28 %, c’est le taux de femmes ingénieures en France selon la dernière étude de l’IEFS (Ingénieurs et scientifiques de France). Si ce pourcentage a augmenté au fil des années, il n’en reste pas moins faible. Parmi ces femmes, se trouve Émilie Christien, directrice de projet chez Sopra Steria. Cette ingénieure a su faire sa place au sein d’un milieu considéré comme masculin. À quinze ans déjà, Émilie Christien voit à travers le numérique " un outil formidable qui pourra aider l’humain à résoudre pas mal de problèmes ". Elle découvre la magie de la technologie avec l’arrivée du premier ordinateur à la maison. L’objet de curiosité est trop complexe pour les parents d’Émilie, qui prend alors les rênes de l’installation du PC : " je me suis plongée dans le monde informatique dès l’enfance ". 

Une expérience qui lui ouvre les portes de sa vocation. Cependant au lycée, l’adolescente bonne élève emprunte une filière SVT option physique-chimie qui ne lui convient qu’à moitié.  " Comme j’étais une femme, il n’était pas naturel de m’orienter vers une filière sciences de l’ingénieur comme je l’aurai souhaité ", déplore-t-elle. A l’époque, elle accepte la situation mais réalise aujourd’hui que " Si je n’avais pas eu la chance d’avoir accès à un ordinateur à mon domicile, je n’aurais sûrement jamais touché à l’informatique.

Son bac en poche, elle intègre tout de même une école d’ingénieur où, durant un semestre, elle profite d’un accompagnement pour être au niveau de sa promotion, qui ne compte d’ailleurs que trois filles sur une centaine d’élèves. 

Devenir une manager 

En 2007, Émilie Christien rejoint Sopra Steria. L’entreprise, reconnue pour ses activités de conseil, de services numériques et d’édition de logiciels, aide ses clients à mener leur transformation digitale et à obtenir des bénéfices concrets et durables en apportant une réponse globale aux enjeux de compétitivité des grandes entreprises. La jeune diplômée y est très bien accueillie et franchit les étapes au rythme qui lui convient. Elle fait ses débuts sur des missions techniques lui permettant de construire un socle pratique solide. Elle s’oriente ensuite vers un parcours managérial où elle encadre de grands projets, notamment à l’international - en Espagne et en Inde.

Désormais, Émilie Christien est directrice de projet à la tête d’une équipe d’une cinquantaine de personnes. " J’encadre, avec l’aide des chefs de projet, deux projets pour un acteur majeur du domaine des télécommunications ". L’un des projets consiste à développer des applications au cœur du système d’information du client et à mettre en place des solutions de transfert d’information. 

Le second projet met en œuvre des applications de dématérialisation de factures et l’équipe d’Emilie accompagne leur client sur les évolutions de ce domaine. " Mon rôle est très riche et possède une composante importante autour de l’épanouissement des collaborateurs. Il faut être inspirant pour aider les collaborateurs à progresser ", explique-t-elle. Elle-même a été soutenue par tout un écosystème chez Sopra Steria, notamment grâce à un mentor dont le rôle est " d’accompagner dans la progression de carrière afin d’évoluer régulièrement, dans le temps ".

Toutefois, elle en est tout de même convaincue, dans le monde professionnel, nombreuses sont les femmes qui s’auto-censurent. Émilie Christien, elle, a décidé de suivre le chemin de celles qui lui ont servi de modèle en interne : des femmes directrices des opérations ou directrices d’agence. " Si elles l’ont fait, pourquoi pas moi ? ". Des rôles importants et encourageants mais encore trop rares : dans son dernier observatoire, l’IEFS (Ingénieurs et scientifiques de France) révèle que seulement 10 % des femmes ingénieures ont accès à la direction générale de leur entreprise. Pour autant, elle l’assure, des femmes inspirantes et des hommes bienveillants l’entourent : " Les mentalités ont beaucoup évolué et les managers masculins sont très attentifs au respect de l’égalité femmes-hommes. "

S’engager pour la mixité

Il y a environ cinq ans, l’ingénieure, souvent décrite par son entourage comme dynamique et motivée, ressent le besoin de " faire bouger les choses " comme s’il s’agissait d’un devoir. Elle décide alors d’encourager d’autres jeunes femmes à suivre le même chemin. 

Elle s’engage ainsi au sein de Passer’Elles, un réseau interne de femmes et d’hommes engagés pour promouvoir la mixité dans les métiers du numérique. Ambassadrice dans la région de Rennes, elle organise des tables rondes auxquelles sont invitées des collaboratrices de Sopra Steria, des clientes de l’entreprise, des députées mais également des étudiantes en école d’ingénieur, afin de discuter de la place des femmes dans le numérique et de l’évolution de leur carrière. 

Les membres du réseau interviennent également dans les collèges et lycées afin de faire connaître aux plus jeunes les différents métiers du numérique – développeur, business analyst, commercial, etc. " Je fais ce métier épanouissant en partie par chance, mais j’aimerais que les autres n’aient pas besoin de cette chance et que les mêmes opportunités soient présentées à tout le monde ", explique Émilie Christien. L’ingénieure est optimiste : " Aujourd’hui, le numérique fait partie du quotidien des jeunes ". Emilie Christien veut montrer aux jeunes filles qu’il y a des femmes dans le numérique et espère ainsi, comme elle l’a vécu, susciter des " pourquoi pas moi ? ".