L’étude réalisée par Roland Berger montre une absence de parité au sein des organes de gouvernance des scaleups européennes, puisqu’on y compte seulement 20 % de femmes. Quel regard portez-vous sur ces chiffres à travers votre expérience ?
Sarah Huet : Chez AFemaleAgency, nous accompagnons les femmes dans la construction de leur carrière. Elles entrent dans une communauté, elles développent leur réseau. Placer des femmes à des postes à haute responsabilité dans les entreprises, c’est aussi leur donner la possibilité de pouvoir infléchir les biais existants dans les entreprises. Quand elles entrent dans une instance de gouvernance, elles ne vont pas seulement participer à la stratégie de l’entreprise mais vont aller plus loin. Aujourd’hui, on compte 20 % de femmes dans les instances de gouvernance et 18 % aux postes de C-level, c’est désolant.
La première chose est d’essayer de comprendre ce qu’est la gouvernance dans une entreprise. Les startups sont encore en phase de démarrage sur ces sujets. C’est aussi pour cette raison qu’il est important de s’emparer de ce sujet dès maintenant.
Alexia Boeckx : Au-delà de la féminisation, le premier problème est le manque d’organisation et de professionnalisme des startups et des scaleups concernant leur gouvernance. Notre objectif est d’apporter de l’information et d’aider les femmes à comprendre ce sujet, afin d’avoir un impact très concret sur leur carrière.
Je rejoins Sarah sur le besoin d’agir maintenant afin d’éviter que, dans 10 ans, la gouvernance des startups soit plus structurée, mais que les femmes n’y aient pas la place qu’elles méritent.
Vous avez suivi une formation avec l’EM Lyon et le cabinet HeR Value. Quels sont les principaux enseignements que vous en avez retirés ?
S. H. : Personnellement, je siège dans des boards depuis sept ans. Il est important de comprendre la posture à avoir selon les différents types de structure qu’on intègre, car les attentes ne sont pas les mêmes dans une startup que dans une société du CAC40, par exemple.
La formation a duré 63 heures au cours desquelles nous avons balayé l’ensemble des sujets concernant la gouvernance. Cela nous a permis de mieux comprendre les entreprises et leurs besoins. On s’est également rendu compte qu’il est encore perçu comme complexe de trouver un administrateur indépendant, encore plus si on cherche une femme. Malgré ce que disent les entreprises, nous avons 160 talents dans notre pipe qui veulent exercer ces missions.
Nous étions aussi les plus jeunes participantes, cela souligne qu’aujourd’hui, pour briguer de tels mandats, il faut encore avoir 25 ans d’entreprise derrière soi. Or, ce ne sont pas forcément les talents attendus par les startups et les scaleups. Il faut aussi modifier le prisme dans lequel on travaille avec les jeunes et les femmes pour leur montrer qu’elles ont un rôle à jouer à ce niveau.
Nous envisageons de développer nos propres formations avec des partenaires en prenant en compte cette dimension technologique des startups et des scaleups qui ont une vélocité et des attentes juridiques et financières différentes.
A. B. : C’est vrai, les formations sont très axées sur la gouvernance dans les groupes du CAC40 et ne prennent pas forcément en compte les réalités de l’écosystème startups. Mais les startups devraient néanmoins s’inspirer de ce que ces sociétés ont déjà mis en place en termes de formalisme et de structuration de la gouvernance en l’adaptant à leurs propres besoins.