9 mars 2021
9 mars 2021
Temps de lecture : 5 minutes
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Comment i-Virtual mesure vos signes vitaux à partir d'un simple selfie

i-Virtual met au point un dispositif à même de mesurer six variables physiologiques à partir d’une simple vidéo prise par l’utilisateur·rice. La startup, qui espère améliorer la qualité des examens médicaux réalisés à distance en vendant son logiciel aux plateformes de téléconsultation, vient de lever 2,5 millions d’euros.
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Réaliser un check up médical depuis chez soi sera bientôt une réalité. La startup messine i-Virtual, fondée en 2014 afin de traiter la phobie sociale, a mis au point toute une série de dispositifs qui permettent de mesurer jusqu’à six variables physiologiques de patient·e·s – fréquences cardiaque et respiratoire, pression artérielle, saturation du sang en oxygène, variabilité cardiaque et niveau de stress. La différence par rapport aux outils employés par les médecins au quotidien ? Ici, tout se passe à distance : les analyses sont effectuées à partir de l’image fournie par la caméra de l'utilisateur·rice. Une technologie novatrice, dont plateformes de téléconsultation et groupes hospitaliers pourraient bientôt s’emparer dans le but d'améliorer le suivi des malades à distance. Pour se développer, i-Virtual vient de boucler un tour de table de 2,5 millions d’euros auprès des fonds Elaia et Majycc eSanté.

Un selfie vidéo de 30 secondes suffit

À l’origine, c'est sur une idée d’Alain Pruski et Abdelhak Moussaoui – deux chercheurs à l’université de Lorraine, respectivement experts en sciences cognitives et algorithmique – que s’est construite i-Virtual. "Ils ont mis sur pied une technique à même de déterminer ces variables physiologiques en fonction des variations de couleur des pixels, lorsqu’une personne filme son visage. Le rythme du sang peut être estimé de cette façon" , explique à Maddyness Gaël Constancin, qui a été recruté en 2019 pour devenir président-directeur général de la startup. D’après le dirigeant, "une caméra s’avère plus riche en informations que l'œil humain". La technologie de la jeune pousse, qui a nécessité 5 ans de recherche et développement entre 2014 et 2019, analyse ainsi le flux vidéo image par image. "Cette manière de procéder offre le même résultat qu’un oxymètre" , affirme Gaël Constancin.

La détection de cette variation de couleur, induite par les globules rouges, afficherait un taux de précision de 95 % à en croire l’entreprise. Une étude clinique, menée à Nancy sur plus d’un millier de personnes, confirmera ces résultats à la fin du mois d’avril 2021. "Pour que cela fonctionne, il nous faut pouvoir certifier que nous sommes aussi pointus que les dispositifs médicaux traditionnels" , juge Gaël Constancin. Les briques logicielles conçues par i-Virtual pour chacune des variables physiologiques, commercialisées sous le nom de Caducy, sont vendues aux entreprises clientes en marque blanche. "Elles peuvent choisir de n’acheter qu’un seul des paramètres que l’on sait mesurer" , expose ainsi le dirigeant, qui entend là multiplier les cas d’usage. Parmi les premiers clients d’i-Virtual, qui n’ont à date recours qu’aux fonctionnalités liées à la variabilité de la fréquence cardiaque et au stress, figurent des militaires ou des entreprises de l’industrie automobile. "Cela peut être utilisé dans le cadre d’exercice de méditation ou à bord d’un véhicule, pour empêcher que la personne au volant ne s’endorme" , illustre le dirigeant.

Alors que les paramètres pris en compte se feront plus nombreux avec le temps, la startup continue d’affiner ses algorithmes. "Notre ambition est de détecter des pathologies. Cela sera possible une fois que la mesure des signes vitaux aura été consolidée." D’après la startup, 30 secondes suffisent à faire remonter les données. "C’est moins de temps qu’il n’en faut pour mettre le tensiomètre en place autour du bras du patient" , avance Gaël Constancin, qui vante "le 6 examens en 1".

Un pas vers la détection de pathologies

Dans les faits, seuls les deux modules dédiés au bien-être sont en vente à cette heure. "Il s’agit de la variabilité cardiaque et de l’indicateur de stress, qui s’établit sur une échelle de 0 à 5" , précise Gaël Constancin, ajoutant qu’il convient de "contextualiser soi-même ce chiffre". Les prochains paramètres, la saturation du sang en oxygène ainsi que la tension artérielle, seront déployés à partir de la mi-2021. Le dispositif d’i-Virtual doit, avant cela, obtenir le marquage CE, indispensable pour mettre des outils médicaux sur le marché en Europe. "Nos deux ingénieurs qualité en interne s’y attèlent" , affirme Gaël Constancin, qui mise sur une certification "dans quelques mois". Parmi les principaux prospects d’i-Virtual figureront alors les plateformes proposant de la téléconsultation – Doctolib ou Maiia, par exemple. "Mais également les mutuelles qui disposent d’un tel service ainsi que les groupes hospitaliers, pour le télésuivi des prises en charge en ambulatoire" , avance ainsi le chef d’entreprise.

La jeune pousse assure que ses algorithmes propriétaires sont entreposés sur le serveur d’un hébergeur de données de santé certifié. "Nous ne stockons pas les données de nos utilisateurs, puisque nous nous contentons d’effectuer le calcul. C’est à eux de savoir s’ils souhaitent conserver leurs données médicales pour les communiquer à des tiers" , pointe Gaël Constancin. Un système rodé tout au long de l’étude clinique, qui a bénéficié de 500 000 euros de financements non-dilutifs (banques et subventions) en 2020. Avec une levée à hauteur de 2,5 millions d’euros, i-Virtual conduira "deux études supplémentaires en 2021 et 2022 pour intégrer de nouvelles variables physiologiques et améliorer l’interface client". Dès le lancement de sa plateforme, la startup se lancera à l’assaut du Vieux continent. Si elle ne compte que 11 salarié·e·s à date, elle entend "tripler" ses effectifs d’ici à la fin 2022.

Un déploiement aux États-Unis devrait intervenir suivant ce même calendrier, une fois la certification de la Food and Drug Administration (FDA) obtenue. "De premiers contacts ont été initiés avec des acteurs japonais et africains" , va jusqu’à avancer Gaël Constancin, qui se réjouit du "soutien de fonds tels qu’Elaia et Majycc eSanté, qui sont des acteurs de poids dans la DeepTech et l’e-santé en Europe".