12 octobre 2020
12 octobre 2020
Temps de lecture : 3 minutes
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Taxe Gafa : 100 milliards de dollars échapperaient aux États sans accord

Les négociations pour établir une taxation internationale des multinationales du numérique viennent officiellement d’être prolongées jusqu’à la mi-2021. En l’absence d’un accord, l’OCDE estime que l’économie mondiale pourrait perdre jusqu'à 100 milliards de dollars de recettes fiscales et qu'une guerre commerciale s’installerait dans le temps.
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Un échec des discussions internationales en vue de réformer la taxation des grandes multinationales pourrait générer jusqu’à 100 milliards de dollars – 84,8 milliards d'euros – de manque à gagner pour l’économie mondiale et déclencher une guerre commerciale. C'est le montant estimé par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), dont les propos sont rapportés par nos confrères de Reuters. Cette déclaration intervient quelques semaines seulement après que Bruxelles a fortement haussé le ton vis-à-vis des Gafam (acronyme désignant respectivement Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft).

Un prolongement des négociations

Alors que le commissaire européen au Marché intérieur, le Français Thierry Breton, jugeait que ces entreprises sont "trop grosses pour ne pas s’en soucier", près de 140 pays membres de l’OCDE ont convenu de prolonger jusqu'à la mi-2021 les discussions au sujet de leur encadrement. Un calendrier retardé par la crise du nouveau coronavirus et à l'élection présidentielle américaine, et qui n'est pas du goût de l’Union européenne. L'organisation supranationale a, en effet, fait part de son intention d’implémenter d’ici à la fin 2020 une législation pour superviser l’expansion de ces géants.

Ce bras de fer dure depuis plusieurs années. Certains Gafam se sont acquittés d'amendes sur le Vieux continent, accusés de bénéficier d'avantages déloyaux en matière d'imposition vis-à-vis de plus petits concurrents – ils déclarent leurs bénéfices dans des pays appliquant de très faibles taux d'imposition, tels que l'Irlande, quelque soit le lieu où ils opèrent leurs activités. Leur gestion des données personnelles et fausses informations est également pointée du doigt. Comme le relève Reuters, la pression de l’opinion tend à s’accroître alors que la crise sanitaire et économique pèse sur les budgets nationaux.

Un accord complexe, mais dans l'intérêt de tous

Dans le cas où un accord international ne serait pas vite trouvé, de nombreux pays seront tentés de suivre le modèle de l'Union européenne consistant à appliquer temporairement des règles nationales en ce sens. Des décisions qui ne sauraient être bien accueillies par l'administration américaine, qui pourrait alors envisager des représailles afin de défendre ses fleurons nationaux. "Dans le pire des scénarios, ces conflits pourraient réduire le PIB mondial de plus de 1 %", a ainsi noté l’OCDE, qui pilote ces négociations internationales.

L'organisme note que, dans la situation inverse où les États trouveraient un compromis autour d'une taxe minimum à appliquer aux grandes multinationales, les recettes fiscales issue de l'imposition de ces dernières augmenteraient de 1,9 à 3,2 % – soit un montant compris entre 50 milliards et 80 milliards de dollars par an, qui pourrait atteindre les 100 milliards si l'on y ajoute la taxe américaine existante sur les bénéfices réalisés par ces groupes à l'étranger. Plusieurs pays commencent déjà à imaginer des sanctions spécifiques aux Gafam, dont le démantèlement a pu être évoqué dans les cas les plus extrêmes. Dernièrement, le rachat de l'application Instagram par Facebook a ainsi été remis en cause par des élus américains.

En France, le Parlement a adopté une taxe visant à imposer les géants du numérique à hauteur de 3 % du chiffre d'affaires qu'ils réalisent dans l'Hexagone. Si cette décision n'a pas manqué de déclencher la colère des Etats-Unis, le gouvernement tient le cap. "Le constat est très clair. Les Etats-Unis ne veulent pas de taxation digitale à l'OCDE. Donc ils multiplient les obstacles qui nous empêchent de parvenir à un accord, alors même que le travail technique est fait", avait déclaré début septembre à Reuters Bruno Le Maire, le ministre de l'Économie, des Finances et de la Relance.