Portfolio par Perrine Signoret
écrit le 4 mai 2023, MÀJ le 11 juin 2023
4 mai 2023
Temps de lecture : 4 minutes
4 min
29678

Face aux vélos en libre-service, Motto mise sur la location au mois

Ne parlez pas à Motto de vélos en libre-service. Contrairement à ses concurrents Uber, Bird ou Lime, la startup loue ses vélos électriques au mois. Et visiblement… ça marche.
Temps de lecture : 4 minutes
Partager
Ne passez pas à côté de l'économie de demain, recevez tous les jours à 7H30 la newsletter de Maddyness.

Le couperet est tombé début avril : l’interdiction des trottinettes électriques en libre-service à Paris a été votée par référendum, mettant à mal tout un pan du business des mobilités douces. Comme le remarquait le media Challenges, cette décision est un “lourd revers” qui va au-delà de l’impact purement symbolique. On estime que ces trottinettes représentaient un chiffre d’affaires annuel de près de 60 millions d’euros dans la capitale pour les entreprises les commercialisant.

Ces entreprises justement, il en est un qui les connaît comme sa poche. Driss Ibenmansour a été Operations Manager chez Uber, avant de travailler pour des entreprises de vélo et trottinettes en free-floating (il fut notamment directeur général France de Bird)… puis de créer Motto, sa propre startup de vélos urbains à Paris et en première couronne.

Louer un vélo électrique au mois pour se déplacer en ville

Motto ne risque à priori pas de subir la moindre interdiction. Sa petite particularité, c’est précisément de proposer des vélos électriques qui ne sont pas en libre-service mais loués au mois, moyennant 79 euros. Un modèle économique étonnant, imaginé avec les deux autres cofondateurs, Pierre-François de Rougé et Antoine Bouttier.

"Mes expériences professionnelles chez les géants du secteur, raconte Driss Ibenmansour à Maddyness, m’ont permis de me rendre compte de deux choses. Déjà, de l’explosion du vélo électrique comme une véritable alternative aux voitures et véhicules polluants. Ensuite, du trou dans la raquette existant entre le modèle de propriété traditionnel, c’est-à-dire posséder son propre vélo, et les modèles de vélos en libre-service en ville.".

La souscription s’est imposée pour eux comme une troisième voie. L’avantage ? "La légèreté d’esprit", assure le cofondateur et CEO de Motto. "On a le sentiment d’être propriétaire de son vélo, mais en même temps sans la contrainte de devoir trouver un réparateur, payer au moindre accroc, explique-t-il. On ne vend pas seulement un produit mais un service.".

Une liste d’attente de plusieurs milliers de parisiens

En avril 2021, un premier test a été effectué (la startup se nommait alors Bloom) avec une flotte de vélos achetée auprès d’un fournisseur. "Il y a tout de suite eu un super engouement, se souvient Driss Ibenmansour. On avait une liste d’attente de plusieurs milliers de personnes.". Parce qu’ils ne trouvaient pas de vélos adaptés à leurs besoins sur le marché, comprendre un vélo esthétique mais surtout solide et avec une batterie qui tienne la route, l’équipe a finalement conçu son propre deux roues, sorti un an jour pour jour après le premier test.

A ce jour, Motto compte plus d’un millier d’utilisateurs quotidiens, qui utilisent en moyenne leur vélo trois fois par jour. "C’est un vrai substitut à leur ancien mode de transport, la plupart du temps les transports publics qui sont sur-congestionnés depuis le Covid, ou la moto, depuis le passage au parking payant à Paris pour leurs utilisateurs…, explique Driss Ibenmansour. Plus de la moitié de nos utilisateurs ne faisait pas de vélo en ville avant.".

15 % de croissance par mois

La startup qui a déjà levé 6 millions d’euros depuis sa création, enregistre une croissance importante. Alors qu’elle vient de sortir deux versions améliorées de son ancien vélo, elle gagne 15 % d’utilisateurs chaque mois… et espère en séduire encore beaucoup. "Notre devise pour le moment c’est un peu “le plus, le mieux”, raconte le cofondateur de Motto. On a un boulevard devant nous.".

À Paris en effet, outre l’interdiction des trottinettes en libre-service, plusieurs décisions de la mairie font de la capitale “une ville de plus en plus accueillante pour les vélos”. Le nombre de pistes cyclables augmente, avec notamment la pérennisation des “coronapistes”. Les aides financières à l’achat d’un vélo électrique donnent un coup de boost, tandis que le nombre de parkings dédiés aux vélos devrait être multiplié par 10 d’ici 2024. On assisterait ainsi à un “consensus général” sur les mobilités douces, alors que Paris, où le vélo ne représente encore qu’entre 3 et 5 % des déplacements contre 30 à 40 % à Amsterdam ou Copenhague, a longtemps été à la traîne…

Une fois la capitale conquise, Motto compte ensuite s’établir ailleurs en France, à Lyon sans doute, puis dans d’autres grandes villes européennes. "On n’a du tout pas le sentiment d’aller à contre-sens de l’histoire", plaisante Driss Ibenmansour, très optimiste sur l’avenir du vélo en ville.