Des dessins de singe (les « Bored Apes »), la réplique du premier tweet jamais posté ou l’animation d’un Donald Trump nu dans l’herbe, voici quelques-uns des NFT qui se sont chacun vendus pour des millions de dollars depuis début 2021, sous les yeux d’un grand public à la fois fasciné et circonspect. Les « non-fungible tokens » ou « jetons non fongibles » , objets numériques uniques et infalsifiables, ont ouvert un nouveau marché de la collection, dans lequel se sont déversés des dizaines de milliards de dollars.
Pour autant, « les NFT sont très rudimentaires pour l’instant » , explique Sandy Khaund, fondateur de la startup Credenza. Au-delà du monde de l’art, « ils n’ont pas beaucoup de fonctions, d’utilité ». « La plupart sont des singes ou des trucs du genre, qui ne servent à rien » , abonde Juan Otero, directeur général de Travala, site de voyage en ligne, en référence aux fameux « Bored Apes ».
Starbucks, qui va bientôt lancer ses propres NFT, y voit plutôt un « actif programmable, qui peut aussi être un laissez-passer ». Posséder un jeton non-fongible aux couleurs du géant des cafés ouvrira l’accès à des « avantages uniques » , ainsi qu’à une « communauté » , une nouvelle vision d’un programme de fidélisation, appuyée sur la blockchain. Cette technologie, sur laquelle reposent les cryptomonnaies et les NFT, permet d’utiliser un même module pour différentes applications.
Côté institutionnel, en juillet 2021, la petite république de Saint-Marin, au cœur de l’Italie, a lancé un passeport vaccinal contre le coronavirus, derrière lequel se cachait un NFT. Alors que le certificat Covid numérique européen était conçu pour l’Union européenne, ce passeport avait lui vocation à pouvoir être vérifié partout, sans nécessiter d’application mobile dédiée.
« Folie garantie »
Credenza, pour sa part, est en discussion avec des équipes et ligues sportives pour mettre en place une vision du NFT version couteau suisse, adapté aux nouveaux usages. Les NFT et la blockchain sont « accessibles dans de multiples univers, que vous vouliez aller voir un match de NBA à la salle ou un concert dans le métavers » , illustre Sandy Khaund, en référence à cet univers numérique où l’on peut mener une existence virtuelle, comme dans les jeux vidéo Roblox ou Minecraft.
Jenn McMillen, du cabinet marketing Incendio, cite aussi l’exemple du groupe de rock indépendant Kings of Leon. Dans le cadre de la version NFT de son album « When You See Yourself » , il a édité huit « tickets d’or » , qui garantissaient chacun quatre places au premier rang lors de toutes les tournées futures du groupe. « Si vous êtes une marque » , explique Jenn McMillen, « pensez aux expériences les plus désirables, aux accès les plus exclusifs, ou quelque chose qui est certain de devenir viral, et englobez ça dans un NFT all-access. Ce sera la folie garantie grâce à la rareté. »