Retrouvez chaque semaine pendant l’été notre série : “Ma startup sur les marchés de France”.[hr]

Bientôt 2000 km au compteur, je les attendrai la semaine prochaine avec ma "trotteuse". Cette semaine, j'arrive à planter mon drapeau à Toulouse, Sète, La Grande Motte, Saintes Maries de la Mer, La Ciotat et Cavalaire-sur-mer ! Dans cette dernière ville, je tombe par hasard sur la parade militaire du 15 août à l'occasion de la commémoration du débarquement Alliés en Provence en août 1944. Comme tous les spectateurs présents, je suis envahi par le doux sentiment de liberté; celui de pouvoir, soudainement, décider de son avenir sans aucune peur.

Mais pour moi, cette semaine, c'est à Marseille que la grande bataille aura lieu… Aussi, pour comprendre les spécificités locales de nos régions, mieux que "Bienvenue chez les Chtis" ou le JT de Jean-Pierre, je vous recommande les places de marchés. Saviez-vous, par exemple, que sur toute la côte Atlantique le placement de votre étal se fait par tirage au sort, alors que dans le Sud, il se fait "à l'ancienneté" et à "l'assiduité". Autrement dit, chaque matin avec ma jeune entreprise, au moment du verdict, je ne fais pas le poids au pays des cigales. Surtout que "l'assiduité" dans le Sud ça veut dire "à la tête du client"... Qu'à cela ne tienne, négocier avec les placiers du marché, c'est un peu comme convaincre un futur investisseur. Comme le business angel, il cherche à diversifier son portefeuille de produits; il veut faire le plein de bonnes idées, non?

Et puis à Marseille, j'y ai fait mon école de commerce (KEGDGE ex Euromed-management) : tout un symbole. Je devais donc d'aller prouver que j'avais gagné ma liberté depuis l'époque confortable des études ! A l'époque, je voyais les études et les concours comme un moyen de gagner un statut et de la reconnaissance. Aujourd'hui, seul avec mes compétences naissantes d'entrepreneur, je me rends compte que la réussite vient d'abord de soi.

MARSEILLE : Lever 5h30, depuis un camping bien situé dans Cassis.

Je rejoins le marché, avenue du Prado. Les placiers sont bien là mais... avec l'accent chantant, on m'explique qu'aujourd'hui est un jour spécial et que le placement se fait librement. Enfin librement... "après que les plus anciens et les plus assidues se soient placés" me répète-t-on comme un dicton. Je suis à deux doigts de laisser la colère me submerger, de plier bagages et de remonter illico dans mon char.

Mais la nécessité de revenir en conquérant dans cette ville est trop forte. Alors qu'il m'arrive parfois de dormir dans ma voiture pendant ce périple, je pense à la vie confortable que j'avais alors, lorsque j'étais cet étudiant en école de commerce. Des bancs cirés de l'école je trouve aujourd'hui les trottoirs cabossés des marchés, des cours magistraux de professeurs Es sciences éco, j'ai droit aux aboiements des camelots de quartiers. Et ce ne sont pas des bureaux climatisés et aseptisés qui m'entourent aujourd'hui, mais bien des étales branlantes et odorantes... Mais au lieu de regretter d'être riche trader à la City ou banquier, j'ai l'impression d'être dans le vrai.

Dans la cité phocéenne, je parviens finalement à obtenir une petite place de 80cm pour mon étal au lieu du mètre cinquante que j'arrive souvent à négocier. Au Cap Ferret, ou encore à Royan, on m'avais gracieusement donné près de deux mètres, un luxe !

Le lendemain, direction Saint-Tropez où, paraît-il, je n'ai aucune chance de déballer ! Sur ce marché, il faut être sur "la liste". Celle qui place dans les premiers les plus assidus, et donc ceux qui déballent aussi l'hiver. Ce système bien rôdé permet à la petite cité star de rester dynamique, même pendant la saison morte.

Ainsi va ma route: Déballer, vendre, remballer, partir, rencontrer, découvrir et recommencer. Ma boîte prend forme et finalement moi aussi. Choisir de vivre de sa propre activité, c'est accepter de se mesurer à soi-même. Très vite, on est obligé de repousser ses apriori et ses craintes. Au final, c'est ainsi que l'on se découvre, se réinvente et que l'on se crée.

(Musique: Give me reason - Tracy Chapman - The tailors remix)

To be continued : Episode 5

Previously on “My Startup sur les marchés de France”

[Série de l'été] Episode 3 : Le grand saut

[Série de l'été] Episode 2 : En attendant Lionel Jospin

[Série de l'été] Episode 1 : La Couarde, la peur…

[Série de l'été] Préambule : Ma startup à la conquête du monde via la place du marché