" Le nombre de démissions a atteint un niveau historiquement haut. " C’est le constat de la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), qui a enregistré 520 000 démissions entre fin 2021 et début 2022. Le précédent record date du premier trimestre 2008, marqué par la crise financière, où 510 000 personnes avaient quitté leur emploi. " Après deux ans de pandémie, beaucoup de personnes ont été amenées à réfléchir au sens de leur travail. Elles ont aussi voulu se rapprocher de leur famille ou consacrer davantage de temps à leur vie privée ", analyse Rémi Malenfant, directeur de l'innovation RH au sein de la société spécialisée dans les ressources humaines, UKG, qui a mené une enquête à ce sujet.

Les Français regrettent plus que les autres d’avoir démissionné

Mais ce qui a surtout intéressé l’étude, ce sont les personnes qui ont décidé de retourner chez leur ancien employeur. C’est ce qu’on appelle " l’effet boomerang ". L’enquête s’est concentrée sur les Etats-Unis, le Mexique, l’Allemagne, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et la France. Les résultats montrent, qu’en moyenne, 40 % des démissionnaires regrettaient leur choix.

Un phénomène encore plus marqué en France, où 60 % des salariés ayant démissionné pensent qu’ils étaient mieux auparavant. " La grande différence entre le Royaume Uni et la France, par exemple, est que les anglo-saxons ont tendance, lorsqu’ils quittent un emploi, à changer de poste. En France, les salariés vont plutôt quitter leur employeur mais exercer le même métier ", précise Rémi Malenfant. Par frilosité souvent, mais également parce que le marché de l’emploi est très axé sur les diplômes et que, sans formation, il n’est pas forcément évident de se reconvertir.

L’effet boomerang, plus rare en France

Mais si les Français sont ceux qui regrettent le plus leur choix, ce sont aussi les moins à même à retourner chez leur ancien employeur. Selon l’enquête d’UKG, l’effet boomerang concerne 1 démissionnaire sur 5 dans le monde. Et c’est dans l’Hexagone que ce taux est le plus bas avec 13%. Notamment parce que les managers français sont les moins enclins à envisager la réintégration de leurs salariés ayant démissionné. " Il y a une explication culturelle à cela. Souvent, la démission est perçue comme une rupture. Et pour les managers, il y a aussi l’idée que la personne n’est plus motivée ", détaille le directeur de l’innovation RH. Sans compter les lourdeurs administratives et le code du travail qui rend les démissions et les recrutements moins flexibles que dans les pays anglo-saxons notamment.

Pour autant, l’opportunité est réelle pour les employeurs, qui ont de plus en plus de difficultés de recrutement. Selon une étude de Pôle Emploi, ils prévoient 3 millions d’embauches en 2022, soit 12 % de plus qu’en 2021. Et quasiment tous les secteurs d’activités souffrent d’un manque de personnel. Puiser dans les ressources ayant quitté l’entreprise peut donc être une solution. D’autant que, selon l’enquête d’UKG, 65 % des collaborateurs français ayant démissionné expriment une volonté de revenir chez leur ancien employeur si la proposition leur était faite.