À cœur vaillant, rien d’impossible dit-on. Un dogme que Sophie Kerob, 51 ans, applique depuis le lycée où elle mène de front, et avec succès, un bac scientifique et des études de piano au conservatoire. Refusant de choisir, elle a fait preuve d’obstination pour y parvenir a finalement dû s’orienter vers math sup et math spé pour intégrer l’école des Mines à Paris : " On m’avait conseillé une école d’ingénieur car, comme je ne savais pas quoi faire, ça ouvrait toutes les portes ", sourit-elle derrière ses lunettes. Alors même quand une conseillère d’orientation tente de la dissuader, elle persiste et choisit la physique nucléaire. Diplôme en poche, elle n’est pas plus avancée sur son parcours et opte pour du conseil en stratégie chez Arthur D. Little.

" J’ai touché aussi bien à la chimie, au chocolat, la parfumerie… Je voyage et je travaille beaucoup mais je n’ai pas le déclic. ". Epuisée, elle décide de réaliser un MBA pour lever le pied.

De Harvard au statut de gazelle

Le film Love Story jouera un rôle dans le parcours de cette femme à l’élégance naturelle. " Ça se passe à Harvard. J’ai aimé ce campus qui me faisait rêver donc j’ai postulé et j’ai été admise. " . Elle finance ses deux ans d’étude par des bourses, un soutien financier de son ancien employeur et un prêt à taux zéro. La Touraine insiste. " C’est une expérience accessible même quand on vient de province et que l’on a peu de moyens. Il faut de la motivation et chercher de l’aide. ". Au sortir du campus américain avec son MBA, elle commence à avoir une idée de ce qu’elle veut faire. " Le matin, je ne voulais pas lire la presse financière ou technologique mais la santé, la science de la vie, la biotech m’intéressait. "

Sur un coup de bluff en récitant un lexique technique appris deux jours plus tôt, elle intègre Genzyme à Boston, une entreprise de biotechnologie et fait ses preuves sur le terrain. Quand on veut lui confier la direction du business développement en Europe, un ancien responsable la contacte avec plusieurs projets dans ses valises, dont Direct Medica. " On était en 2000, le boom des startups et les financements coulaient à flot. " Très vite la startup s’oriente vers une plateforme de relation client dans la santé.

Avec 450 collaborateurs et 40 millions d’euros de chiffre d’affaires, la gazelle est rachetée 20 ans plus tard par la licorne Webhelp pour environ 100 millions d’euros.

De défi en défi

Plutôt que de se reposer sur ses lauriers grâce à cet argent, cette brune obstinée créé la fondation Zephyr avec l’ambition de " faire un petit geste qui peut changer la vie des gens, être utile à la société. " Un challenge qu’elle relève une fois de plus avant de se lancer dans un autre en créant Wooskill. Cette plateforme met en relation 20.000 talents et des personnes en mal de compétences autour de 150 domaines répertoriés. " J’entendais souvent : tu ne connais pas quelqu’un qui… ? "

Après une levée de fonds de trois millions d’euros menée auprès de business angels en 2021 et une récente phase de bêta-test, la solution est commercialisée depuis janvier 2023 tandis que son pendant pour les professionnels, Wooskill for Business, propose 1 200 intervenants d’exception aux entreprises.

" Nous finalisons un partenariat média for equity avec le groupe Reworld Media qui va prendre des parts dans la société en échange d’une large visibilité sur ses 82 supports dans la presse et sur le web. Cela représente environ 40 millions de français impactés par leurs médias. "

Un coup de pouce qui devrait aider Sophie Kerob et son équipe de 25 salariés à atteindre l’objectif de 3 000 commandes mensuelles de cours et ateliers en ligne d’ici la fin de l’année.