Ukraine, tension sur les talents, hyper concurrence pan- européenne et mondiale... Mais finalement, cela ne ressemblerait-il pas au parcours classique de l’entreprenariat : des fondamentaux porteurs, une farouche volonté et un parcours jalonné de difficultés ?

Et la (vraie) tech dans tout ça ?

Quand on détaille la typologie des 28 licornes françaises actuelles, 24 d’entre elles sont “digitales” : elles répondent à des besoins “de consommation” en prenant appui sur le numérique pour vendre un produit/service meilleur que ce qui était proposé auparavant. Commerces, banques, jeux vidéos, transports, médias sont les principaux secteurs concernés.

Seules 4 licornes pourraient être labellisées “Deeptech” : Dataiku, Exotech, Shift et Talend. Cela paraît peu, dans un pays disposant d’une aussi forte culture scientifique que la France. Cependant, la French Deeptech recèle un potentiel formidable, celui d’être une réponse aux urgences auxquelles la France et l’Europe font face : santé, sécurité, infrastructures, énergies, alimentation, climat... L’actualité récente ne fait que trop nous rappeler le besoin de solutions souveraines à ces enjeux majeurs.

Alors que le potentiel de ces sociétés est considérable, pourquoi celles-ci semblent-elles avoir plus de mal à émerger ? Il est important de comprendre, qu’en plus des défis classiques auxquels font face les startups digitales, celles appartenant au monde Deeptech ont certaines caractéristiques supplémentaires : des verrous technologiques fondamentaux à lever, un temps plus long, une chaîne de financement moins complète, quelques freins culturels spécifiques, une filière moins structurée, des collaborations avec les grands groupes encore peu développées. Cela étant, nous assistons ces dernières années à des évolutions majeures qui nous semblent aller dans le bon sens.

Cela étant, nous assistons ces dernières années à des évolutions majeures qui nous semblent aller dans le bon sens.

Tout d’abord, nous notons une série de changements culturels majeurs : celui de l’émergence d’équipes pluridisciplinaires, dotées de qualités techniques et business, qui ont une compréhension globale des enjeux de la startup. La complémentarité de ces profils et leur capacité à bien communiquer seront des ingrédients centraux du succès des sociétés. Par ailleurs, Nous voyons également émerger une jeune génération d’entrepreneurs hyper-sensibilisés aux grands sujets sociétaux et environnementaux, pour qui le projet entrepreneurial ne saurait être dissocié de ces problématiques. Cela amène à un débridage des ambitions et l’émergence de sociétés qui adressent des vraies problématiques massives et mondiales dès le premier jour.

Ensuite, force est de constater que l’écosystème de la “French Deeptech” se structure autour d’initiatives françaises et européennes. Tout d’abord, il y a un soutien massif de la sphère publique : SATT, BPI France, France 2030, European Innovation Council, BEI/FEI... pour ne citer que celles-ci. Ensuite, les structures d’accompagnement privées : de grands cabinets de conseils comme le Boston Consulting Group, des associations comme Hello Tomorrow, des startups studios comme Entrepreneur First apportent leur contribution à l’écosystème. Autant d’initiatives françaises et Européennes qui visent à identifier, développer et faire grandir les technologies de ruptures.

Enfin, il faut également noter un regain d’intérêt des grands industriels pour les startups Deeptech : d’après une étude menée par le BCG/Natixis, 90 % des entreprises européennes interrogées déclarent avoir d’ores-et-déjà investi dans ces innovations de rupture. Cela se matérialise notamment par une augmentation de la commande, par des acquisitions et par la mise en place de fonds de Corporate Venture.

Toutes ces avancées fondamentales vont dans le bon sens. Le point d’achoppement majeur reste cependant le manque d’une chaîne de financement complète qui prendrait en compte les spécificités de ces sociétés (le temps) pour les accompagner dans le “late stage”.

Nous assistons actuellement à une vague de fond, une vague qui fera émerger une nouvelle génération de leaders technologiques, de ceux qui impacteront durablement nos vies, pour le bien commun. Ici encore, le chemin sera long, mais nous avons, d’années en années, plus d’atouts pour faire émerger ces futurs leaders continentaux.

En avant !