30 novembre 2020
30 novembre 2020
Temps de lecture : 4 minutes
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Les startups renouvellent la manière de faire du mécénat

Porté jusque-là par des entreprises aux modèles plus traditionnels, le mécénat accueille de plus en plus de startups qui cherchent à améliorer la société ou réduire leur impact sur la planète. Cet engagement pourrait même avoir un effet d'entraînement sur d'autres sociétés.
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Sans la protection de Nicolas Fouquet et du duc d’Anjou, les écrits de Molière ne seraient peut-être jamais arrivés jusqu'à nous. Initialement protecteur et financeur des arts et des lettres, le mécénat est depuis devenu une affaire d’entreprise. Il n’est pas rare que les associations remercient les fondations d'Orange, de la SNCF ou d’EDF pour  leur soutien. Depuis le début de la crise sanitaire, nombreuses sont également les entreprises ayant donné de leur temps, utilisé leurs compétences ou offert leurs solutions à des secteurs plus gravement touchés que le leur.

C’est le cas de l’industrie textile qui a réalisé des masques en tissus pour les soignants ou d'enseignes comme Décathlon qui a offert tout son stock de masques de plongée qu'ils servent dans les services de réanimation. Pendant ce temps-là, les startups se sont aussi mises en ordre de bataille. 

Le Covid, un révélateur d'engagement 

L’association Admical, qui promeut le mécénat, a publié un rapport en juin dernier sur l’impact du Covid sur le mécénat. Le rôle des startups et des entrepreneurs y est évoqué. "Les makers des Fablabs se sont rapidement mobilisés" , détaille Sylvaine Parriaux, déléguée générale d’Admical. Les "makers" sont les membres des FabLabs qui fabriquent et conçoivent les prototypes des startups par exemple. Ainsi, plusieurs centaines de milliers de visières ont été fabriquées en quelques semaines pour les professionnels du médical. Le rapport souligne également la collaboration entre des collectifs tels que "Makers contre Covid", "Just one giant lab" ou encore "le Discord Entraide Maker" avec l’AP-HP et d’autres CHU pour développer des modèles de protection homologués.

Dans les territoires, les startups n’ont pas hésité à offrir leurs solutions numériques pour aider les hôpitaux et les petits commerces. La startup Hopen project a conçu un boîtier connecté à la télévision, la Sunday Box, qui permet de partager des photos à partir d’une application. De son côté, Kaduceo a développé de nouveaux modèles d’analyse de prédiction des entrées et des sorties de patients liés au coronavirus. Les membres de l’association EdTech se sont également mobilisés pour soutenir le monde de l’éducation et de la formation. Les exemples de ce type sont légions.

"De façon générale, plein de petites entreprises qui ne faisaient pas de mécénat se sont révélées mécènes à l’occasion de cette crise d’une ampleur inédite. Dès lors qu’une société  avait un produit ou un service qui pouvait être utile, elle l’a proposé" , poursuit Sylvaine Parriaux. 

Le mécénat évolue sous la houlette des startups

Dans le schéma traditionnel, les entreprises attendent d’avoir une certaine maturité, financière et humaine (effectifs), pour se lancer dans le mécénat. "Certaines startups intègrent ce partage de valeur dès leur lancement. Cela prend la forme d’une inscription, dans les statuts de l’entreprise, d’un mécénat financier de redistribution à des associations" , détaille Sylvaine Parriaux. Il est désormais courant de voir des sociétés arborées le label "1% for the planet" marquant leur engagement à reverser 1% de leur chiffre d’affaires à des associations de préservation de l'environnement. Les jeunes pousses de l'industrie textile en sont particulièrement friandes comme Hopaal qui pousse sa démarche jusqu’au bout en participant au financement de quatre associations.

"Or, penser à donner alors qu’on lance son entreprise et qu’on dispose de peu de moyens et de visibilité est très rare et surprenant. Cela marque un véritable engagement de leur part" , poursuit la déléguée générale d’Admical. Cet engagement est d’autant plus fort pour les entreprises de l’ESS. La startup Phenix, spécialisée dans la lutte contre le gaspillage alimentaire, est en train de développer un nouveau partenariat avec le réseau d’entreprises solidaires Andes.

Les startups qui partagent la valeur dès le départ prendront une longueur d’avance sur leurs concurrentes. "Réaliser des missions d’intérêt général permet d’en retirer tout ce qui est soft skills : capacité d'adaptation, ouverture d'esprit, flexibilité...qui sont utiles et transférables dans l’entreprise. Surtout dans des sociétés qui font de l’innovation le coeur de leur modèle" . Cet engagement est aussi un "atout pour séduire de nouveaux collaborateurs, améliorer son ancrage territorial et son image. À condition que la mission demeure au premier plan et non l’inverse" , tempère Sylvaine Parriaux.

On l’aura compris, ce n’est pas le montant du chèque qui compte ici. Chaque contribution compte et celle des startups pourrait inspirer d’autres sociétés et "avoir un effet d’entraînement" , estime Sylvaine Parriaux. Aujourd’hui, seules 9% des entreprises déclarent faire du mécénat. La marge de manœuvre est donc importante.