Ne devrait-on pas plutôt parler d'intelligence étendue plutôt que d'intelligence artificielle ? C'est en tout cas ce que pense Eytan Messika, cofondateur du courrier international de la tech Tech Crush. Le terme, encore peu connu de l'écosystème entrepreneurial, représenterait une transition des mentalités vers une une acculturation réelle autour de l’IA, mais aussi de nuancer le terme d’intelligence “artificielle”. Ce terme qui fait si peur aux professionnels.

C’est une réalité. Les plus brillants ingénieurs de la Valley travaillent sur la nouvelle génération de voitures autonomes chez Tesla, perfectionnent une nouvelle facette de la théorie des jeux chez Google Brain, ou encore s’appliquent à réinventer le concept même d’appartenance sociale à l’instar de Sophia, le premier robot à obtenir la citoyenneté en Arabie Saoudite.

Si ces exemples sont de merveilleuses applications de l’IA, elles entretiennent une perception perverse de cette dernière. “L’IA ce sont les robots, l’IA ce sont nos suppléants et bientôt nos remplaçants“. L’IA ce n’est pour le moment rien de tout ça. Comment expliquer encore qu’aujourd’hui 42% de la population dit craindre l’IA quand ses trois plus grandes applications sont les spams filers, le pré-fill de google et les recommandations de produits sur plateformes ?

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Cette peur est probablement due à une méconnaissance réelle de ce qu’est et de ce qu’implique une intelligence artificielle à court terme. Et le même phénomène sévit en entreprise. Aujourd’hui le monde corporate ne cesse de parler de stratégie “data”, de transformation digitale : “bah alors les gars ça en est ou sur la transfo, on doit être op dès demain sur les nouveaux outils de notre nouvelle strate connectée” Stop! Vous ne dupez personne avec vos grands mots tout réchauffés du meeting de la veille, une stratégie data c’est simplement une réponse à la question du moteur de certaines prises de décisions qui à l’époque étaient constituées d’un mélange d’intuition et de feedback téléphonique et qui aujourd’hui s’appuient sur un feedback bien plus intéressant qui est le comportement utilisateur réel en ligne. C’est donc une stratégie tout court.

Quand on parle de transformation digitale, on pense souvent à un process de digitalisation de points de ventes ou d’automatisation de taches mais c’est avant tout une transformation mentale. Sur des cas d’utilisations en entreprises, j’aime beaucoup utiliser le terme “d’intelligence étendue” pour désigner justement ce besoin de mutation. J’ai entendu ce terme pour la première fois lors de ma rencontre avec Maurice Ndiaye, Partner chez Synomia, une startup incroyable, qui commercialise Tile, une plateforme d’IA permettant de détecter et exploiter toutes les opportunités liées à un marché quelqu’il soit. C’est une véritable marketplace de services et d’outils pour néophytes et managers du quotidien qui a convaincu de grosses pointures de l’industrie comme Orange, EDF, Vivendi ou encore Total. J’aime beaucoup cette approche “d’intelligence étendue” parce qu’elle est permet non seulement une transition digitale des mentalités actuelles vers une une acculturation réelle sur ce que peut apporter l’IA sur toute la chaîne mais aussi parce qu’elle permet de nuancer le terme d’intelligence “artificielle”. Ce terme qui fait si peur aux professionnels.

Cette approche pédagogique est pour moi le levier le plus important vers un nouvel espace d’opportunités dans l’industrie française. Cette approche pédagogique est partagée par quelques autres startups, dont Toucan Toco, qui commercialise une plateforme qui automatise la tache fastidieuse du reporting en injectant une pédagogie incroyable dans leurs pratiques de data visualisation. Rien qu’à regarder leurs track record, ça donne le tournis. Un conseil pour vendre, avant de parler de transformation, parlez de transition et d’acculturation. Personne n’aime le changement, surtout pas à cette allure.