Décryptage par Alexandre Seperoumal
21 décembre 2022
21 décembre 2022
Temps de lecture : 5 minutes
5 min
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SneakerTech - Épisode 3 : Relations marques et plateformes

L’industrie de la sneaker marcherait-elle à l’envers ? De la spéculation à la fraude sur les plateformes en passant par le métavers et la durabilité, Maddyness décrypte à travers une série de 6 articles (baptisée SneakerTech), les clés pour comprendre cette économie aux multiples enjeux.
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Incontournable accessoire de la culture urbaine ou sportive, la sneaker s’est démocratisée. Appréciée dans le milieu de la musique comme dans la mode, phénomène mondial, elle habille toutes les générations de tous milieux sociaux. Les marques de luxe Prada, Gucci, Balenciaga, Louboutin comme le hard discounter Lidl ont flairé la bonne affaire et proposent leurs propres modèles de sneakers. En 2022, plus d’une chaussure vendue sur deux sera une sneaker en France.

C’est l’objet "le plus rentable au mètre carré", souligne Malika Merabet, responsable de marché textile et sneakers chez Citadium, destination retail de la streetwear appartenant au groupe Printemps. Altruistes, les marques fabricantes ont suivi de près le phénomène et ont développé la stratégie du “drop”, c’est à dire le fait de révéler un nouveau modèle en quantité limitée et créer la pénurie puis créer l’attente et la rareté. D’ailleurs, le succès d’un drop déterminera si la sneaker doit faire l’objet d’un “GR” (general release) dans la foulée de son lancement et être produite en de plus larges quantités.

Les temps ont bien changé comme aime bien le rappeler Anna Events, fondatrice de l’agence évènementielle et marketing d’influence - Son of Sneakers : "Il y a 7 ans, les marques ne voulaient même pas entendre parler des resellers en France ! Aujourd’hui le marché se transforme, s'ubérise et les problématiques de supply chain des marques et des usines de fabrication en Chine ajoutées à l’inflation ne font qu’accélérer cette tendance".

Malgré tout, les marques doivent composer avec les revendeurs car l’audience de ces plateformes les intéressent aussi énormément. "60 % des membres de notre communauté ont entre 18 et 24 ans avec un certain pouvoir d’achat que les marques veulent cibler plus largement et mieux comprendre avec notre contribution", avance Michael Holzmann, co-CEO et cofondateur de Wethenew en charge du développement du business, de la finance et des RH. Pour David Benhaïm son associé cofondateur et co-CEO : "On a des relations qui sont en train de se développer avec beaucoup de marques, on n’est pas qu’une plateforme transactionnelle et on a notre rôle à jouer dans la sublimation des produits car le contenu que l’on crée, fait probablement parti des meilleurs contenus que l’on trouve sur leurs produits".

Les marques et les plateformes de revente, faux amis ou meilleurs ennemis ?

Le marketing d’influence n’est jamais très loin non plus pour les marques. Ces dernières, tout comme les resellers, ont créé une stratégie de tendance, en proposant à la vente des quantités limitées de modèles et en créant des collaborations avec des célébrités, des sportifs ou des influenceurs.

La collaboration de Virgil Abloh avec Nike a notamment marqué les esprits. Le designer récemment emporté par un cancer, a remis au goût du jour “the Ten” soit 10 redesign de paires historiques de Nike. Ou récemment New Balance avec Aimé Leon Dore, et encore Adidas avec Kanye West dans le cadre du modèle Yeezy. Dans ce dernier cas, le partenariat entre la marque et l’artiste a pris fin à cause des propos de l’artiste. Les recherches Google concernant la vente de Yeezy auraient aussi explosé suite à l’annonce d’Adidas, d'après le média sur l’actualité rap Booska-P et son prix pourrait bien s’envoler dans les semaines à venir.

Toutes ces collaborations permettent de créer la désirabilité autour de la marque, d’écouler toute la production en quelques heures et de revendre souvent à des prix prohibitifs l’édition limitée. De nombreuses marques ont leur “face”, type d’égérie 2.0 qui va créer des contenus et les poster en masse sur les réseaux sociaux. Chaque lancement de produit est une nouvelle occasion de faire remarquer la marque. Autre exemple récent d’Adidas et l’influenceuse Léna Situations (3,9 millions d’abonnés sur Instagram), qui devient la première française à designer une collection de sneakers pour Adidas.

Si cette collaboration n’a pas laissé indifférent la communauté sneakers sur la crédibilité et la pertinence de ce choix, cette collaboration a pu à minima remplir l’objectif premier de la marque : faire parler d’elle et avoir le plus possible de retombées médias afin de mettre le modèle de sneakers sur orbite. D’ailleurs il faut rappeler qu’en moyenne 70 % des coûts d’une grande marque de sneaker est alloué à la publicité.

Si les resellers et la spéculation autour des sneakers font le jeu des marques, elles restent encore en retrait, pour David Benhaïm : "Il y a encore un peu de chemin à faire avec Nike et Jordan tout de même puisqu’ils entretiennent une relation ambiguë avec les plateformes de resell, elles créent cette rareté du produit en limitant la distribution ce qui donne lieu à des prix extrême de revente".

Et les marques, elles, ne sont pas pour autant moins intransigeantes, pour exemple la plainte déposée en mars 2022 par Nike contre StockX pour revente de contrefaçons et publicité mensongère aux Etats-Unis… La conclusion de ce contentieux pourrait bien avoir un impact sur le futur de ces marketplaces et leurs relations avec les marques.

Pour prolonger la lecture : L’épisode 4 sera consacré aux tendances actuelles dans l’industrie de la sneaker.

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