Longtemps perçu comme un fonds d’investissement corporate du groupe AXA, AVP (Axa Venture Partners) est en réalité un fonds d’investissement traditionnel. Bien qu’Axa reste aujourd’hui le principal investisseur, le fonds accueille depuis deux ans des investisseurs externes (grands institutionnels, family offices ou corporate), qui représentent aujourd’hui près de 300 millions d’euros.

Six ans après le lancement, les encours atteignent 1,2 milliards d’euros sous gestion. L’équipe compte aujourd’hui 35 personnes et opère des deux côtés de l’Atlantique avec des bureaux à Londres, Paris, New York et San Francisco et compte aujourd’hui une soixantaine de sociétés en portefeuille. Maddyness a rencontré Sébastien Loubry, Global Head of Business Development chez AVP, pour parler du fonds d’investissement dont le positionnement s’est bien affirmé depuis le dernier entretien.

Un fonds d’investissement tech

AVP investit dans la tech au sens large, avec des grandes verticales : modèles SAS, santé digitale, fintech, insurtech et consumer platforms. Le fonds revendique aujourd’hui la capacité de suivre des sociétés à presque toutes les étapes. Côté venture capital, AVP investit du seed à la série B avec des tickets allant d'un à dix millions d’euros. Sur la partie growth, le fonds investit à partir de la série B avec des tickets entre 10 et 50 millions. En moyenne, AVP reste investi entre quatre et sept ans dans les sociétés. Les premières sorties viennent donc d’avoir lieu, avec notamment celle d’Happytal, un service de livraison au sein des établissements de santé.

AVP met en avant une approche très disciplinée sur la valorisation. " Récemment nous avons fait très peu de deals car nous pensions qu’il y avait trop d’euphorie et que les valorisations étaient trop hautes ", explique Sébastien Loubry. AVP reste prudent et sélectif, mais les investissements ont aujourd’hui repris. Ils viennent de participer à un nouveau tour de table d’Incepto, le netflix de l’imagerie médicale et un nouvel investissement mené par AVP en growth devrait être annoncé dans les prochaines semaines.

Côté levées, le closing du fond growth, labellisé Tibi, devrait bientôt être annoncé en ligne avec l'objectif initial de 500 millions d'euros.

Une vision européenne et américaine

AVP s’est développé avec des équipes en Europe et aux États-Unis. " C’est un élément fort de notre proposition, qui est très valorisé par les entrepreneurs ", explique Sébastien Loubry. " Nous avons aidé de nombreux entrepreneurs à aller des États-Unis vers l’Europe et vice-versa ", ajoute-t-il. Ils viennent notamment d’aider deux de leurs sociétés américaines, Security Scorecard et Phenom People, des entreprises de software, à entrer en Europe. Ils sont aussi en train d’aider Inside Board, un éditeur de plateforme informatique français à aller vers les États-Unis.

Ce double ancrage leur permet de sourcer des entreprises des deux côtés de l’Atlantique et d’avoir un regard critique sur ces deux marchés. Sébastien Loubry détaille : " De manière générale, la tech reste beaucoup plus avancée sur les marchés américains, il y a des boites très intéressantes en Europe, mais le marché manque parfois de profondeur. Cependant, le marché américain reste cher. Le marché européen l’a aussi été, mais on voit à nouveau de bonnes opportunités ". Concernant les possibilités de sorties, il note aussi des différences : " Les sorties aux États-Unis sont plus faciles qu’en Europe. En Europe la question est parfois compliquée, les corporate n’ont pas forcément de liquidités et les marchés boursiers sont moins bien structurés qu’aux US pour les introductions en Bourse ".

Un accompagnement extra-financier

L’une des forces d’AVP est l’existence d’une équipe dédiée à l’accompagnement des sociétés du portefeuille. Leur rôle ? Faciliter l’introduction auprès des Limited Partners, dont Axa, apporter du conseil et de l’accompagnement sur des sujets variés et donner l’accès à un réseau. En ce sens, ils ont mis en place l’an dernier un comité stratégique auquel ils ont fait rentrer Brune Poirson, ancienne Secrétaire d'État auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, Heidi Messer et Bill Aulet, entrepreneurs américains et Georges Stansfield, directeur général adjoint et secrétaire général du groupe Axa. " Nous avons mis en place des systèmes de mentoring et de coaching. L’idée est de donner un accès privilégié aux sociétés du portefeuille à des expertises et des secteurs très variés. Nous avions déjà l’expertise des services financiers avec Axa, mais maintenant nous pouvons aller dans le domaine du luxe, de l'hospitalité ou encore de la santé ", explique Sébastien Loubry.

Cette proposition de valeur leur permet d’attirer des entrepreneurs, mais aussi des institutionnels intéressés par le levier stratégique de l’open innovation. Les entreprises du portefeuille peuvent devenir clientes des Limited Partners. Security Scorecard a notamment équipé Axa de son logiciel de cybersécurité et Phenom people de son logiciel de ressources humaines dans le monde entier.

Sur ce dernier point, Sébastien Loubry précise : " Nous avons ce levier stratégique, mais nous investissons avant tout sur des critères financiers. Ce qui nous différencie d’un corporate venture est qu’on investira jamais sur une société en se disant qu’il y a une priorité stratégique ".