Alexandre Malsch n’est pas le même homme que lorsqu’il avait lancé Melty en 2000. De manière assez symbolique, ce média de référence pour les 15-34 ans a été créé alors qu’il avait 15 ans… et il l’a quitté à presque 34 ans (32 précisément), en 2017. À ce stade, l’entrepreneur n’avait jamais connu le monde des grandes entreprises, il n’avait jamais tenu d’autre poste que celui de PDG.

Il décide donc de passer de l’autre côté de la barrière en acceptant de diriger les activités digitales monde du groupe Boardriders quelques mois plus tard (et de ses marques de vêtements dédiés au surf et snowboard Quicksilver et Roxy). Ce passionné de surf pouvait difficilement passer à côté de cette offre qui lui permettait en plus d’avoir son bureau à cinq minutes des plages de Saint-Jean-de-Luz. Il le décrit encore aujourd’hui comme le job de ses rêves.

Alexandre Malsch l’avait pourtant annoncé dès le début : il ne resterait que trois ans. Il pressentait les dangers qui accompagnaient un poste confortable et bien payé. Il ne voulait surtout pas se laisser aller à une forme de facilité avec le risque de voir son envie d’entreprendre s’éroder au même rythme que son réseau parisien. Il a donc décidé de capitaliser sur tout ce qu’il a appris au sein de Melty et de Boardriders pour écouter la petite voix dans sa tête qui l’exhortait à entreprendre à nouveau. Le résultat s’appelle Fulllife.

Fulllife, une marque pour accompagner l’essor du e-sport

Pour retourner aux origines de Fulllife, il faut revenir à l’aventure Melty. Alexandre Malsch était passionné de jeu vidéo et suivait la montée du e-sport. « On a été un des premiers en France vers 2013 à dire qu’il fallait professionnaliser le e-sport et rémunérer les joueurs, se rappelle-t-il. On avait d’ailleurs créé une équipe nommée le Melty eSport Club. »

Déjà à l’époque, Alexandre Malsch se désole de voir que les produits de merchandising autour du jeu vidéo sont à des années-lumière de la qualité de ceux d’autres sports comme le football ou le golf. Il avait déjà tenté à cette époque de créer une marque de vêtements, mais s’était découragé face à la complexité de la tâche. Melty était un média après tout. Son passage chez Boardriders lui a permis d’acquérir toutes les compétences nécessaires pour s’attaquer à ce défi. Il se lance sur l’aventure Fulllife en septembre 2020.

Mais, il fallait s’y attendre, Alexandre Malsch ne pouvait pas lancer une marque de vêtements comme les autres. Reprenant les codes du jeu vidéo, il propose une expérience gamifiée où les clients gagnent des récompenses et débloquent des objets rares ou légendaires. Fulllife vient aussi développer une histoire autour de l’expérience de shopping.

Les produits vendus sont issus du Fulllife Universe, un monde virtuel depuis lequel ils sont envoyés dans une capsule qui peut atteindre le monde physique. Les clients reçoivent ainsi leurs vêtements dans un packaging à la forme assez unique, recouvert de nombreux détails du monde du gaming. Inspiré par la culture de Disney qui consiste à mettre un soin infini dans les détails, Alexandre Malsch veut dépasser les attentes de ses clients en ajoutant de nombreux « easter eggs » à ses produits.

L’entreprise est actuellement sur un rythme de 100.000 pièces vendues par an et devrait atteindre les deux millions de chiffre d’affaires à la fin de l’année.

Le fil rouge de la carrière d’Alexandre Malsch

Melty et Fulllife pourraient être deux aventures diamétralement opposées, et pourtant, après une heure d’interview, le fil rouge de ces deux expériences apparaît enfin : Alexandre Malsch prend très au sérieux des sujets qui sont considérés comme futiles par tant d’autres.

« Beaucoup de gens, et notamment certains médias bien pensants, critiquaient à quel point le contenu de Melty était futile. Mais je pense que c’était absolument nécessaire, dans la vie des gens, d’avoir un média qui prenait au sérieux les sujets qui les passionnent… à une époque où ils étaient traités de manière condescendante partout ailleurs »

Il en veut pour preuve une anecdote datant du 13 novembre 2015. Ce soir-là, c’est la finale de Secret Story. Une réalité totalement éclipsée par les attentats du Bataclan. Les équipes de Melty appellent Alexandre Malsch pour lui signifier qu’il fallait absolument que Melty parle des attentats. « Je leur ai dit : on ne va surtout pas en parler. Notre travail, c’est de divertir les gens. C’est de parler le plus sérieusement possible du monde du divertissement »

Le média va mettre un bandeau noir en haut de sa page d’accueil à la place du vert fluo habituel, redirigeant ses lecteurs vers Lemonde.fr pour suivre les événements du Bataclan. Puis la rédaction a continué de couvrir la finale de Secret Story comme elle l’aurait fait habituellement.
« De 22:00 à 01:30 du matin, il n’y avait personne sur Melty. Il devait y avoir 200 jeunes, se rappelle Alexandre Malsch. Puis à 02:00 du matin, on a pété notre record d’audience avec 1,5 million de connexions. Ce qui s’est passé, c’est que l’ensemble des jeunes et moins jeunes de France ont été sur les chaînes d’infos pour se renseigner sur cet événement terrible, et c’est normal. Mais au moment de se coucher, tous ces gens se sont dit : il faut quand même que je me change les idées, et ils ont été voir le média qui parlait le plus sérieusement d’un sujet complètement inutile. On a joué notre rôle en les divertissant »

De la même manière, le monde des jeux vidéos et sa culture sont souvent considérés comme très secondaires et futiles par de nombreuses personnes. Pour d’autres, il s’agit de la chose la plus importante de leur quotidien… c’est à eux que Fulllife s’adresse.