L’industrie de la mode, probablement sous l’impulsion des consommateurs, semble avoir pris la mesure de la nécessité de devenir écoresponsable et durable. Dans un premier temps, cette prise de conscience a donné lieu au développement de l’économie circulaire, portée par de jeunes pousses devenues grandes telles que Vinted ou Vestiaire Collective. Pour faire face, de grands groupes textiles, comme SMCP (Sandro, Maje, Claudie Pierlot), se sont d’ailleurs lancés sur ce segment de l’économie circulaire en intégrant à leurs offres un service de revente de vêtements d’occasion.

Plus récemment, la sustainable fashion a basculé dans une nouvelle ère : le développement de solutions digitales ou textiles rendant plus écoresponsable l’industrie de la mode de première main, notamment via la décarbonisation. Les sociétés qui développent ces solutions sont généralement fondées sur un modèle BtoB avec des problématiques technologiques ou industrielles fortes. En effet, les solutions développées devront s’intégrer dans les procédés industriels des acteurs traditionnels ou alors s’appuieront sur de tous nouveaux procédés industriels verts.

A titre d’exemple, Carbonfact a développé une solution SaaS permettant de calculer l’empreinte carbone à travers l’analyse du cycle de vie (ACV) et est actuellement déployé chez certaines marques françaises telles que Sézane. La marque doxa. a, quant à elle, décidé d’éradiquer de sa production la teinture chimique au profit d’une teinture végétale complètement décarbonisée.

Des investissements pour réinventer la filière textile

Du fait même de leur modèle économique et des aspect industriels, les financements de ces sociétés devraient différer de leurs grandes sœurs de l’économie circulaire. Elles seront probablement plus dépendantes des acteurs traditionnels de l’industrie de la mode, que ce soit pour leurs débouchés, des partenariats ou leur financement capitalistique. S’agissant de celles fondées sur un outil industriel propre, elles auront des besoins capitalistiques importants et des cycles longs qui ne sont pas toujours compatibles avec les contraintes des fonds de capital-risque traditionnels.

Des géants de l’industrie textile ont donc naturellement décidé de prendre le pas de l’investissement dans le secteur en créant leurs propres corporate venture, comme LVMH Luxury Ventures ou H&M Group Ventures. Des fonds d’investissement spécialisés tels que Collateral Good Ventures Fashion I ou Experienced Capital se sont également lancés. Tous ces acteurs entendent, par leurs investissements, permettre la réinvention de la filière textile et ainsi encourager une consommation écoresponsable et durable, certains anticipant 20 à 30 milliards de dollars d’opportunité d’investissement annuel mondial dans l’innovation textile et digitale pour parvenir à un changement radical en matière de mode durable. Outre l’investissement, les collaborations entre acteurs traditionnels et startups peuvent offrir des alternatives de financement avec un partage des risques et des débouchés pour la technologie.

Par ailleurs, s’agissant d’outils industriels, la politique d’Etat ainsi que les soutiens locaux seront également des facteurs importants de succès. French Tech 2030 place notamment au cœur de son programme la promotion de l’industrie verte. Il faut espérer pour cet écosystème que cela portera ses fruits. Ainsi, espérons que dans les années à venir, certaines de ces jeunes sociétés auront prouvé leur modèles et parviendront au statut de licornes comme leurs grandes sœurs de l’économie circulaire avant elles !