C'est l'heure du grand remaniement du côté des lobbies de startups. Plusieurs associations thématiques ont décidé de s'allier pour amplifier la voix de leurs adhérents. Du côté de l'économie sociale et solidaire, le mouvement des entrepreneurs sociaux (Mouves) a annoncé se rapprocher du réseau TechForGood France dans l'optique d'une fusion effective début 2021 ; et de celui de l'entrepreneuriat féminin, les associations StartHer et Sista fusionnent elles aussi.

" Nous avons décidé qu'il n'y avait pas de sens à avoir des initiatives séparées, et qu'unies nous aurons plus de force ", a ainsi commenté Roxanne Varza, cofondatrice de StartHer auprès de nos confrères des Échos. Même son de cloche du côté de TechForGood France : "l'idée est de combiner l’écosystème tech et celui de l’ESS, qui se parlaient finalement très peu, rassembler nos forces pour peser dans l’économie" , souligne Jessica Laik, déléguée générale de la structure. Se rassembler, fédérer pour peser davantage : c'est l'idée derrière cette reconfiguration du paysage des lobbies de startups.

Émerger au sein de la grande famille tech

Certaines associations sont bien ancrées dans le paysage, à l'instar de France Digitale, lobby tech par excellence, très actif notamment dans le milieu politique et au niveau européen. Des réseaux plus informels, comme le Galion, prodiguent un accompagnement davantage opérationnel de leurs adhérents. Mais les spécificités de certains secteurs, comme l'ESS, ou des problématiques rencontrées par les entrepreneures se retrouvent alors noyées dans le discours très générique porté par ces structures qui ont vocation à rassembler largement.

"Ce type d'association manquait dans la TechForGood et l'ESS, regrette Jean Moreau, nouveau co-président du Mouves. Le secteur pêche par manque de crédibilité et de success stories. Nous avons donc besoin de faire grandir l'écosystème, monter en compétences et peser en matière de lobbying mais en étant moins orientés hypercroissance et davantage impact." Pour étoffer son discours - et diversifier sa base d'adhérents - le Mouves s'est donc tout naturellement tourné vers TechForGood France, ouvert aussi bien aux entrepreneurs qu'aux investisseurs et aux grands comptes. Constat partagé dans l'entrepreneuriat féminin par Tatiana Jama, qui a précisé à nos confrères des Échos que la mission de la nouvelle association, regroupée sous la bannière Sista serait " de faire émerger une génération de leaders diversifiésPour y arriver, Sista a vocation à former à la fois une association, un think tank et un lobby ".

Peser dans les discussions politiques

Les deux nouveaux lobbys adoptent chacun une bannière unique - Sista d'un côté, une marque qui sera dévoilée en début d'année prochaine du côté de l'ESS - le même type de gouvernance, avec un conseil d'administration commun aux deux structures qui fusionnent, et partagent les mêmes objectifs : "fédérer, faire grandir et faire rayonner" les entreprises de la TechForGood ou les entrepreneures. Avec, de chaque côté, une activité soutenue de lobbying pour mieux intégrer leurs représentantes au sein de l'écosystème startup. "Nous avons besoin de davantage de financements et de reconnaissance des pouvoirs publics. Il faudrait faire évoluer les critères de sélection pour le Next 40 ou le French Tech 120, la mentalité sur les appels d'offres publics" , liste Jean Moreau.

Le rassemblement Mouves x TechForGood France oeuvrera donc sur deux points : augmenter les financements dédiés au secteur et agir pour modifier la fiscalité afférente. "Il n'existe aujourd'hui pas de fiscalité propre et positive afin d'inciter les entreprises à s'engager, appuie Eva Sadoun, nouvelle co-présidente du Mouves. Nous militons pour une stratégie de bonus-malus basée sur 10 critères sociaux et environnementaux ainsi qu'une TVA réduite sur les services tournés vers l’intérêt général." En matière de financements, l'association entend "travailler pour que la politique d’investissement et les marchés publics soient dirigés vers les entreprises d'intérêt général" .

Avec un programme détaillé et une légitimité accrue du fait de la fusion, l'ensemble porte-voix de la TechForGood et de l'ESS espère devenir "une voix alternative à celle du Medef, un syndicat patronal progressiste" mais aussi un "garde-fou" face à la récupération du terme TechForGood par des acteurs qui y voient davantage un concept marketing qu'un levier de changement. Gageons que Sista sera tout aussi vigilante aux intérêts de ses adhérent·e·s, forte désormais à la fois du baromètre annuel réalisé par StartHer pour mesurer les progrès qu'il reste à faire et de la charte créée par Sista pour initier le changement.