Sur le marché de l’emploi, les entreprises s’arrachent ces talents qui sont à la fois rares, recherchés… et très sollicités. Pourquoi les jeunes startups doivent-elles s’intéresser aux C-Levels ? Comment convaincre ces pépites de rejoindre un projet en amont d’une levée de fonds ? Pour en savoir plus, Maddyness est allé à la rencontre de Reza Malekzadeh (Partech), Marine Charrier (fondatrice de Polytopoly) et David Simeoni (fondateur et CEO du cabinet Elinoï).

Le rôle crucial des C-Levels pour les startups early-stage

Les entrepreneurs, aussi brillants soient-ils, n’ont pas le don d’ubiquité. Or, quand une startup est en croissance, elle doit relever de nouveaux défis commerciaux, marketing, managériaux, opérationnels, administratifs, juridiques et financiers. Si les fondateurs étaient auparavant en capacité de superviser chacun de ces aspects, ils doivent apprendre à scaler leur entreprise en délégant ces différents pôles stratégiques : "Les C-Levels sont là pour construire le deuxième étage de la fusée. Quand on atteint le cap des 20, 30 ou 40 collaborateurs, les fondateurs ne peuvent plus tout gérer. Il faut donc s’entourer d’un ou d’une VP Sales, VP Marketing, VP RH, pour construire l’entreprise au fur et à mesure de sa croissance", explique Reza Malekzadeh, General Partner chez Partech, une plateforme d’investissement ayant un portefeuille de 200 sociétés et 2,3 milliards d’euros d’actifs.

Cofondatrice de la startup Polytopoly, qui aide et incite les industriels à acheter du plastique recyclé en sécurisant les volumes et la qualité de la matière, Marine Charrier abonde. "Nous recrutons actuellement un Chief Financial Officer et un Chief Marketing Officer. Notre but est d’abord de consolider et d’accroître les performances de notre startup. Nous sommes par ailleurs en plein second tour de levée de fonds, et souhaitons rassurer les investisseurs sur notre volonté de recruter des profils seniors, capables de s’impliquer dans le projet avec la même énergie et la même rigueur que les fondateurs et d’apporter leurs compétences acquises durant leurs longues expériences", révèle l’entrepreneuse.

Le recrutement de C-Levels au sein d’une startup est effectivement un critère important pour les investisseurs. "Nous voulons que toutes les roues soient sur la voiture. Lorsque l’on parle de startup, on se concentre souvent sur le produit, le service, ou l’innovation qui est apportée… mais il faut aussi s’intéresser à l’équipe, son organisation et sa capacité à scaler. À ce titre, les C-Levels jouent un rôle clé", raconte Reza Malekzadeh (Partech).

Les C-Levels peuvent véritablement faire changer une startup de dimension en l’espace de quelques mois. David Simeoni est le fondateur et CEO du cabinet Elinoï, qui accompagne 400 startups et scale-ups dans le recrutement de profils “business”. Selon lui, la valeur ajoutée du C-Level repose sur un triptyque de compétences : "D’abord, un C-Level doit savoir faire : il trace la voie et maîtrise les compétences opérationnelles propres aux équipes qu’il encadre. Ensuite, les C-Levels doivent savoir faire faire : ils accompagnent les individus dans leur montée en compétences et les mettent dans les meilleures dispositions pour la réalisation de leurs missions. Enfin, les C-Levels ont le sens de l’organisation : ils savent structurer une équipe, définir les process… pour faire progresser l’activité", résume t-il.

L’art de recruter des C-Levels

Faut-il se faire accompagner pour recruter des C-Levels ? Pour Marine Charrier (Polytopoly) la réponse est sans appel : "Oui, ça nous semble indispensable. Les cabinets de recrutement disposent d’une expertise, d’un réseau et d’outils de “chasse” qui sont essentiels pour des recrutements aussi complexes".

Une opinion partagée par David Simeoni (Elinoï) : "Se tromper sur ce type de recrutement peut parfois coûter bien plus que des euros : cela peut coûter une entreprise. Une erreur dans le choix du C-Level peut par exemple provoquer le départ d’une équipe entière. Il est primordial de se faire accompagner pour ce type de recrutement".

Pour éviter toute erreur de casting, il convient d’abord de bien cadrer le besoin en matière de recrutement. "90 % des recrutements ratés sont dûs à une mauvaise préparation en amont. C’est pourquoi nous demandons d’abord à nos clients de préparer une scorecard, qui définit les motivations du recrutement, le spectre de compétences recherché, fixe des objectifs chiffrés, et rappelle les valeurs de l’entreprise avec lesquelles le candidat devra être en adéquation", explique ainsi David Simeoni (Elinoï).

Il faut ensuite convaincre les C-Levels identifiés du projet par la startup. "Depuis la crise sanitaire, les C-Levels sont particulièrement en recherche de sens. Ils souhaitent retranscrire leur vision et leurs valeurs à l’échelle de leur entreprise", révèle le fondateur d’Elinoï.

Au sein d’une startup, les C-Levels ont l’opportunité de jouer un rôle important et ayant un impact direct sur la performance de l’entreprise. C’est pourquoi une partie d’entre eux quittent de très grandes entreprises, où cet impact est moins palpable, pour rejoindre des startups early-stage. 

"Intégrer une startup est un choix aventureux, et donc parfois moins sécurisant", explique Marine Charrier (Polytopoly). "Nous devons être totalement transparents sur la situation et les objectifs de l’entreprise. Il faut avoir une franche discussion sur la culture et les valeurs du projet, car elles doivent être en totale adéquation avec ce que recherche le C-Level pour permettre à chaque partie de se projeter dans le recrutement", résume t-elle.

Pour Reza Malekzadeh (Partech), la relation humaine entre le candidat et les fondateurs est capitale : "Le C-Level va passer beaucoup de temps à collaborer avec les fondateurs. Ceux-ci doivent donc trouver une personne avec qui elles s’entendent humainement", ajoute t-il.

Afin de recruter un C-Level, les startups doivent aussi être prêtes à mettre la main au portefeuille. "Un C-Level à moins de 100.000€, ça n’existe pas ! Parmi les scale-ups que nous accompagnons, il n’est pas rare du tout de voir des C-Levels qui gagnent 500.000€ par an”, dévoile David Simeoni (Elinoï).

"Le fait d’acquérir des parts de la société est un bon moyen de compenser les écarts de rémunération avec les grandes entreprises, tout en impliquant un peu plus le C-Level dans la réussite de la startup", complète Marine Charrier (Polytopoly).

Enfin, les investisseurs peuvent soutenir les startups dans le recrutement des C-Levels. "Cela nous arrive régulièrement. Nous mettons notre réseau à la disposition des entreprises que nous accompagnons. À ce titre, nous effectuons de la mise en relation, du conseil, et nous participons souvent aux entretiens", explique Reza Malekzadeh (Partech).

Le recrutement d’un C-Level est un événement important dans la vie d’une startup, capable de lui faire passer un cap dans sa croissance. Se faire accompagner est donc particulièrement important pour choisir la bonne personne. Si ces profils sont rares, le marché de l’emploi est mondial : il ne faut donc pas hésiter à recruter des C-Levels étrangers ou expatriés !