Il y a un an, le collectif Sista, qui œuvre pour réduire l’écart de financement entre les hommes et les femmes entrepreneures, lançait un fonds d’investissement avec l’appui de 50 Partners. Sobrement baptisée Sista Fund, cette nouvelle structure a vu les choses en grand d’entrée de jeu en dégainant un premier véhicule d’investissement qui vise un closing final de 100 millions d’euros.

Après un premier closing à 30 millions d’euros, le fonds espère franchir un nouveau cap d’ici le premier trimestre 2024 avant d’atteindre sa taille finale en février 2025. Après avoir amorcé la mise en orbite du Sista Fund, Tatiana Jama, la co-fondatrice du collectif Sista, a décidé de s'appuyer sur Isabelle Drault Gallo, un visage familier du capital-risque en France puisqu’elle a passé sept ans au sein de Breega, pour poursuivre son développement. «J’étais la plus ancienne employée de Breega au moment de mon départ. Quand je suis arrivée, Breega avait 45 millions d’euros d’actifs sous gestion, contre 500 millions maintenant», indique-t-elle à Maddyness.

Dans ce fonds positionné sur le segment early-stage, Isabelle Drault Gallo a gravi les échelons, faisant notamment ses armes en misant sur Exotec bien avant que ce spécialiste nordiste de la robotique ne devienne une licorne. Elle a également piloté l’ouverture du bureau barcelonais de Breega et dirigé son fonds de Venture en Europe doté de 150 millions d’euros. Après avoir acquis une expertise sur des verticales comme la fintech, l’assurtech ou encore la regtech, cette figure de l’investissement dans la French Tech a conclu son parcours chez Breega avec une vingtaine d’investissements et trois exits à son actif.

«Si on veut changer les choses, il faut un enjeu économique derrière»

Forte de cette expérience, elle a décidé de se lancer dans un nouveau défi avec le Sista Fund après avoir été bénévole chez Sista, en charge des relations avec les VC. «Ça m’a donné envie de quitter mon confort de Breega pour retourner dans une sorte d’aventure entrepreneuriale», nous confie Isabelle Drault Gallo depuis Barcelone où elle est basée. L’occasion pour elle de continuer à identifier des pépites tout en ayant encore plus d’impact sur la French Tech, alors que les femmes sont encore beaucoup trop sous-représentées dans l’écosystème. France Digitale a d’ailleurs rappelé cette année que seulement 1 CEO sur 8 est une femme. Dans la même veine, 1 salarié sur 3 est une femme et 1 manager clé sur 4 est une féminin dans la tech française. Des chiffres édifiants confirmés par le récent rapport sur l’invisibilité des femmes dans la tech du Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes.

Par conséquent, Isabelle Drault Gallo estime qu’elle a un rôle essentiel à jouer au sein de Sista Fund. «Je veux montrer que la diversité est un gage de performance. Elle conduit à une performance supérieure à la moyenne des fonds. Mais pour faire bouger les lignes, c’est un peu comme le climat. Si on veut changer les choses, il faut un enjeu économique derrière. C’est pareil en matière de diversité», explique-t-elle. Par conséquent, le fonds se montre exigeant dans son approche. «Nous sommes là pour mieux accompagner les femmes et s’assurer qu’elles aient tous leurs moyens à leur disposition pour superformer. Cela passe par une sélection très forte à l’entrée», ajoute la Managing Partner. A noter que la capitalisation d’une startup doit être détenue au minimum à 30 % par une femme pour être éligible à un financement du Sista Fund.

6 investissements en un an

Mais si le postulat féminin du fonds est clairement assumé, il n’est pas question pour celui-ci de jouer les seconds couteaux dans les tours de table early-stage, alors qu’il injecte des tickets compris entre 250 000 et 3 millions d’euros dans le cadre d’opérations qui vont du pré-seed à la série A. «Si c’est juste pour faire du follow-up dans l’ombre de gros fonds, ça ne m’intéresse pas», confirme d’ailleurs Isabelle Drault Gallo. Avant d’ajouter : «Ce qui change en ce moment, c’est que les institutionnels s’intéressent vraiment au sujet : ils se disent prêts à investir dans des fonds comme nous. Avec 100 millions d’euros, nous avons davantage la possibilité de pouvoir mener des tours de table.»

Avec son approche qui détonne dans le paysage du capital-risque français, le Sista Fund a d’ores et déjà réalisé 6 investissements (The Exploration Company, Astran, Vizzia, Underdog…). Ciblant des verticales comme la fintech, la santé, la deeptech, le future of work, le climat ou encore la cybersécurité, la structure espère poursuivre sa montée en puissance dans les prochains mois, en dédiant 60 % de ses investissements à l’Hexagone. «Dans ce climat macro-économique, les fonds qui peuvent tirer leur épingle du jeu, ce sont les fonds capables de démontrer de la performance et les fonds qui ont un angle un peu particulier», conclut Isabelle Drault Gallo.