Mise à jour d’un article publié le 22 juin 2020
La mesure avait fait polémique en 2020, elle a été prolongée jusqu’à fin 2022. La France a décidé de prolonger d’un an le renforcement du contrôle des investissements étrangers, instauré au printemps 2020, au plus fort de la pandémie, a annoncé le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, sur France 2, ce lundi matin. Ce dispositif avait été imaginé pour protéger les entreprises tricolores, fragilisées par la crise, des opportunismes étrangers. Il avait été loin de faire l’unanimité parmi les dirigeants d’entreprise.
Lors d’une assemblée générale de l’association France Digitale, qui s’était tenue jeudi 18 juin 2020 et à laquelle Bruno Le Maire et le secrétaire d’État au Numérique Cédric O avaient répondu aux questions des membres du lobby du numérique, les participants n’ont pas manqué de redire leur opposition à cette mesure. Par la voix de Lucie Basch, fondatrice de Too Good To Go et alors présente au board de France Digitale, l’association s’était émue que cela soumette les opérations financières « à deux contrôles : l’un au niveau français, l’autre au niveau européen » mais aussi que cette « position défensive » à l’égard des investissements directs étrangers (IDE) ne plombe l’attractivité de l’Hexagone.
En avril 2020, Bercy avait en effet annoncé que le seuil de prise de participation dans des entreprises sensibles nécessitant une autorisation de l’administration était abaissé de 25% à 10% et serait valable jusqu’à la fin de l’année. Conséquence directe de l’épidémie de coronavirus, les biotechnologies faisaient aussi leur entrée dans la liste des secteurs sensibles. Une modification qui n’est pas passée inaperçue aux yeux des investisseurs comme des startuppers.
Pas de doublon avec l’Europe
Une crainte que Bruno Le Maire a jugée infondée, la France s’étant classée en 2019 au premier rang des pays européens les plus attractifs pour les IDE. « C’est un résultat que l’on a obtenu après trois ans d’efforts et on ne veut pas perdre cette place » , a souligné le ministre, qui a estimé que le décret publié fin avril est « une manière simple de dire aux investisseurs que s’ils ont la volonté de toucher à des technologies sensibles, nous serons vigilants » . Enfin, le ministre a rappelé que « l’outil de contrôle utilisé au niveau européen est une simple alerte mais ne nécessite pas d’accord comme celui de la France » , battant en brèche l’idée d’un double mécanisme auquel les investisseurs devraient se soumettre.
Dans un livre blanc dédié à la question, le cabinet d’avocats Dechert précise ainsi que « les nouvelles régulations européennes (datant de mars 2019, NDLR) n’introduisent pas de contrôle centralisé comme ce qui peut se faire aux États-Unis. Elles créent un mécanisme de coordination des dispositifs nationaux d’analyse des investissements directs par des investisseurs étrangers, donnant à la Commission européenne un nouveau rôle central de conseil en la matière » . La Commission peut ainsi émettre un avis sur une opération – mais n’a pas le pouvoir de s’y opposer, par exemple.
Un dispositif contraignant…
Parmi les pays européens, la France fait figure de chien de garde en la matière. Parmi les États membres, treize n’ont ainsi aucun dispositif d’analyse ou de contrôle des investissements étrangers. La France, parmi quatorze autres États membres, a opté pour la mise en place de garde-fous, comme l’illustre cette carte réalisée par le cabinet Dechert.