Générer du contenu pour rédiger un livre, un script de film, un discours, développer des lignes de codes ou pourquoi pas même écrire un article de presse … Le tout sans la moindre intervention humaine. C’est désormais possible grâce à ChatGPT et son intelligence artificielle. Ce modèle de langage s’adapte à la demande et au style attendu pour écrire seul un contenu convaincant. Et le résultat a de quoi en bluffer plus d’un au point que les experts s’interrogent sur les risques véhiculés par cette nouvelle intelligence capable d’écrire comme un humain.

" La manipulation de l’opinion m’inquiète mais ça a déjà commencé et c’est pour cette raison que l’Etat a créé VIGINUM (service technique et opérationnel chargé de la vigilance et de la protection contre les ingérences numériques étrangères ndlr) ", souligne Gilles Babinet, co-président du Conseil national du numérique.

Pour autant, même si l’expert ne manque pas d’associer les risques qui se présentent aux opportunités qui les accompagnent, il se positionne dans le camp des partisans du ChatGPT. " En France, nous avons tendance à plus craindre le risque qu’ailleurs. Quand on a inventé l’électricité, la machine à vapeur, la voiture … Il y a eu du danger, des risques et même des morts mais on apprend. Les gens touchent l’IA du doigt et se montrent méfiants. J’encourage à un grand plan d’éducation populaire national sur le sujet pour en débattre, expliquer, apprendre, lutter contre la désinformation… Il ne faut pas se priver de la technologie pour lutter contre le risque. " .

Europe VS Etats-Unis

Pour Gilles Babinet, le temps contribuera à instaurer " un code de la route, des panneaux… Il faudra au moins 60 ans pour y parvenir correctement, avec un accompagnement. Vouloir tout réglementer immédiatement serait une erreur. "

Loin de vouloir laisser l’intelligence artificielle et ChatGPT grandir sans contrôle, le co-président du Conseil national du numérique prône un équilibre entre régulation et innovation. " S’il n’y a pas assez de règles, on aboutit à l’anarchie que l’on rencontre sur les réseaux sociaux mais trop de règles pourraient étouffer la liberté d’expression et l’innovation au point de pousser les talents vers les Etats-Unis ou ailleurs. ".

A l’heure où la Commission européenne planche sur un texte particulièrement contraignant tout comme le Parlement européen, qui vient de voter en faveur d’un projet de régulation du secteur,  et que le Conseil européen s’attache lui aussi à imaginer une feuille de conduite pour le ChatGPT et l’IA, Gilles Babinet souhaiterait une réflexion plus globale. " Il faut des règles les plus supranationales possibles. L’approche du G7 me semble la bonne. Je crois que l’IA React arrive trop tôt. ". Le spécialiste rappelle que sur les 13 licornes génératives d’intelligence artificielle dans le monde, aucune n’existe en Europe, alors qu’elles ont majoritairement vu le jour aux Etats-Unis.

" Avec ChatGPT, on remet les compteurs à zéro en quelques sortes sur ce sujet. Il ne faudrait donc pas mettre une enclume au pied des européens. Nous avons une opportunité historique, il faut s’en saisir. ". Gilles Babinet reconnait toutefois qu’aux Etats-Unis, les financements s’avèrent plus accessibles et les mentalités plus favorables à l’entrepreneuriat.