L’univers du capital-risque peut souvent paraître complexe pour les néophytes, et parmi les entrepreneurs à la recherche de financements, les VC distinguent deux profils : le néo-entrepreneur, qui découvre cet univers, et le serial entrepreneur qui a potentiellement déjà connu plusieurs levées et qui comprend les rouages d’un tour de table.

En parallèle, il existe plusieurs formes de VC qui se différencient en fonction de leurs thèses d’investissement ou encore des verticales abordées. Cependant, pour clarifier le fonctionnement d’un fonds aux néo-entrepreneurs, nous allons nous concentrer aujourd’hui sur le business model classique de notre écosystème.

Comment les fonds créent-ils de la valeur ?

Si chaque société de capital-risque est une structure durable dans le temps, leur dynamique repose sur plusieurs fonds, ou véhicules d'investissements, bien distincts. Ces différents fonds sont régis par ce que l'on appelle communément le “Limited Partnership Agreement” (LPA). Cette convention est conclue entre des investisseurs institutionnels (les Limited Partners - généralement des fonds de pension, des Family Offices, etc.) et des sociétés de gestion (les General Partners - qui représentent la société de capital-risque qui gère les investissements des LPs).

Grâce aux LPAs, les deux parties définissent ensemble les critères qui leur permettront par la suite de générer de la valeur grâce à leurs investissements. Tout d’abord, les fees : il s'agit d'un pourcentage fixe qui sera prélevé sur le total du fonds chaque année. Ce prélèvement est généralement limité dans la durée (en moyenne entre 7 et 10 ans). Ainsi, de nombreux fonds factureront des frais élevés pendant les 3 à 5 premières années, puis diminueront au fur et à mesure.

Ensuite, les intérêts différés (ou “carried interest”) : Il s'agit simplement d'un partage des bénéfices versé une fois que les investisseurs ont été remboursés. En d'autres termes, une fois que les investissements ont été réalisés dans des entreprises, celles-ci vont se développer et (espérons-le !) croître. Certaines d'entre elles finiront par sortir, ce qui rapportera au fonds. La première partie de ce rendement revient directement aux investisseurs privés jusqu'à ce qu'ils récupèrent la totalité de leur mise de fonds initiale. Si d'autres rendements sont générés au-delà, ils sont partagés entre les LPs et les GPs.

Les principaux postes de coûts des capital-risqueurs

Pour la plupart des VC, la dépense la plus importante est de loin l’équipe elle-même. Les fonds sont souvent constitués d’experts pluridisciplinaires de haut-niveau. Au-delà des Partners, ils comptent dans leurs rangs des analystes financiers, des avocats, mais aussi des professionnels du marketing, du juridique, etc. Puis viennent les dépenses telles que le loyer du bureau, les voyages professionnels ou encore la communication. Les revenus réguliers provenant des fees permettent ainsi aux fonds de fonctionner en continu, malgré le niveau de risque des investissements. S'il y a un excédent, il est généralement reporté en cas d’un éventuel déficit futur.

Le risque au coeur du modèle

Dans l’univers des VC ce qui compte le plus est la prise de risque… et ce qui l’accompagne : le carried. En fonction de l’entreprise, le carried peut être uniquement distribué aux associés ou partagé avec toutes les équipes du fonds en fonction de leur ancienneté et de leurs responsabilités dans les investissements réalisés.

Si les revenus issus des fees sont plus réguliers, les intérêts différés sont moins fiables qu'un système de bonus, qui repose sur des KPIs clairs et sur lesquels nous pouvons avoir une influence directe. Dans le cas du carried interest, les chiffres dépendent d’une agrégation de différents investissements. Ainsi, un deal extraordinaire peut vous apporter un large bénéfice, mais il peut être diminué par un autre investissement raté dans le même fonds.

D’autre part, le timing est un enjeu de taille. Si une startup peut être vendue rapidement, entraînant immédiatement des bénéfices, une autre peut au contraire prendre des années à se développer avant d’atteindre un stade de rentabilité ou d’intérêt à la vente. Il y a quelques années, il fallait patienter en moyenne 7 à 8 ans pour obtenir son premier chèque d’intérêts différés. Aujourd'hui, l'évolution du marché a légèrement diminué ce délai, mais il reste in fine quasiment égal du fait que les fonds investissent de plus en plus tôt (pre-seed), et que les startups restent plus longtemps privées.

Entrepreneurs : comment utiliser ces informations à bon escient ?

Comprendre le modèle des VC et leurs rouages internes peuvent vous permettre d'anticiper leurs comportements, et d’en tirer le meilleur pour votre startup. Voici quelques conseils pratiques qui vous permettront de faciliter vos échanges avec eux. Tout d’abord, méfiez-vous des contacts qui cherchent à vous faire payer des frais pour siéger à votre conseil d'administration, pour vous rendre visite, ou effectuer des analyses juridiques post-investissement… Cela sous-entend que le fonds peine à se rémunérer, ce qui n'est pas bon signe.

D'autre part, les fonds recherchent habituellement de grosses opportunités, souvent synonymes de gros risques. Si vous avez créé une startup formidable, qui génère des bénéfices et connaît une croissance solide, ne soyez pas étonné si votre dossier intéresse moins les VC à première vue, puisque ces derniers recherchent un rendement important basé sur le risque.

Enfin, gardez en tête que votre startup est une startup parmi d’autres au sein du portfolio du fonds. Chaque société de capital-risque possède plusieurs investissements dans chacun de ses fonds, et a besoin que le fonds réussisse dans son ensemble. Au départ, la société investit dans des entreprises qui, selon elle, ont beaucoup de chances de réussir. Mais, au fil du temps, certaines réussiront à éclore, et d’autres non. Comme les ressources du fonds ne sont pas illimitées, il arrive que certaines startups perdent leur soutien au fur et à mesure. N'hésitez donc pas à anticiper ces décisions en amont de vos prochains tours de financement, en vous demandant si vous êtes toujours une priorité pour le fonds qui vous suit.