" Lors d’une soirée, je croise une personne âgée qui perdait le contrôle de son fauteuil roulant en utilisant une rampe. Il donnait de grands coups sur la main courante de son fauteuil et je me suis dit qu'il fallait absolument inventer un système de freinage " se souvient Colin Gallois, CEO d'Eppur, alors en dernière année d'école d'ingénieur à l'université de technologie industrielle de Compiègne. " Utiliser ses propres mains comme freins alors que près de 370.000 personnes handicapées en France utilisent un fauteuil roulant manuel n'était pas supportable pour moi " poursuit-il. D'autant qu'à chaque freinage, les mains sont chauffées, voire brûlées, les bras et les épaules fortement sollicités, voire traumatisés. Ainsi, 35% des paraplégiques souffrent de troubles musculo-squelettiques de l’épaule après 6 mois d’utilisation d’un fauteuil roulant.

Partant de ce constat, la startup Eppur fondée en 2016, a conçu Dreeft. " C'est un système inspiré des moyeux à “rétropédalage” présents sur les vélos hollandais. Les roues des fauteuils intègrent en leur centre un système de freinage qui s’actionne en tirant légèrement la main courante vers l’arrière. Ce système permet de ralentir et de s’arrêter sans aucun frottement dans la main et avec 5 fois moins d’efforts " résume Colin Gallois. Une innovation qui a déjà valu de nombreuses récompenses à la startup Lilloise dont deux prix lors des Handitech Trophy 2022.

Nul hasard à ce que cette innovation, digne d'une révolution dans la mobilité pour les personnes handicapées, ait séduit les investisseurs. Ainsi, Eppur a levé 1,2 million d'euros pour une première phase d'amorçage. " Nous avons eu le soutien d’investisseurs variés comme l’association Santélys spécialisée dans le secteur du handicap, le fonds d’investissement IRD Invest, le réseau de business angels Angels Santé et Antoine Proye, un business angel et entrepreneur " expose la startup, soutenue par Bpifrance, qui démarre à présent une nouvelle étape dans son développement.

Cap sur la production

Pour Colin Gallois et son équipe (constituée à ce jour de 5 personnes), cette levée de fonds va permettre " de financer la montée en puissance de notre appareil de production, de recruter des profils commerciaux, de lancer une étude clinique en vue de déposer une demande de remboursement du produit par la sécurité sociale à l’horizon 2025, et de continuer à investir dans la Recherche & Développement pour perfectionner notre système Dreeft et en développer de nouveaux ".

Soutenue par les conseils et la validation des professionnels de santé de 20 centres de rééducation auxquels Eppur a présenté son innovation Dreeft, la startup a déjà la confiance de ses premiers clients (particuliers et professionnels) : son système de freinage, " 100% Made in France " va être distribué dans près de 100 points de ventes en France dès le début de l’année 2023. Comme l'explique son CEO, " Les 14 pièces du moyeu, le cœur de notre technologie, sont usinées et assemblées à Bordeaux chez un premier partenaire, puis assemblées à Lille à quelques mètres de notre bureau, au sein de l’usine de vélo de Decathlon. Nous avons déjà vendu 100 exemplaires en pré-commande ".

Désormais accompagnée d'investisseurs, Eppur compte bien amener son innovation sur le marché français dans les prochaines semaines, puis plus largement en Europe dans les prochaines années. " Et ce n’est que le début ! " lance Colin Gallois qui a déjà en tête de nouveaux produits. " Notre ambition est de concevoir une gamme complète et de faire d’Eppur une marque incontournable de mobilité au service des personnes en situation de handicap ".