" On essaie de protéger la planète pour vous, plaide Watatakalu Yawalapiti. Mais on ne pourra pas le faire seuls.". Habillée de bijoux traditionnels et d’une large bande de peinture rouge au-dessus des yeux, Maddyness rencontre cette personnalité emblématique du mouvement pour les peuples indigènes au Brésil dans un cadre plutôt en décalage avec son image. C’est en effet dans le restaurant d’un grand hôtel parisien que se fera cet échange d’une heure avec celle qui fait de la défense du droit des femmes indigènes, un combat central de sa vie.

Quelques jours plus tôt, elle intervenait pendant la cérémonie de clôture de ChangeNOW, un sommet de trois jours qui rassemble les acteurs du changement. Le lendemain, c’est à l’Élysée qu’elle est reçue par le Président Emmanuel Macron. Seule femme de la délégation des chefs indigènes accompagnant le chef Raoni, elle comptait bien faire honneur en portant haut et fort leur voix trop peu souvent entendue. " Ce n’est pas une porte qui s’est ouverte seulement pour moi… mais pour toutes les femmes de l’Amazonie. ". 

Une tournée pour l’Amazonie

Le procédé n’est pas nouveau et cette tournée n’était que la énième manifestation de l’action du chef Raoni pour protéger l’Amazonie. Déjà en 1989, une tournée avec le chanteur Sting avait été très remarquée et avait permis la démarcation d’une partie des terres du peuple kayapo que représente Raoni. " On doit faire des tournées à l’infini, confie Watatakalu Yawalapiti. Les urgences se multiplient et nous avons besoin de beaucoup d’argent pour préserver nos terres. ".

Questionnée sur le montant dont ils auraient besoin pour préserver l’ensemble des zones ciblées, la cheffe indigène est incapable de donner un chiffre précis. L’argent est après tout une obsession occidentale. Mais en additionnant le coût pour acheter ces terres, ainsi que pour créer des bases pour les gardiens de la forêt, le chiffre de 50 millions d’euros est avancé.

" Nous voulons envoyer un message à toutes les personnes qui sont dans les entreprises et qui participent à l’économie du pays, lance Watatakalu Yawalapiti avec force. Pour qu’ils puissent nous soutenir, à protéger les forêts, les fleuves et les peuples autochtones. Parce que le Brésil est en train de déforester l’Amazonie et de contaminer nos fleuves au nom du progrès… mais c’est un progrès uniquement pour vous les Européens. En venant ici, j’espère expliquer et mobiliser les acteurs économiques pour qu’ils comprennent l’impact de la consommation de produits en provenance de l’Amazonie. ". 

À la fois alarmiste et pleine d’espoir, Watatakalu Yawalapiti ne peut pas s’empêcher de garder un discours teinté d’optimisme : " J’ai vraiment été impressionnée de la manière dont les non-indigènes ici sont prêts à s'engager et nous aider. Le soutien des Européens me donne l’image d’une lumière à la fin d'un tunnel. Imaginez si toutes les entreprises pouvaient se réunir pour aider les indigènes. ".

En faisant un don sur le site web de l’association Forêt Vierge, organisatrice de cette tournée, les fonds seront ensuite directement reversés à différentes associations locales : l’Institut Aritana, l’Associação Yawalapiti Awapa, l’Institut Raoni, l’association Metuktiré, les femmes de l’Associação dos indígenas do Xingu (ATIX), l’ANMIGA.