Je ne suis pas une lève-tôt. Je ne trouve pas les matins revigorants, je ne fais pas de yoga au lever du soleil, je ne lis pas le journal installé dans un coin tranquille ou ne sirote pas un café pendant que je trie mes mails. Je hais tout ça. 

Jusqu’à très récemment, je ressentais une sorte de honte vis à vis de ça. Après tout, mon mari se levait à 5h30 tous les matins. Avant qu’on se lève avec ma fille, il avait déjà fait sa séance de sport et répondu à ses mails. Moi, de mon côté, je me réveillais aux alentours de 7 heures, misérable, et préparais ma fille pour l’école dans une attitude nonchalante. 

Mon mari était sûr que si j’essayais de me lever tôt, j’adorerais ça. Je serais tellement productive ! J’ai acheté une lampe SAD pour tromper mon horloge interne, écouté le bruit de la pluie en musique pour m’endormir plus tôt et avoir un sommeil profond. 

Finalement, après avoir réalisé à quel point j’étais mal, nous avons décidé de respecter nos modes de fonctionnement personnel. Maintenant, mon mari se lève avec ma fille et la dépose à l’école le matin. De mon côté, je me lève à 10 heures et je la récupère le soir. Ce changement a fait des miracles. Je passe mes après-midis avec ma fille, mes soirées avec mon mari et j’écris jusqu’à une ou deux heures du matin avant d’aller me coucher.

Mon mari est aussi productif qu’il le voulait tandis que je bénéficie du repos dont j’ai désespérément besoin le matin. Mais dans un pays qui est obsédé par la supposé supériorité des “lève-tôt”, personne ne veut entendre que tu peux être excellent au travail en te levant en milieu de matinée. 

C’est pourquoi j’étais si heureuse de voir la pièce de Marine Koren, The Atlantic cette semaine, dans laquelle elle contredit cette injonction. “Les hommes possèdent toute une gamme de prédispositions technologiques qui rendent certains d’entre nous totalement inutiles le matin et particulièrement efficaces le soir” “écrit-elle. “Veiller tard pourrait être préférable pour certains mais cela signifie que l’on est incapable de faire son travail dans les temps dans l’imaginaire collectif”.

En fait, une étude de 2014 a montré que “les employés qui commençaient plus tôt le matin étaient considérés comme plus consciencieux par leur hiérarchie et avaient les rendements les plus élevés”Et c’est le problème : Il y a une mise en scène capitaliste dans cette manière dont nous vénérons les gens qui se lèvent tôt. L’idée que notre journée devrait être remplie à ras bord touche moins à notre bien-être qu’au fait de nous présenter comme de bons employés conformément à l’idée qui en est fait. 

Même les célébrités qui se vantent de faire leur gym à 3h30 du matin envoient un message clair : elles présentent leur temps comme une chose à optimiser plutôt qu’à apprécier. 

J’ai la chance de pouvoir travailler de chez moi et de partager les tâches domestiques et l’éducation de ma fille avec mon mari. Je me rends compte que tous les “oiseaux de nuit” n’ont pas la possibilité de vivre selon les horaires qui leur conviennent. Et malgré une généralisation des horaires (9 à 17 heures au bureau), il faudrait revoir et élargir la définition de la productivité et des “types” de personnes répondant aux critères d’efficacité et de réussite.

J'y réfléchirais peut-être davantage ce soir, vers 2 heures du matin, pendant que j’écrirais ma prochaine chronique sans yoga ni café pour m’aider.

 

Retrouvez l'article original : Screw Productivity Hacks: My Morning Routine Is Getting up Late