Tribunes par Arthur Quincé, Askeet
9 juin 2020
9 juin 2020
Temps de lecture : 5 minutes
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Et si les entrepreneur·e·s mettaient le cap à l’Ouest ?

Le confinement aura rendu l'entrepreneuriat en région encore plus attirant qu'avant : la nature à portée de pieds, des loyers inférieurs. Askeet a sauté le pas et raconte la vie à l'Ouest.
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Michael Martinelli

Dans le milieu des startups françaises, si les idées de génie sont aussi nombreuses que variées, la localisation géographique des potentielles futures licornes est elle, en général, assez peu originale. Elles et ils sont nombreux, parmi les entrepreneur·e·s de notre “Startup Nation”, à élire domicile dans le Silicon Sentier, ce triangle d’or parisien qui voit fleurir les startups le long des grands boulevards parisiens. 

Tous et toutes ? Pas tout à fait ! Quelques irrésistibles Gaulois (de Bretagne et d’ailleurs) font le choix d’entreprendre loin de Paris. C’est le cas d’Askeet, l’Assistant Achats qui aide les entreprises à trouver leurs prestataires et optimiser leurs achats de services. L’équipe de co-fondateurs est aujourd’hui répartie entre La Baule, où sont installés Benoît et Sébastien Chatelier, et Paris, où œuvrent Augustin de Choulot et moi-même.

Avant la crise du Covid, au vu du nombre de billets de train pris de part et d’autre, le rapport de force semblait s’établir en faveur de la capitale. Mais depuis quelques semaines, La Baule reprend des couleurs. Au point que les appels se multiplient sur les portables de Benoît et Sébastien, de la part d’entrepreneurs parisiens intéressés par un choix de vie résolument plus “West Coast” pour développer leurs projets ambitieux. 

Un tropisme qui ne date pas d’hier !

Si Paris concentre la majorité des créations d’entreprise, les startups sont de plus en plus nombreuses à s’implanter également en région. 40% d’entre elles se sont créées en Province l’an dernier d’après le baromètre BNP Paribas du moral des startuppers en France, paru en mai 2019. Un pourcentage encourageant qui laisse penser que la province est de plus en plus attractive.

En région Pays de Loire, Nantes a ainsi inscrit récemment quelques beaux noms de la “Tech” à son tableau de chasse : iAdvize, mais aussi des marques iconiques comme Faguo. Même son de cloche du côté de la capitale bretonne, Rennes, qui héberge quelques pépites telles que Klaxoon. Plus à l’Ouest encore, à Brest, West Web Valley fait grandir ses jeunes pousses à l’abri des embruns. De nouvelles recrues sont d’ailleurs attendues prochainement : Doctolib, une des plus belles startups mondiales de la medtech, prévoit d’implanter son deuxième centre régional à Nantes avec pour objectif la création de 500 emplois locaux d’ici trois ans.

Un choix de vie et une vision pragmatique de l’entrepreneuriat

Évidemment, le choix de vie est forcément un critère de décision important pour ces entrepreneurs pionniers de la conquête de l’ouest. Lancer et développer un projet entrepreneurial exige un engagement très important de la part des équipes. Pouvoir s’aérer sur le bord de mer ou s’évader en bateau le temps d’une journée dominicale fait forcément rêver. L’avènement du télétravail et le développement des solutions de travail collaboratif permettent également aux équipes de travailler avec partenaires ou collègues parisiens au moins aussi efficacement que s’ils étaient dans le 9ème arrondissement de Paris. 

Le pragmatisme enfin a pesé dans notre décision. Pour une société en amorçage, le pilotage au plus serré de la structure de coûts est une obsession : en la matière, nombre de coûts fixes et de coûts indirects sont très largement à l’avantage d’une implantation en région. L’immobilier locatif en premier chef : alors qu’il faut compter près de 500 euros par personne pour un bureau dans un espace partagé à Paris (de type co-working), la facture est trois fois moindre en moyenne à la Baule. 

Bien entendu, les aller-retours à Paris restent fréquents pour faire un point avec nos équipes parisiennes, ou rencontrer ces clients et partenaires. Mais de plus en plus de RDV peuvent se faire à distance, et le TGV permet de rejoindre la capitale très rapidement

Sébastien Chatelier

Créer un écosystème : un défi à relever !

Pour ces startups, attirer à tout prix les meilleurs talents est le principal secret de leur réussite. “Les compétences recherchées en startup peuvent être très spécifiques et techniques. La possibilité d’attirer les équipes d’aujourd’hui et de demain, dans un environnement tel que celui offert par La Baule, reste un point d’interrogation. Les filières de la région forment d’excellents talents. Mais il manque encore l’expérience. Les pouvoirs publics peuvent et doivent se mobiliser pour attirer ces talents expérimentés et nous aider à créer un début d’écosystème” constate Benoît Chatelier, également co-fondateur d’Ubeeqo, spécialise européen des solutions d’autopartage.

Un écosystème. Le mot est lâché. C’est ce qui a longtemps fait défaut à la France par rapport à ses petits camarades de jeu européens (Allemagne et Angleterre en tête). Depuis quelques années, cet écosystème rattrape son retard grâce à quelques licornes (Blablacar, Criteo, Doctolib, OVH…) qui créent des générations d’entrepreneurs expérimentés. Ce sont ces entrepreneurs expérimentés qui, en investissant ou en coachant, permettront à de nouveaux porteurs de projet de franchir les premières étapes plus rapidement. 

Si la côte attire des profils soucieux de leur équilibre vie pro-vie perso, elle doit encore convaincre plus largement entrepreneurs et investisseurs de venir y poser leurs valises. Le cercle vertueux sera alors enclenché.

Une tendance que le confinement pourrait accélérer ? 

La crise sanitaire qui a durement touché notre pays, et qui menace toujours, laissera certainement des traces. Nombreux sont ceux qui pensent que les tendances à l’oeuvre avant cette épreuve ne feront que se confirmer et accélérer dans un futur proche.

Si cela devait être le cas, alors les startups de Nantes, Rennes, Brest ou la Baule pourraient bien voir leurs effectifs gonfler dans les prochains mois. Le confinement a donné des envies d’ailleurs à certains. Il a aussi confirmé la relativité de l’intérêt, pour une équipe, de travailler 5 jours par semaine dans un même bureau. 

Dès lors, il y a fort à parier que certaines équipes pourraient mettre le cap à l’Ouest. Et elles seront accueillies à bras ouverts !

Arthur Quincé, Head of marketing Askeet