D’autres critères interviennent dans les négociations d’entrée, tels que les conditions de travail, le développement des compétences ou encore la flexibilité, sous toutes ses formes. Ces exigences sont-elles nouvelles ? Les employeurs les considèrent-elles comme démesurées sur un marché de l’emploi toujours en tension ?

Niveau de rémunération : critère numéro 1 pour les jeunes diplômés

En France, le salaire reste l’élément déterminant dans la recherche d’un premier emploi pour 72 % des actifs fraîchement diplômés : " Les attentes de salaire, un peu au-dessus de la réalité du marché, ont toujours été présentes de la part des jeunes actifs car la rémunération d’entrée façonne la suite de la trajectoire professionnelle ", explique Emilie Narcy, directrice des opérations et des ressources humaines chez Approach People Recruitment. L’étude iCIMS mentionne une rémunération annuelle moyenne attendue de 29.600 euros brut par an.

Est-ce vraiment mirobolant ? " Partout en Europe, on observe une hausse générale des salaires : en dessous de 30.000 euros brut par an, il est difficile de recruter ", poursuit Emilie Narcy. Néanmoins, certains secteurs subissent une inflation plus marquée : " Nous embauchons beaucoup de jeunes diplômés et, ces dernières années, le montant du salaire est devenu un sujet plus prégnant dans les négociations. Les demandes oscillent entre 45.000 et 50.000 euros brut par an, alors qu’avant elles se situaient autour de 42.000. C’est peut-être spécifique à la cybersécurité, un secteur pénurique en termes de recrutement ", souligne Justine Garcia, DRH de I-TRACING.

S’il est compliqué de s’aligner, des leviers de négociation existent : " Le variable ou les plans de développement sont beaucoup plus acceptés chez les candidats. Par exemple, chez Approach People Recruitment, pour donner de la perspective, nous proposons un plan d’évolution à 6, puis 12 mois en fonction de la performance réalisée ", explique Emilie Narcy.

Jeunes diplômés : quatre critères complémentaires à considérer

L’aspect pécuniaire ne fait pas tout, d’autres variables interviennent dans le choix des candidats : " Il est important de faire preuve de pédagogie en expliquant la réalité du marché auprès des candidats et des entreprises. Puis, d’autres avantages doivent être valorisés dans le package salarial ", insiste Emilie Narcy. L’enquête dévoile trois facteurs influençant le choix des jeunes diplômés : le sens au travail (49 %), les possibilités d’évolution (44 %) ainsi que la flexibilité des horaires (43 %). Des résultats relativisés par l’expérience de Justine Garcia : " La quête de sens est moins présente qu’il y a deux ou trois ans. Aujourd’hui, les candidats sont intéressés par des avantages plus individuels, de confort, tels que la flexibilité : horaires, organisation du travail ou mobilité géographique. ".

Emilie Narcy confirme la montée du critère flexibilité : " Le télétravail est une demande systématique et la semaine de 4 jours commence à émerger. ". Quant au développement des compétences, les modalités de négociation se durcissent : " Certains candidats exigent que les certifications ou les formations qu’ils auront à passer lors de leur expérience chez nous soient explicites dans l’offre et le contrat de travail ", explique Justine Garcia.

L’enquête met également en exergue le thème de l’inclusion : l’entreprise doit mettre à disposition des outils digitaux inclusifs tout comme les entretiens à l'embauche. " Plus globalement, les jeunes diplômés nous challengent sur nos engagements effectifs en termes de RSE : notre impact carbone ou encore les investissements sociétaux auprès d’associations. Ils s'interrogent sur la manière dont ils pourront contribuer au sein d’I-TRACING ", conclut Justine Garcia.

La cohérence employeur en probation

Après être passée au crible des nouvelles exigences, l’offre employeur reste sur le fil lors de leur période d’intégration dans l’entreprise. En effet, 35,4 % des candidats sont prêts à démissionner si le poste ne correspond pas à leurs attentes. La cohérence RH est donc mise à l’épreuve tout au long de l’expérience collaborateur… au risque de voir les talents déserter leur poste : " Les jeunes diplômés de 2023, sont plus attentifs, mieux renseignés et ont accès à l’information plus facilement. Pour ces talents, il est plus facile de repérer les incohérences en matière de culture d'entreprise. Il est donc très important d’être honnête sur sa culture d’entreprise et ce que l’on montre sur son site carrière ou ses réseaux sociaux ", explique Amandine Reitz, DRH EMEA chez iCIMS.

En 2023, les étudiants semblent donc plus confiants mais peu enclins à faire des concessions. " C’est très positif que les jeunes se rendent compte de leur valeur ", insiste Emilie Narcy. Un changement de paradigme que les entreprises doivent appréhender pour bâtir une stratégie de recrutement attrayante afin de continuer à attirer (et à retenir) les talents.