21 mars 2022
21 mars 2022
Temps de lecture : 4 minutes
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3 pistes pour doper l'innovation technologique française

Dans un nouveau rapport sur l'innovation technologique, l'Institut Sapiens met en avant les faiblesses que la France doit combler pour (re)conquérir sa souveraineté et sa compétitivité.
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Crédit : John Cameron

La pandémie que nous traversons illustre parfaitement les enjeux et les écueils que rencontrent le monde de la recherche et de l’innovation aujourd'hui en France, deux piliers essentiels aux progrès, estime l'Institut Sapiens, dans un nouveau rapport intitulé "Relever le défi de la compétition technologique mondiale".

Malgré la qualité de ses chercheurs, l’Hexagone n’a pas réussi à mettre rapidement sur le marché un vaccin contrairement à BioNTech ou Moderna, pour ne citer qu’elles. Il n’y a pas que du côté de la recherche que le bât blesse : le Covid-19 a aussi mis en lumière une grande défiance vis-à-vis du monde scientifique considéré comme vecteur du progrès et du développement des sociétés.

Deux phénomènes qui sont apparus pour des raisons diverses : un désintérêt des étudiants pour les sciences dures, une baisse des investissements étatiques dans la R&D, un manque de culture du risque et un trop grand protectionnisme par rapport aux investisseurs étrangers, résume le think thank. 

Un désengagement de la recherche 

"La R&D est essentielle pour un nation voulant peser dans la compétition technologique mondiale" , estime l’Institut Sapiens dans son rapport. Or, dans ce domaine, la France accuse un retard. "Les efforts dans ce secteur stagnent à 2,2% de son PIB, bien loin de l’objectif de 3% fixé par la Commission européenne. Résultat, la France figure à la 15ème place des pays de l’OCDE les plus volontaristes en matière de R&D" , a expliqué Olivier Babeau, fondateur de l’Institut Sapiens, lors de la présentation de l'étude.

Le think thank pointe trois raisons à ce phénomène :

  • le désengagement de l’Etat qui assumait 54% de la dépense intérieure de R&D il y a 30 ans contre 33% aujourd’hui, laissant aux entreprises la responsabilité d’assurer le reste des efforts. 
  • Deuxième raison mise en avant, la position protectionniste adoptée par la France et les restrictions prises pour réguler les investissements étrangers. Si l’Hexagone attire les investisseurs, ces financements "restent encore trop faibles par rapport au potentiel de l’Hexagone" , estime l’Institut Sapiens.
  • Dernier point mis en avant, le recul scientifique qui se caractérise par la baisse des inscriptions en master dans les domaines des sciences dures ou de la santé (-1 point) alors que celles pour les sciences sociales grimpent en flèche (+10 points).

La culture du risque 

Le corollaire de cette faiblesse en science est l’absence de culture du risque, une notion qui va de paire avec l’apprentissage des sciences qui passe par la théorisation, la réalisation de tests qui se traduit parfois par des échecs, nécessaires pour résoudre un problème. 

Une vision partagée par Alain Rossmann, interrogé par l’Institut Sapiens. L’entrepreneur français, installé aux Etats-Unis, estime que "l’une des grandes différences entre la France et les Etats-Unis réside dans la peur de l’échec" . Et de poursuivre : "La risquophilie américaine s’explique par l’importance des récompenses, académiques ou fiscales" , sans oublier que "la valeur de l’exemple est plus importante là-bas aussi. Au sein de la Silicon Valley, il y a beaucoup de réussites et cela incite les gens à prendre des risques pour faire de même", citant pour se faire l'encadrement des marchés : "Aux USA on enlève la friction et on assume 90% de protection pour gagner 5% de rentabilité, en France, on veut 100% de protection quitte à n’avoir que 1% de rentabilité". Pour rappel, en pleine pandémie, le gouvernement américain n'a pas hésité à débloquer 11 milliards de dollars en à peine quelques semaines pour favoriser la création d’un vaccin. Une dizaine d’essais ont finalement été réalisés. 

3 axes de développement 

Le développement d’innovations et de nouvelles technologies est essentiel pour assurer la compétitivité et la souveraineté française, selon l'organisme. Il est donc primordial de tenter de redresser, le plus rapidement possible, la barre. Pour se faire, l’Institut Sapiens envisage trois pistes : 

  • Dynamiser la recherche française "en réaffirmant l’autonomie des établissements universitaires, en améliorant les coopérations entre les agences de financements existantes et en renforçant les vocations scientifiques et le rôle des sciences comme moteur de l’innovation et de l’entrepreneuriat" .
  • Opérer un choc de financement grâce aux financements étrangers "en assouplissant les restrictions sur les investissements directs étrangers, tout en déployant des protections sur l’indépendance des chercheurs, l’accès réciproque aux travaux de recherche et sur les différents transferts de technologies; profiter des capitaux étrangers entrants pour porter l’effort de R&D de la France de 2,2 à 3% du PIB; accentuer les coopérations et les partenariats avec les acteurs de la recherche étrangers".
  • Promouvoir la science ouverte sur le monde "en favorisant l’émergence d’initiatives publiques ou privées visant un partage plus élargi des connaissances et résultats issus de la recherche et en levant les freins au développement d’une véritable science pour renforcer la coopération scientifique internationale".