Groupama est un groupe mutualiste avec une organisation spécifique qui correspond à ce statut. Les investissements se font au sein de la direction financière qui est logée dans l’organe de tête du groupe, et à qui les différentes filiales délèguent leur gestion d’actifs. La société de gestion Groupama AM gère les actifs cotés. Maddyness a rencontré Régis Gaisnon, responsable private equity & infrastructure, et Pierre-Hubert Perromat, directeur gestion des placements financiers de Groupama, dont l'équipe gère, elle, les investissements non cotés.

Les actifs du groupe représentent 67 milliards d’euros, parmi lesquels 900 millions d’euros sont investis dans le private equity. « Nous visons entre 2 et 3% d’investissements dans les actifs non cotés. Cette part avait diminué, car après 2011, Groupama avait décidé de significativement réduire son risque, mais depuis 2018, les investissements dans le non coté ont repris. Des efforts significatifs ont été fournis jusqu’en 2022, et depuis le rythme d’investissement est revenu à la normale », confie Pierre-Hubert Perromat.

Investir les fonds d’un groupe mutualiste

« Nous investissons les fonds propres du groupe. Comme nous sommes un groupe mutualiste, ces fonds propres appartiennent aux clients sociétaires du groupe. Les fonds peuvent aussi provenir de l’assurance vie, mais de la même manière, nous investissons pour le compte d’épargnants », explique Pierre-Hubert Perromat. « Nous avons donc une responsabilité quand nous investissons : nous devons garantir des investissements sûrs et de la performance sur le long terme. Cette responsabilité nous amène à faire des choix d’investissement et à être extrêmement sélectifs pour offrir aux épargnants le meilleur rapport rendement/risque », partage-t-il.

Pour cette raison, Groupama, en tant que Limited Partner, a adopté un profil de risque équilibré. « Quand nous investissons dans des actifs risqués, nous sommes non seulement extrêmement sélectifs, mais en plus de cela, nous croisons cette exigence avec la construction d’un portefeuille diversifié », poursuit Pierre-Hubert Perromat. « Nous travaillons sur des modèles d’allocation d’actifs au sein desquels nous instruisons la sélection de fonds, afin de construire des portefeuilles diversifiés et résilients sur le long terme, au travers des cycles économiques », ajoute Régis Gaisnon.

La diversification, pierre angulaire de la résilience

Pour Groupama, l’un des principaux axes de diversification est la diversification géographique. Le groupe combine des investissements domestiques, français et européens, qui représentent deux tiers des investissements. Le reste est investi en Amérique du Nord, et à la marge, en Asie. « Nous prenons part aux initiatives Tibi, pour financer la French tech et l’écosystème tech européen, mais nous combinons cela à d’autres expositions », commente Régis Gaisnon.

Au sein du private equity, la stratégie d’investissement comprend quatre blocs distincts, dont la pondération correspond en partie aux tailles de marchés. Le LBO et le capital-transmission constituent la principale poche, suivi de près par celle du capital-développement. Le Venture Capital, représente, lui, une poche plus petite, dont l’objectif principal est la diversification. Groupama a notamment investi dans les fonds de NCI et dans Blackfin. Le quatrième bloc correspond à la dette mezzanine. « C’est la combinaison de ses stratégies d’investissement qui nous permet de construire un portefeuille résilient », insiste Régis Gaisnon.

« Quand on regarde de façon globale, les performances du private equity sont plus lissées et moins volatiles que celles du coté. En revanche, quand on regarde fonds par fonds, la dispersion de performances et beaucoup plus importante sur le private equity », partage Pierre-Hubert Perromat. « Sur le non coté, le travail de sélection est donc encore plus fondamental. Or, par essence, il est plus difficile que sur le coté, car la nature privée de ce marché rend l’accès à l’information et les due diligences plus compliqué », ajoute-t-il.

La sélectivité comme maître-mot

En tant que LP, Groupama a donc mis en place une méthode de sélection reposant sur des critères précis. Le critère le plus pondéré est celui du track record de la stratégie. « Hormis quelques exceptions, nous n’investissons pas dans des “first-time fund” ou des “first-time teams” », commente Régis Gaisnon. Les investisseurs regardent aussi attentivement l’expérience de l’équipe d’investissement. « Nous sommes très vigilants aux qualités des investisseurs et à la manière dont les équipes fonctionnent ensemble. Quand nous prenons un engagement dans un fonds de private equity, cela peut être pour une dizaine d’années, nous avons donc besoin de vérifier à l’entrée la résilience de l’équipe de gestion », précise Régis Gaisnon. 

Groupama tient aussi compte de la qualité de la société de gestion, et privilégie des sociétés de gestion établies avec des équipes support solides. Enfin, le Limited Partner étudie le marché sur lequel se positionne la stratégie d’investissement et les opportunités qu’il présente. Le portrait type du fonds idéal pour Groupama est un fonds avec quelques verticales d’investissement spécifiques, certaines offensives comme la tech et des plus défensives comme la santé.

À tous ces critères, s’ajoute celui de la compatibilité de la stratégie d’investissement avec la transition écologique et sociale. Sur cet aspect, Groupama a mis en place une grille de notation spécifique pour évaluer, par exemple, les pratiques d’investissement, les capacités de reporting ou la présence de personnes dédiées à l’ESG. « Le fonds doit respecter nos critères d’exclusion et avoir une démarche ESG. En dehors de ces critères rédhibitoires, il n’y a pas de note minimum à obtenir, mais si la société de gestion est mal évaluée en matière d’impact, cela détériore sa note globale », commente Pierre-Hubert Perromat.